Avec son nouvel album Let the dog drive home, Teitur, artiste danois, continue à décliner sa pop délicatement arrangée. Originaire des Îles Féroé, celui qu'on avait découvert à travers la bande originaire de Ma super ex avec Uma Thurman, et qu'on a été surpris de retrouver à travailler avec Nolwenn Leroy, cartonne pourtant dans les pays scandinaves. Il a même remporté le prix de meilleur artiste lors de l'équivalent danois des Victoires de la Musique.
Par une fin d'après-midi très chaude de printemps, avant son passage au Café de la Danse, c'est un jeune homme agréable mais fort réservé que nous rencontrons non loin de la Porte Dorée à Paris.
En session, tu viens d'interpréter "Freight Train", une chanson sur l'enfance. Comment s'est déroulé la tienne sur les îles Feroé ?
Teitur : Je crois que c'est la même chose que pour un enfant qui aurait vécu à la campagne, ou dans une toute petite ville. Enfant, tu te construis ton propre monde.
Pour tes premiers concerts, comment s'est déroulée la recherche de lieu où jouer ?
Teitur : Aux Feroé, ça a été très facile. Tout le monde se connaît. C'est à partir du moment où j'ai quitté les îles Feroé que ça a été plus dur. Pour vivre de ma musique, je devais partir. C'est ainsi que nous nous sommes installés, avec ma famille, au Danemark.
Pourquoi avoir choisi de chanter en anglais ? Et d'abord as-tu toujours chanté en anglais ?
Teitur : C'est d'abord parce que je considère la musique comme un moyen de communiquer avec les gens. Or l'anglais est la langue qui permet de se faire comprendre le plus facilement. Dans un certain sens, ça peut apparaître comme une forme de facilité, mais ça me permet de m'inscrire dans un ensemble plus important, une communauté. Chaque langue a ses chansons et ses chants, mais les premières chansons que j'ai écoutées étaient en anglais. De plus, dans les pays du nord de l'Europe, l'anglais est un vecteur important pour la culture, même en littérature. Ça m'a donc semblé naturel d'écrire en anglais.
Sur ton album, il y a certaines chansons qui sont richement orchestrées et arrangées. Comment retranscrire cela sur scène ?
Teitur : Lorsque je compose, je ne veux pas quelque chose qui ne puisse être reproduit qu'en studio. Toutes mes chansons peuvent être adaptées pour un piano solo. Ou parfois aussi à la guitare. Par exemple, ce soir, je donne un concert en solo au piano. Il y a aussi moyen, si on veut, d'écrire des partitions et de louer les services de musiciens de ville en ville, mais je ne le fais pas car la musique est alors moins vivante, on est obligé de se caler sur les partitions puisque les musiciens n'ont pas le temps de s'approprier votre musique.
Dans tes chansons, il y a de nombreux noms propres, de personnes ou de lieux. Cherches-tu à donner des détails pour rendre vos histoires plus crédibles, ou y a-t-il une part de vrai dans ce que tu racontes ?
Teitur : Toutes mes paroles sont un peu biographiques. Ça renvoie à des choses que j'ai vues ou que j'ai vécues. Un de mes choix artistiques est de me contenter d'écrire sur ce que je connais. Tout le monde a des histoires à partager. Tout le monde peut raconter d'où il vient, ce qui lui est arrivé et exprimer ce en quoi il croit. Je n'aime pas, voire il m'est impossible d'écrire sur un sujet qui me soit totalement étranger. Chanter reste d'abord pour moi une manière de créer l'échange avec ceux qui m'écoutent, de communiquer avec eux.
Dans plusieurs de tes chansons, tu évoques les États-Unis. Or tu as déjà tourné là-bas. Est-ce un moyen pour toi de faciliter l'ouverture des portes de ce marché ?
Teitur : Non, j'en parle parce que j'ai passé du temps là-bas. C'est un peu mon expérience que je raconte, des souvenirs. Et en plus, ce n'est pas parce que j'écris sur Atlanta qu'ils vont me dérouler le tapis rouge (sourire). Ça ne fonctionne pas comme ça. En fait, ça rentre dans un processus plus complet. J'ai passé du temps là-bas, ma musique devenait plus américaine, mon son plus west coast, et mes paroles parlaient des États-Unis. J'ai ouvert cette porte et l'inspiration est venue comme ça.
Où va t'emmener cette nouvelle tournée ?
Teitur : J'ai commencé par les pays scandinaves, puis l'Allemagne. Après la France, je passe par la Grande-Bretagne, la Hollande, la Belgique et l'Autriche. Dans un deuxième temps, je partirai de nouveau tourner aux États-Unis. Il y a même certaines dates prévues en Asie, comme la Corée du Sud, mais la tournée n'est pas entièrement bouclée.
J'ai lu que tu avais participé à de nombreux projets avec des artistes de différentes nationalités. Est-ce quelque chose que tu planifies en fonction des tournées ?
Teitur : Pas vraiment. Je tourne beaucoup et depuis pas mal de temps maintenant. Cela fait bientôt dix ans que je passe beaucoup de temps loin de chez moi. Parfois, il y a de belles rencontres sur la route. Lorsqu'on se croise à nouveau, entre musiciens, on se demande si ça ne vaudrait pas la peine d'essayer de figer un de ces moments qu'on partage ensemble. C'est donc une question de hasard. Mais en même temps, il y a des gens sur le circuit musical, dont j'ai souvent croisé la route, c'est presque une petite famille. Les gens qui font la même chose ont tendance à se rapprocher les uns des autres.
As-tu besoin de te retrouver chez toi, au calme, pour écrire, ou es-tu le genre de compositeur capable d'écrire une chanson sur un coin de nappe ?
Teitur : Au fil du temps, j'ai appris à écrire quelque soit l'endroit où je me trouve. Maintenant, j'écris tout le temps. C'est devenu une partie de ma vie. Mais je me force à une certaine rigueur : je commence généralement le matin à l'hôtel, et je continue un peu avant d'aller me coucher. C'est ainsi que viennent mes meilleures idées.
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