Evénement international majeur, la Biennale Internationale d'Art Contemporain
de Venise, a ouvert ses portes le 4 juin 2011 et la Sérénissime sera placée sous son égide pendant près de six mois.
Le commissariat général de cette 54ème édition a été confiée, par son président, Paolo Baratta, à la zurichoise Bice Curiger historienne et critique d'art qui a choisi pour titre "ILLUMInations" qui renvoie au thème de la lumière.
Elle s'en explique en rappelant qu'il s'agit d'un thème classique en art et en précisant vouloir "se concentrer sur l’art plutôt que sur une quelconque théorisation du monde, d’après laquelle je sélectionnerais des œuvres et que "le titre met également en lumière les idées de perception et de pensées, ainsi que le concept des nations".
Cette année, la Biennale bat encore des records d'affluence en recevant 89 participations nationales dans les Jardins et l'Arsenale avec la particularité novatrice d'une présence affirmée des artistes de pays musulmans. Après
l'accueil en 2009 du pavillon des Emirats Arabes Unis, plus d'une vingtaine d'artistes arabes sont présents à l'exposition "The future of a promise" qui se tient dans les anciens entrepôts de sel jouxtant la Punta della Dogana.
Cette dernière fait partie des 37 expositions dites "collatérales" qui investissent différents lieux, souvent prestigieux, de la cité des Doges. Ainsi une centaine d'artistes aisiatiques élisent domicile à l'Abbaye San Gregorio près de l'Eglise de la Salute au sein de l'exposition "Future pass".
Pour son pré carré que constituent le Pavillon Italia et l'Arsenale, Bice Curiger
s'enorgueillit de la présentation de toiles du Tintoret et d'oeuvres d'artistes émergents qui ont moins de 30 ans ce qui attesterait de la prise de risques de cette édition.
Elle est néanmoins critiquée notamment pour ne pas avoir exploité l'intégralité de l'espace en enfilade de la Corderie. Mais la critique est un exercice de rigueur et, si Daniel Birnbaum, commissaire de la biennale précédente, partait du principe que "la biennale n'est pas là pour être aimée mais pour être discutée", Bice Curiger, qui souhaite que l'on se rappelle de sa biennale "comme d’un événement splendide, généreux, éclairant", répond de manière plus subjective : "On ne peut jamais contenter tout le monde, mais je me fiche d’être critiquée".
Si Bice Curiger indique que l'art contemporain "montre souvent son intérêt pour la vie et cherche à être proche de son dynamisme", force est de constater que cette biennale creuse dans le sillon noir des précédentes. Certes le monde n'est Disneyland mais les artistes contemporains se complaisent dans la reconstitution morbide et sans transcendance de certaines réalités.
La peinture et la sculpture sont, et semble-t-il définitivement, les parents pauvres de l'art contemporain. Si l'art photographique semble se tasser, les arts numériques continuent à gagner du terrain face aux installations plasticiennes qui se maintiennent.
Enfin, certaines tendances se dessinent comme l'utilisation récurrente de tubulures, tels les tubes d'échafaudage de Christian Boltanski choisi pour représenter la France avec son installation "Chance", la déambulation labyrinthique ou le débarras-détritus.
La tendance "accumulation" des nouveaux réalistes trouve encore un écho comme par exemple dans l'installation "Crystal of Resistance" du suisse Thomas Hirschhorn pour symboliser la société de consommation.
De même, la mouvance manga-koons-murakami a encore de beaux jours devant elle du côté du soleil levant.
Par ailleurs, les lauréats en sont d'ores et déjà connus.
Le président de la Biennale et Bice Curigeront choisi pour les Lions d'Or pour leur carrière l'autrichien Franz West, né en 1947, connus pour ses oeuvres tridimensionnelles, et à l'américaine Elaine Sturtevant, née en 1930, inspiratrice du mouvement appropriationniste.
Pour les autres distinctions, le jury était composé de l'artiste, musicien et écrivain Hassan Khan, qui en assure la présidence, la critique d'art chinoise Carol Yinghua Lu, l'Italienne Letizia Ragaglia, directrice du Museion de Bolzano, Christine Macel conservatrice en chef du patrimoine et directrice du service Création contemporaine et Prospective au Musée national d’art moderne du Centre Pompidou et le réalisateur américain John Waters.
Sont donc consacrés :
Lion d'Or pour la meilleure participation nationale : le pavillon allemand réalisé par Aino Laberenz, la veuve de l'artiste polyvalent et pluridisciplinaire Christoph Schlingensief sélectionné mais prédécédé à la conception du pavillon.
Le pavillon a été aménagé comme une reconstitution du décor de l'église dans laquelle s'est déroulée sa performance "L'Eglise de la peur".
Performance par laquelle il procédait sous forme d'un oratorio de la souffrance à la théâtralistaion de la maladie qui l'a emporté en 2010 et présente également des films qu'il a réalisés.
Lion d'Or pour le meilleur artiste pour le plasticien américain Christian Marclay pour une installation vidéo
Lion d'Argent pour l'artiste prometteur au plasticien anglais Haroon Mirza pour ses installations sonores et "électricienne"
Mentions spéciales pour le pavillon lithuanien présentant l'exposition "Behind the White Curtain" de Darius Mikšys présentant sur demande des oeuvres diverses tirées d'archives et la plasticienne et vidéaste suédoise Klara Lidén.
Cette dernière présente un assortiment de matériel urbain destiné à la collecte des ordures soit, comme l'annonce le titre de l'oeuvre "Trashcan", une série de poubelles.
Cette oeuvre a été distinguée par le jury pour sa "capacité de faire entrer la logique de l'intervention du public dans un espace muséal".
Comme dirait l'humoriste Gustave Parking : "J'vous laisse réfléchir là-dessus". |