Ed Harcourt est un crooner. Cela signifie qu'il croone (de l'anglais to croon : murmurer). Et que murmure-t-il ? Des chansons, douces, souvent énamourées, à l'oreille des belles (traditionnellement) ou des beaux (post-modernement) qui veulent bien se laisser crooner fleurette.
Le père Harcourt était militaire. Mais Ed aura préféré une voie plus romantique. Et dès l'âge de neuf ans, apprenant le piano, il s'est préparé à crooner. Premier album à l'âge de vingt-quatre ans (Here Be Monsters, 2001), hype passagère, grand espoir de l'avenir musical, suivi de plusieurs autres et de nombreuses collaborations (dont le grandiose Arkhangelsk d'Eric Truffaz, où plusieurs pistes s'étaient faites écrin de choix pour sa voix, en mars 2007) jusqu'à ce Lustre, cinquième opus, à côté duquel on s'est arrangé pour passer l'été dernier.
Pourtant, il y croone bellement, Ed. On y retrouve ces sortes de feulements fragiles et sensuels qui seraient la marque de fabrique de sa voix au timbre délicieux. Il y croone avec modernité, plus proche certainement d'un Jay Jay Johanson que d'un Frank Sinatra. Mais il ne fait pas que crooner, Ed et il y a dans Lustre quelque chose de la folie du premier Hawksley Workman (écoutez "Heart of a Wolf", au titre déjà significatif). Car Ed a toujours aimé multiplier les directions, les intentions, avec un sens de l'ambiance, de l'arrangement. Pourtant ce Lustre n'est pas encore l'ars magna tant attendu, l'hymne du couronnement du roi Harcourt aux beautés indiscutables, à la force renversante. Très bien mais pas encore top. Croon on, Ed, croon on. |