Musique sep Théâtre sep Expos sep Cinéma sep Lecture sep Bien Vivre
  Galerie Photos sep Nos Podcasts sep Twitch
 
recherche
recherche
Activer la recherche avancée
Accueil
 
puce puce
puce Raphaël Granier de Cassagnac
Interview  (Par mail)  juillet 2011

Pour des raisons de calendriers incompatibles, vacances d'été oblige, c'est par mail que nous avons proposé une interview à Raphaël Granier de Cassagnac, une façon d'étendre un peu plus le plaisir de la lecture de son premier roman Eternity Incorporated.

Peux-tu nous faire un retour sur ton parcours littéraire et tes goûts ? Qu’as-tu écrit, publié ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Mes goûts sont plutôt éclectiques et j’aimerais bien que mon parcours le soit aussi. J’ai commencé par écrire des nouvelles, plutôt de l’heroic fantasy, puis du jeu de rôle. Plus récemment, j’ai dirigé deux ouvrages littéraires et graphiques qui décrivent des cités utopiques et imaginaires : Abyme et Kadath. Avant la sortie du roman, le dernier truc que j’ai publié est une nouvelle dans l’excellent magazine Usbek et Rica.

Peux-tu nous raconter la genèse de ce premier roman ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Oh oui ! Tout est parti d’une nouvelle assez planante, une vision lointaine de l’avenir de l’espèce humaine. Deux amis chers m’ayant fait remarquer que l’univers que j’y esquissais méritait plus d’attention, j’ai alors démarré le roman, en prenant la nouvelle à contre-pied : ce que j’y décrivais commence par disparaître. Après une petite dizaine de chapitres, j’ai ressenti le besoin d’écrire la trame jusqu’au bout. J’ai alors compris, assez tard et sans le voir venir, que la nouvelle viendrait conclure le roman. C’était assez grisant. Troublant aussi, car l’idée de la nouvelle originelle m’était venue une nuit, dans un train, en refermant Les Particules élémentaires de Houellebecq. L’épilogue, génial, est en rupture totale avec le reste : il raconte l’avenir de l’humanité qui se fait paisiblement remplacer par sa propre création, des êtres biologiques supérieurs. J’ai tout de suite imaginé ma version de cet avenir lointain. Quelques années plus tard, mon bouquin se retrouve par hasard avec une structure similaire.

La musique est très présente dans le roman, elle est même le point de ralliement central du groupe contestataire de la bulle. Est-ce le rôle que la musique doit avoir dans le monde ? Et est-ce le cas dans notre bulle ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Notre bulle… C’était le titre du roman avant qu’on convienne d’en changer avec l’éditeur. Pour moi, je ne parle de rien d’autre que du monde qui est le nôtre. Donc oui ! La musique, les arts en général, sont évidemment des moyens d’exprimer une forme de contestation, de se rassembler autour d’idées révolutionnaires. Mais dans le roman, c’est d’abord une façon d’échapper au quotidien, à l’ordre lénifiant, d’oublier son quotidien. L’art a cela de magique : il peut être aussi léger que profond.

Pour quelle raison avoir préféré la musique électronique et une ambiance proche des free parties ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Bonne question, d’autant qu’en musique aussi mes goûts sont assez éclectiques, parfois inavouables. Du point de vue de l’intrigue, l’ambiance des soirées "openground" devait être celle d’une free party, libertaire, débridée : aujourd’hui, c’est plutôt la musique électronique qui renvoie cette image. Du point de vue de la cohérence de l’univers aussi, ça ne pouvait être que de la musique électronique, ou à la rigueur sommaire : il n’y a pas vraiment d’instruments dans la bulle, que des ordinateurs. Mais je ne vais pas te mentir, c’est plutôt l’inverse qui s’est passé : l’openground que je décris au tout début du roman est une soirée que j’ai vécue à New-York, dans un entrepôt entre les ponts de Brooklyn et de Manhattan. C’est elle qui m’a inspirée, je ne l’ai pas vraiment choisie.

Il y a dans ton roman un portrait assez critique de l’organisation de la société humaine, où même si le schéma entre l’organisation antébulle et dans la bulle sont très différents (je pense au fait d’élire un citoyen lambda responsable d’un domaine technique), il semble que sans un régent (ici, le Processeur) l’humanité soit vouée au chaos sociétal, à l'indécision et la paralysie. Est-ce comme cela que tu perçois l’organisation humaine ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Oh putain… Non, je ne crois pas. Même si le bouquin est assez sombre sur cet aspect, je ne suis pas fataliste : je pense qu’on a encore une chance de s’en sortir. En revanche, je crois que l’organisation d’aujourd’hui est extrêmement perfectible. Elle est porteuse d’immenses progrès, de libertés nouvelles (récemment, le mariage homosexuel par exemple), mais elle engendre des inégalités énormes, dirigées par des élites surpuissantes, politiques et de plus en plus commerciales. C’est pour ça que j’aime bien l’idée de stochocratie que tu rappelles. Il ne s’agit pas d’élection, mais d’un tirage au sort de ceux qui dirigent la bulle. Tu prends quelqu’un au hasard et tu lui dis : pendant quelques années, c’est toi qui coordonne tel ou tel ministère, avec une équipe compétente sous tes ordres. Résultat : pas de calcul électoral et un sens accru des responsabilités. Nous pourrions avoir un gouvernement mondial sur ce modèle, avec peut-être juste un filtre de compétence minimum. Seul problème : quand le système de tirage au sort tombe en panne, les vieux démons de l’humanité ressortent !

Pourquoi avoir choisi de faire parler chaque protagoniste à la première personne ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Ce n’est pas ce que j’avais choisi au début. Sean était écrit à la première personne mais pour marquer une différence, une distance peut-être, les deux personnages féminins étaient à la troisième personne. J’ai tout passé à la première personne une fois le roman terminé. Je suis convaincu que c’est plus fort pour vivre la situation nouvelle que mes personnages ont à affronter : que faire de cette liberté infinie qui leur est soudain donnée ? Je veux que tu sois avec eux dans leur tête, au plus près, qu’ils te racontent tout, sans tabou.

Peux-tu nous en dire plus sur tes personnages ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Ce qui les distingue, c’est leur réaction face à leur liberté nouvelle et impromptue. Sean s’en saisit, s’éclate, en profite à mort. Gina ne la supporte pas, elle veut rétablir l’ordre dans lequel elle vivait confortablement, avec – il est vrai – pas mal de privilèges. Ange est sans doute la plus ambiguë, elle est paumée face aux opportunités, et en conçoit la façon la plus originale d’en profiter : elle part ! Après, je me rends compte a posteriori qu’ils correspondent à des facettes de ma vie : Sean à mes nuits, Gina à mes jours, Ange à mes voyages.

Il y a un personnage très absent tout au long du roman, le "peuple". Pour quelle raison la population de la bulle n’est pas plus présente dans ton roman ? Le peuple ne semble pas céder à la panique attendue par le conseil qui craint ses réactions, ni se rebeller contre quoi que ce soit.

Raphaël Granier de Cassagnac : Bien vu ! Il est évoqué, ici ou là, par exemple dans le chapitre "openground" mais ça reste très discret. Je préfère centrer la narration sur mes trois personnages et sur leurs proches. Chaque récit est assez intimiste. Au final, on est toujours tout seul face aux questions fondamentales, non ?

Comment as-tu rencontré ton éditeur ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Mnémos ? Dans une cave du quartier latin, il y a très longtemps.

Comment as-tu appréhendé son rôle de conseil tout au long du processus ?

Raphaël Granier de Cassagnac : On se connaît donc depuis longtemps. Il savait que j’avais un projet de roman sur le feu, a voulu y jeter un œil en cours de rédaction, mais non, je voulais rester indépendant et finir le roman avant tout, en solitaire. Une fois terminé, je l’ai envoyé à plusieurs maisons, j’ai eu des retours variés mais au final, c’est lui qui a signé.

Sur quoi ont porté ses remarques et directions, s’il y en a eu ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Rien sur l’intrigue et la construction, qui sont là depuis le début. C’est en discutant ensemble qu’est venue l’idée de tout passer à la première personne, tout en approfondissant les personnages féminins. Quelques remarques sur le style, en grande partie acceptées. Et surtout : le changement de titre, argument de vente pour lequel je lui fais confiance. Il m’a dit que Notre Bulle ne se vendrait pas, je lui ai dit Eternity Incorporated, et c’était parti !

La SF n’est pas un genre "grand public, peux-tu nous citer quelques uns de tes classiques ? Peux-tu nous conseiller aussi quelques ouvrages français ou francophones ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Alors ça, c’est la question piège. Je suis très réticent à l’idée de "genre". La science-fiction souffre depuis toujours de son compartimentage en librairie (moins au cinéma), et de l’amalgame entre des romans bourrés d’empires extra-terrestres et de vaisseaux spatiaux superluminiques, et des œuvres proches qui nous racontent juste ce que pourrait être le monde d’après-demain. Au sens large, la SF est l’héritière de Barjavel, de Lovecraft, de Kafka, de Poe, de Verne, de Vian… Ce sont eux mes classiques. Et franchement, je serais bien en mal de te conseiller : je lis en fait très peu de SF…

As-tu d’autre(s) projet(s) de livre(s) sur le(s)quel(s) tu travailles ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Ouais. Si Eternity plaît, j’ai dans un coin de processeur des éléments pour une "prequel" – comment en sommes-nous arrivés là ? – pour une suite et pour une… échappée ! Et avant de signer pour Eternity, je bossais sur un roman sur les débuts du cinéma. Tout ça étant à un état d’avancement ridicule bien sûr, le temps manque !

Je n'ai jamais lu de livre de SF avec autant de scènes de sexe, comment cela est-il passé auprès de ton éditeur et de tes "lecteurs tests" ? Quelqu'un l'a-t-il remarqué ou suis-je le seul ?

Raphaël Granier de Cassagnac : Tu n’es pas le seul : on est deux ! Si j’ai adoré les écrire et les faire lire aux très proches, je n’étais pas du tout sûr que ça passerait… en particulier auprès des lectrices quand je prends le point de vue féminin. Bien. À ma grande surprise, ça passe, et à l’unanimité pour l’instant. Faut croire qu’on aime ça. Quant à l’éditeur, je ne sais pas si je dois le dire, mais nos discussions m’ont amené à rajouter une scène de cul en fait (celle de Gina).

 
<

A lire sur Froggy's Delight :
La chronique de "Eternity Incorporated" du même auteur
La chronique de "Thinking Eternity" du même auteur

En savoir plus :
Le Facebook de Raphaël Granier de Cassagnac
Le site officiel des Editions Mnémos


Monsieur Var         
deco
Nouveau Actualités Voir aussi Contact
deco
decodeco
• A lire aussi sur Froggy's Delight :


# 24 mars 2024 : Enfin le printemps !

Le printemps, les giboulées de mars, les balades au soleil ... la vie presque parfaite s'il n'y avait pas tant de méchants qui font la guerre. Pour se détendre, cultivons nous !. Ajoutons à cela nos chaines Youtube et Twitch et la semaine sera bien remplie.

Du côté de la musique:

"Dans ta direction" de Camille Benatre
"Elevator angels" de CocoRosie
"Belluaires" de Ecr.Linf
"Queenside Castle" de Iamverydumb
"Five to the floor" de Jean Marc Millière / Sonic Winter
"Invincible shield" de Judas Priest
"All is dust" de Karkara
"Jeu" de Louise Jallu
"Berg, Brahms, Schumann, Poulenc" de Michel Portal & Michel Dalberto
quelques clips avec Bad Juice, Watertank, Intrusive Thoughts, The Darts, Mélys

et toujours :
"Almost dead" de Chester Remington
"Nairi" de Claude Tchamitchian Trio
"Dragging bodies to the fall" de Junon
"Atmosphérique" de Les Diggers
quelques clips avec Nicolas Jules, Ravage Club, Nouriture, Les Tambours du Bronx, Heeka
"Motan" de Tangomotan
"Sekoya" de Tara
"Rita Graham partie 3, Notoriété", 24eme épisode de notre podcast Le Morceau Caché

Au théâtre

les nouveautés :

"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
"Music hall Colette" au Théâtre Tristan Bernard
"Pauline & Carton" au Théâtre La Scala
"Rebota rebota y en tu cara explota" au Théâtre de la Bastille

"Une vie" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Le papier peint jaune" au Théâtre de La Reine Blanche

et toujours :
"Lichen" au Théâtre de Belleville
"Cavalières" au Théâtre de la Colline
"Painkiller" au Théâtre de la Colline
"Les bonnes" au théâtre 14

Du cinéma avec :

"L'innondation" de Igor Miniaev
"Laissez-moi" de Maxime Rappaz
"Le jeu de la Reine" de Karim Ainouz

"El Bola" de Achero Manas qui ressort en salle

"Blue giant" de Yuzuru Tachikawa
"Alice (1988)" de Jan Svankmajer
et toujours :
 "Universal Theory" de Timm Kroger
"Elaha" de Milena Aboyan

Lecture avec :

"Au nord de la frontière" de R.J. Ellory
"Anna 0" de Matthew Blake
"La sainte paix" de André Marois
"Récifs" de Romesh Gunesekera

et toujours :
"L'été d'avant" de Lisa Gardner
"Mirror bay" de Catriona Ward
"Le masque de Dimitrios" de Eric Ambler
"La vie précieuse" de Yrsa Daley-Ward
"Le bureau des prémonitions" de Sam Knight
"Histoire politique de l'antisémitsme en France" Sous la direction d'Alexandre Bande, Pierre-Jerome Biscarat et Rudy Reichstadt
"Disparue à cette adresse" de Linwood Barclay
"Metropolis" de Ben Wilson

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
twitch.com/froggysdelight | www.tasteofindie.com   bleu rouge vert métal
 
© froggy's delight 2008
Recherche Avancée Fermer la fenêtre
Rechercher
par mots clés :
Titres  Chroniques
  0 résultat(s) trouvé(s)

Album=Concert=Interview=Oldies but Goodies= Livre=Dossier=Spectacle=Film=