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Nicholas Shakespeare  (Editions Grasset)  août 2011

Qui n’a rêvé d’un grand-oncle inconnu qui à sa mort ferait de nous son légataire universel ? Une fortune arrivée de nulle part, et une histoire familiale à découvrir… L’aventure et l’argent qui tombent sur notre parcours alors que l’on n’attend rien. Imaginez maintenant un héritage de plusieurs millions de livres sterling venant d’un parfait inconnu. Fortune est faite sur un étrange coup du sort.

Voici l’intrigue de Héritage. Andy Larkham, employé d’une maison d’édition de livres de développement personnel, voit ses factures s’accumuler sans possibilité de les honorer, ses ambitions littéraires étouffées par l’esprit mercantile et cynique de son employeur, et pour couronner le tout, rate l’enterrement d’un professeur qu’il vénérait mais avec lequel il n’avait pas maintenu le contact… Sa vie semble bien mal engagée.

C’est pourtant cette dernière erreur qui va tout faire basculer. Pour les funérailles de son professeur, Andy se trompe de chapelle et participe à une cérémonie dont il est l’un des seuls assistants. Ils sont trois exactement, juste assez pour qu’une fois entré on ne puisse plus quitter la salle sans attirer l’attention et le ressentiment de la maigre assemblée. Son erreur réalisée, Andy n’ose se lever pour se rendre au lieu voulu. Une incapacité de prendre en main les choses qui va décider de tout. Car le défunt qui n’attirait vraisemblablement pas la sympathie était un de ces riches marginaux au testament excentrique. Son héritage se partagerait entre les personnes présentes à sa messe d’enterrement. Exception faite du notaire, témoin de la juste application des dernières volontés du mort, et du prêtre qui récite la messe ils sont deux : une vieille dame visiblement acariâtre et le narrateur. Ce dernier est pris de scrupules : peut-il accepter une fortune qu’il ne mérite pas ? Qu’est-ce que respecter les dernières volontés d’une personne dont il ne sait rien ? D’autant que surgit une nouvelle protagoniste : une fille déshéritée par un père qu’elle détestait. Et voici Andy Larkham embarqué dans une aventure qui n’est pas la sienne, défenseur de ce Christopher Madigan qu’il ne connaissait pas face à une fille haineuse. Un pacte moral qui se noue au-delà d’un pacte financier et par-delà la tombe. Et le sentiment étrange d’une familiarité avec cet être mystérieux. Un ami d’Andy, intrigué, se met en quête de son histoire, mais elle ne se dévoile que par bribes. Andy doit alors prendre les choses en main pour remonter le fil des évènements et assumer un héritage qui ne sera pas simplement financier…

La plume de Nicholas Shakespeare est agréable. On se laisse prendre par l’histoire avec plaisir, même si par endroits des invraisemblances peuvent chagriner (la compagne d’Andy, top modèle décrite comme vénale alors qu’elle reste plusieurs années avec un modeste employé de maison d‘édition avant de le quitter). Le mystère autour de Christopher Madigan est bien gardé… Mais une fois un témoin de sa vie trouvée, la première intrigue est complètement laissée de côté pour que le récit ne se centre plus que sur la vie de Madigan. Oubliant alors qu’il s’agit d’un témoignage, une foule de détails sur l’enfance et la vie de Madigan nous sont donnés qu’un tiers ne pourrait connaître avec une telle précision. Les deux histoires ont alors du mal à cohabiter et le retour au présent semble artificiel. Dommage, le plaisir de lecture en sort affecté.

 

Philippe Gauthier         
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