Seul en scène écrit par Sandie Masson et Fred Nony, interprété par Sandie Masson dans une mise en scène de Agnès Boury.
Le titre, "Annabelle M., une histoire sans faim", et l'affiche, représentant une fourchette cadenassée, sont sans équivoque.
Sandie Masson a écrit l'histoire d'une jeune fille atteinte d'un trouble majeur du comportement alimentaire, caractérisé par l'alternance de crises anorectiques et boulimiques, lié à un état d'angoisse entre des impératifs vitaux, ou considérés comme tels, incompatibles. Mais également, en l'espèce, à un besoin d'amour et d'écoute qui n'est pas satisfait pas l'amour épisodique du père éloigné du foyer par son métier, l'amour sourd et aveugle de la mère et la désinvolture du fiancé.
Une histoire au dénouement heureux, au point où la jeune fille devenue une jeune femme "rescapée", sauvée par la parole et l'écoute, celle d'un vieux psychanalyste dont elle sera la dernière patiente, se lance dans la restauration.
Sandie Masson, avec la collaboration à l'écriture de Fred Nony, raconte de manière sensible la descente en enfer de ce fêtu de paille en perdition dans le triangle des Bermudes délimité par le miroir, la balance et le frigo.
Inscrit par le procédé de l'autofiction dans le registre du docu-témoignage avec le procédé du flash-back théâtralisé, pendant sur scène de la reconstitution dans le magazine de société télévisuel, cet opus, qui ne prétend pas, en raison de l'unicité de chaque vécu, au petit vademecum épiphanique, s'inscrit dans l'émotion que leurs auteurs, également comédiens avisés, ont tempéré par des micro-scènes rétrospectives teintées d'un humour parfois noir.
Sur ce point, si l'idée de l'intervention d'un détective à la Marlowe chargé d'enquêter sur la disparition progressive du corps de l'adolescente est bienvenue, en revanche, tel n'est pas le cas quant au parallèle établi entre le comportement obsessionnel autodestructeur et la situation des internés des camps d'extermination des états totalitaires.
Dans un décor - incontournable - de cuisine et dans une mise en scène judicieuse de Anne Boury, qui impulse une synergie nerveuse à l'enchainement des scènes, Sandie Masson porte évidemment, avec une énergie vitale éloquente ce texte aux résonances intimes avec beaucoup de retenue et d'empathie. |