Réalisé
par Julie Delpy. France. Drame. Durée : 1h53 (Sortie le 5 octobre 2011) Avec Aure Atika, Bernadette Lafont, Noémie Lvosky, Emmanuelle Riva, Vincent Lacoste, Marc Ruchmann, Sophie Quinton et Denis Ménochet.
Décidément, les années 70 sont à la mode dans le cinéma français. Bonne ou mauvaise nouvelle pour ceux qui les ont vécues, désormais elles sont traitées au cinéma comme des années "historiques".
Enfin les quadra-quinqua vont comprendre les réticences de leurs parents devant la vision cinématographique des années 1940, les a-prioris et les approximations qu’ils reprochaient à toutes ses reconstitutions ripolinées avec en fond sonore "Mon Amant de Saint-Jean".
Après "Potiche” de François Ozon, voilà "Le Skylab" de Julie Delpy pour replonger dans la nostalgie de la fin des "Trente Glorieuses" et de l’après-68. À la différence d’Ozon qui passait par la caricature sociale pour faire revivre des années infiniment politiques, Julie Delpy s’y colle en animant une photo d’un repas de famille où étaient réunis tous ses proches.
Bonne idée de départ que cette réunion de famille, cette partie de campagne bordélique dans laquelle se mêlent parigots et provinciaux, prolos et professions libérales, partisans de l’OAS et amateurs de Léo Ferré, simples d’esprits et esprits pervers, avec en arrière-fond historique moins deux ans au compte à rebours des années Mitterrand.
Bref toute la société française assiste à ce méchoui où les haricots ont hélas été remplacés par du couscous. Comme chez Claude Sautet, il pleut de temps à autre et les parties de foot permettent de mélanger ceux que la vie ou l’idéologie oppose. Comme chez Pascal Thomas, les petits sont sur les traces des grands question sexualité. Julie Delpy a même trouvé son Bernard Ménez en la personne de Vincent Lacoste, déjà bien ménézisant dans "Les Beaux Gosses".
On mettra à son crédit une belle habileté à diriger une copieuse brochette d’acteurs. Les engueulades entre grandes gueules "racistes" et beaux esprits de gauche autour d’une table pleine de bouteilles sont impeccables. Ici, pas de numéros d’acteurs s’écoutant jouer comme dans "Les Petits Mouchoirs", mais une proposition d’ambiance familiale parfaitement crédible et sincère.
On lui saura gré d’avoir recycler en grands-mères "La Fiancée du pirate" et "Thérèse Desqueyroux", de mieux nous faire connaître Denis Ménochet dont on n’a sans doute pas fini d’entendre parler - pour le meilleur et aussi pour le pire -, de transformer papa Delpy en tonton à l’Ouest mais qui a compris que l’hymne de ces années charnières était "La Balade des gens heureux".
Au bout du compte, cette cérémonie familiale survitaminée n’est pas désagréable et rappellera à beaucoup le temps des tontons et des tatas et celui des éternels déjeuners du dimanche avec la table des enfants rieurs et la table des parents pleine de sous-entendus, de colères soudaines suivies d’apaisements lourdement silencieux.
Seul gros bémol, outre un long prologue-épilogue inutile avec Karin Viard incarnant la Julie Delpy passablement agaçante d’aujourd’hui, une tendance certaine à donner raison aux babas pas encore bobos sur les autres, forcément gros cons de droite oscillant entre frustration et déviance sexuelles.
Sauf à soigner le public supposé client de ce genre de film, il y a là quelque chose de contre-productif, un sectarisme bien-pensant qui se refuse à comprendre l’autre, un presque mépris qui va à l’encontre de la bonne ambiance du film.
Cela dit, "Le Skylab" est un foutoir, un drôle de foutoir à voir. On y aperçoit un tonton sosie de Joe Dassin, c’est vous dire ! |