Monologue dramatique d'après l'oeuvre éponyme de Guy de Maupassant interprété par Jérémie Le Louët.
Cataloguée comme œuvre fantastique lors de sa première édition, cette nouvelle de Guy de Maupassant est considérée aujourd'hui comme autobiographique et en quelque sorte prémonitoire, l'auteur du horla, ayant sombré lui-même dans le délire à la fin de sa vie.
Description clinique d'une folie manifeste ou réflexion philosophique sur la dualité de l'être, "Le Horla" fait partie de ces œuvres universelles qu'on peut lire mille fois de mille manières différentes tant elle peut être sujet à interprétations et ouvre des pistes de réflexions infinies et variées.
Le horla est-il le protagoniste, sa conscience, ou bien l'autre, l'étranger qui nous veut du mal, un être supérieur venu du Brésil ou d'ailleurs pour nous aliéner ? Est-ce la muse littéraire derrière l'auteur, lui-même derrière son personnage ?
Jérémie Le Louët propose sa vision personnelle de l'œuvre de Maupassant, et prend le parti de faire planer peu de doute quant à l'état mental de son protagoniste, se dirigeant lui-même dans des mises en abime théâtrale en cascade puisqu'il est le metteur en scène derrière le comédien derrière le personnage... derrière l'auteur fou sans encore le savoir ?
Sur un plateau quasiment nu, sobre, noir avec quelques touches de rouge, la mise en scène, très picturale s'appuie sur un travail abouti avec Jean-Luc Chanonat, à l'éclairage, qui permet une utilisation optimale des possibilités offertes par la lumière. Tour à tour inquiétante, dure, étrange, rafraichissante, elle met en relief l'état intérieur changeant du protagoniste et crée une atmosphère dense qui semblerait prendre vie à certains moments où se découpe sur le fond de scène une ombre diffuse.
En travaillant sur les variations d'intensités de son et les changements rythmiques, Jérémie Le Louët rend aussi hommage à la prose de Maupassant, qu'on (re)découvre ciselée, mélodique, écrit telle une belle partition qui transcrirait le chant intérieur, très intime, du personnage.
Peu d'auteur peuvent de targuer d'avoir une prose qui résiste à un tel exercice, mais peu de comédiens peuvent se vanter de rendre avec autant de talent les obsessions, angoisses, et questionnements métaphysiques d'un texte, dont certains auraient sans doute apprécié d'en goûter un peu plus l'ambivalence, atténuée par le parti pris du metteur en scène et du comédien. |