Entre cette moustache souriante qu’est Jean Rochefort et les chevaux, une longue histoire d’amour façon "je t’aime - moi non plus". Sa dernière expérience avec l’équidé s’est révélé un désastre en forme de disques bloqués et d’interdiction de monter… Mais sa passion reste intacte, depuis un bail que la convenance me refuse à vous révéler (oui, parce que ça lui fait un certain âge au bonhomme).
Accompagné d’Edwart Vignot, un autre passionné de chevaux, historien de l’art de son état, ils composent Le Louvre à Cheval, une sorte d’anthologie du cheval dans les arts, et à travers les arts, le cheval dans l’histoire, dans les petites histoires, des anecdotes aux grandes batailles. Oui, parce que, quoiqu’on en pense, les chevaux sont le symbole d’une puissance, et pas seulement parce qu’on domine les piétons en étant perché sur leur croupe. C’est aussi parce que les rois, les seigneurs, les puissants ont conquis le monde à cheval (même maintenant, ne nomme-t-on pas les puissances automobiles à grands coups de chevaux dans les moteurs ?)
Ensemble, Jean Rochefort et Edwart Vignot parcourent les kilomètres de Louvre pour nous, créant une collection de chevaux, dans un bon gros livre d’images commentées, avec la reluire dorée (ça fait super classe dans une bibliothèque et même quand ça traine sur la table ou dans le canapé, un volume avec une tranche en or ne soulève pas de remarque désagréable sur ma façon de ranger les livres).
Chaque œuvre est présentée sur une double page, une belle photo couleur à droite. Sur la page de gauche, un titre, un auteur, un commentaire, et une explication. Simple et à la fois très documenté et efficace. Comme quoi, pas la peine d’en faire des caisses pour être agréable.
Je n’irai pas jusqu’à dire que le livre est un cours d’équitation, parce que le seul que j’ai eu ressemblait à "appuie sur tes talons", "tire pas si fort, ça va lui faire mal", "détends-toi", "je t’avais bien dit d’appuyer sur les talons", mon cheval était une petite jument espiègle appelée Java qui faisait exprès de s’attarder sur le bord pour brouter de l’herbe, se laisser distancer par le groupe, et le rattraper en piquant un petit galop, je suis sûre qu’elle en rigole encore avec ses copines. Mais elle s’est excusée quand j’ai sauté et que je lui ai filé un coup de genou en remontant sur elle.
Le livre ressemble à une conversation que Jean Rochefort pourrait nous faire en visitant le Louvre avec lui. Il nous montrerait cette peinture de Poussin en disant "voyez comme le cheval tente de s’extirper du lit de la rivière, le genou antérieur gauche touche le sol, ce qui pourrait entrainer une boiterie, synonyme à l’époque d’un futur improbable". Edwart Vignot ajouterait "Poussin élabore ses croquis avec une économie de moyen qui pousse l’artiste vers l’essentiel". Et de nous entrainer vers une sculpture, une peinture, un dessin, un lavis, une aquarelle, une tapisserie, un marbre, un bronze, un ivoire… de Géricault aux anonymes… pour montrer, décrire, expliquer, avec une passion qui transparait dans chaque souffle.
220 pages pour 220 œuvres, entrecoupées d’anecdotes, de légendes et d’histoires, l’ouvrage révèle à quel point le cheval est étroitement lié à l’homme, qu’il l’aide ou qu’il le sublime. Jean Rochefort et Edwart Vignot forment une sacré belle paire de passionnés, entrainant quiconque plonge un œil dans le livre à un beau moment dans les allées du musée labyrinthique le plus connu de France et d’ailleurs. A offrir et à s’offrir. |