"Par l’auteur de Autobiographie d’une Courgette". Mouais… Ne pas se fier aux apparences, c’est bien connu. Gilles Paris n’en est pas à son premier roman, mais il n’est pas folichon non plus.
"Ce matin, j’ai trouvé papa dans le lave-vaisselle". Ce sont les premières lignes du livre… C’est l’histoire de Simon, 9 ans, qui vit avec son petit papounet un tantinet dépressif (le papounet, pas l’enfant). Il faut dire que maman est partie travailler au pays des kangourous (l’Australie pour ne pas la nommer, avec l’importation, on ne sait plus trop dans quel pays vit quel animal !).
Le roman est un long monologue intérieur de Simon, qui s’interroge sur cette étrange maladie qu’aurait son papa. En même temps, si on entendait ce qu’il entend, on se ferait aussi de drôles d’idées. Simon n’a que des bribes de diagnostic et du coup, à ne pas savoir, il a peur de perdre son père (déjà qu’il se disputait souvent avec maman…).
La maman montre un semblant de présence pendant des orgies de dégustation de yaourt (c’est pour eux qu’elle travaille). Le papa est un triste légume, incapable de communiquer (bon d’accord, il est dépressif). La grand-mère est une super-mamie ultra-protectrice, gagatisant un peu devant Simon.
Mais à 9 ans, les enfants ne comprennent-ils pas un peu plus de choses que ce Simon ? Parce qu’il a parfois des expressions d’un enfant de 6 ans (mature !). Parce que Mamie gagatise ? Ou parce que l’auteur s’est gourré de nombre ? (Facile de confondre un 6 et un 9, la dyslexie aussi nous menace).
Heureusement, un peu de fantaisie s’amène au milieu du bouquin : une fillette aux yeux violets, présentée comme autiste et évanescente. Elle est en fait sortie tout droit de l’imagination de Simon qui lui pose les questions qu’il se pose (et y répond pas trop mal). Lily est l’espoir de Simon, elle le rassure, lui dit que tout ira bien (parce que personne ne lui dit à ce gosse, que ce n’est pas de sa faute, que ça va aller).
Si vous n’avez pas encore compris ces mots couverts, je me suis ennuyée à la lecture de ce livre. Il ressemble à un premier jet, plein d’incohérences, comme un puzzle où l'on aurait forcé l’entrée de certaines pièces par manque de patience. Et pourtant, ça commençait tellement bien, un enfant qui trouve son père dans le lave-vaisselle peut en rire ou trouver cela étrange. Mais ce Simon le prend avec tellement de gravité alors qu’il ne sait absolument pas la raison de la dépression.
J’oserai ajouter que les enfants ne sont pas débiles, ils comprennent beaucoup de choses à mots couverts, la dépression d’un proche, surtout d’un père (avec lequel ils vivraient seuls), un enfant la comprendrait, mais cela ne le rendrait ni plus mature, ni plus gaga, ni plus tragique. Il le prendrait pour un "problème d’adulte" et ferait le rapprochement avec le pire bobo caché.
Mais quand même, au risque de me contredire, Gilles Paris réussit avec beaucoup de pudeur à parler de la dépression dans une famille, sans éclat de voix et tout en nuances. Et placer cette maladie du siècle dans la tête d’un marmot, mettre les mots d’un enfant sur ce mal de vivre, c’est tout de même assez osé, voire pas trop mal réussi pour les fans (existe-il vraiment des fondus de dépression ? Ah oui, les téléfilms de France TV, et le sacro-saint french-cinéma-exception-culturelle…).
Si vous n’avez plus envie de paillettes, si vous préférez le champagne sans bulles, ou si vous êtes trop heureux, lisez Au pays des kangourous, vous aurez vous aussi envie de vous planquer dans le lave-vaisselle. |