Après Bertold Brecht ("Monsieur Brecht et le succès"), , Italo Calvino ("Monsieur Calvino et la promenade"), Karl Kraus ("Monsieur Kraus et la politique") et Paul Valéry ("Monsieur Valéry et la logique"), Gonçalo M. Tavares invite, par la voie de la patronymie, le poète suisse Robert Walser à regagner le clan des messieurs de son "O Bairro", quartier fictif qui tient tant du panthéon personnel à l'auteur qu'universel.
Et Monsieur Walter est content car il vient d'emménager dans sa petite maison toute neuve, construite aux fins fonds du plus broussailleux de la forêt, quasiment inaccessible au bout d'un chemin labyrinthique, tout en étant située à une distance raisonnable du village.
Et c'est dans cet isolement volontaire qu'il compte mener à bien ses "grands projets". Mais à peine a-t-il fait le tour du propriétaire, un plombier sonne à la porte, premier d'une succession d'intrus perturbant l'agencement de sa maison qui n'est pas simplement entendue au sens architectural du terme.
Sous la forme d'un conte absurde sans dénouement rationnel, un peu à la manière de Roland Dubillard - impossible de ne pas penser, avec la fuite du robinet à ses "Crabes" - que constitue l'opuscule "Monsieur Walser et la forêt", Gonçalo M. Tavares se penche sur la condition au monde, et dans le monde, du poète, le clair-voyant, dont la mission, selon une acception commune partagée par Robert Walser, consiste à "éveiller l’homme au monde".
En une petite cinquantaine de pages à l'acuité métaphorique, il explore ce que Robert Walser qualifiait lui-même de "détresse du lion", la quête impossible de l'indispensable liberté absolue nécessaire au poète dans un univers aliénant ou ressenti comme tel. |