"Dans mon verre de Jack flotte un iceberg, dans l'iceberg un yack lit du Ginsberg". Voilà comment débute ce nouvel album de BO. Sans compter que la chanson s'appelle "Je suis dieu", ce qui ajoute au titre de l'album, Schyzopolis, une bonne dose de folie supplémentaire.
Car folie et humour sont au rendez-vous aussi sûrement qu'une jouvencelle au concert de Justin Beaver (sic).
C'est que BO, derrière son air dandy, est sérieusement drôle, caustique et pince-sans-rire. Mais il connaît aussi la musique et ce qui aurait pu tristement ressembler à un album posthume de Carlos (le chanteur d'Oasis) est plutôt et heureusement dans la veine d'un Vian ou d'un Gainsbourg rieur (toutes proportions gardées), le tout dans une langue simple et au goût du jour. Point de prétention affichée par le garçon en ce sens rassurez vous, il a beau avoir de faux airs de Biolay, il n'en a pas la chanson (dommage pour lui, me direz-vous alors, au regard du succès de BB, indéniablement plus important que celui de BO).
BO est donc un chanteur et musicien avant tout qui aime jouer avec les mots, au sens premier du terme ce qui donne un album très ludique, souvent absurde et musicalement atypique et inclassable, pas plus du côté d'un autre poète pop qu'est l'inimitable Katherine que de celui d'artistes plus inspirés par la scène anglo-saxonne. C'est en fait un mélange qui forme un tout très original.
Pour autant, lorsque BO ne joue pas avec la langue française, le ton change un peu. Ainsi le duo avec Brisa Roché, "Chemical Kick", fait un peu office d'ovni. La barrière de la langue étant moins propice à calembour (en tout cas, l'auditeur y est moins préparé,) on se retrouve avec un morceau de pop anglaise élégant et savoureux. De la pop anglaise, on en trouve aussi sur "Hey", également chanté dans la langue de Neil Hannon (qui est irlandais certes, mais c'est pour ma transition).
Et en parlant de Neil Hannon (vous voyez la transition, là ?), on peut également évoquer The Divine Comedy sur les arrangements de "Hello", de "Hey" ou même (surtout) sur "Berlioz", qui pourrait quasiment passer pour un titre de Neil qui serait devenu français et un rien plus déjanté.
Déjantés, les textes le sont souvent. Inutile de vous gâcher la surprise de découvrir toutes les circonvolutions verbales (et BO en connait un rayon) des chansons mais il y a de quoi se passer et se repasser les chansons afin d'y découvrir à chaque fois quelques petites perles comme sur "No more mister nice guy", "Lou", chanson dans laquelle BO s'adresse à Lou Reed, "Saké" complètement surréaliste qui nous rappelle les élucubrations des québécois de Malajube (ou plus récemment de Karkwa).
"Monk et Billie" qui ferme l'album laisse entrevoir un autre BO, plus psychédélique, dans un hommage au jazz "à l'ancienne". Ca plane pour lui, et nous avec. BO va bien au-delà de sa façade d'amuseur public. C'est aussi un bon songwriter et son talent d'écriture nous offre un disque moins léger qu'il n'y parait, très abouti et rempli de jolies petites perles pop. Les textes sont aussi malins que drôles. Schyzopolis est un album très agréable à écouter et à ré-écouter sans lassitude aucune. Un disque drôle ET classe. Bravo, merci. |