Spectacle écrit, conçu et interprété par Martin Zimmermann et Dimitri de Perrot avec
Tarek Halaby, Dimitri Jourde, Dimitri de Perrot, Gaël Santisteva, Mélissa Von Vépy, Methinee Wongtrakoon et Martin Zimmermann.
En 2006, "Gaff Aff", la première création de la compagnie helvétique Zimmerman & de Perrot, composée de Martin Zimmermann, chorégraphe et circassien, et Dimitri de Perrot, DJ-platiniste et compositeur, déclinait, sous forme de solo muet, le thème du tragi-comique de la condition humaine à travers le parcours pathétique d'un individu confronté à l'immense solitude et à l'absurdité engendrée par la vie moderne.
Martin Zimmermann, silhouette maigre, visage en lame de couteau et corps en caoutchouc, faisait figure de clown triste atteint d'une hyperactivité compulsive mais stérile qui, né d'un oeuf-carton, finissait obèse entre quatre murs.
Avec "Öper/Öpis", créé en 2009, cette thématique était appliquée à la relation bilatérale soumise à l'incertitude représentée par un sol en bascule dans une déclinaison scénique dispensée par des danseurs et artistes de cirque.
Pour sa troisième création, "Hans was heiri", propose un nouveau spectacle qui constitue une synthèse des deux précédents.
Pendant que, côté cour, Dimitri de Perrot se concentre sur ses platines pour dispenser l'habillage sonore d'un spectacle quasiment muet, n'étaient quelques onomatopées, borborygmes, yodels a cappella et tubes de variétés, Martin Zimmermann, hybride de Valentin le désossé, de Speedy Gonzales et d'un Jiminy Cricket anorexique version expressionnisme allemand, joue les trublions et les deus ex machina pour éprouver les petits humains à l'absurdité de la condition humaine mais également à l'altérité, les confronter tant à l'uniformisation qu'à l'anomie de la vie urbaine et les soumettre, tels des rats de laboratoire, à la perte absolue de repères.
Cette dernière est dispensée par placé sur une tournette verticale sur laquelle est apposée une boîte géante symbolisant l'habitation urbaine empilable avec quatre pièces grandeur nature, cumulant le principe du cercle mobile du tourne-disque géant de "Gaff Aff" et celui de la bascule de "Öper/Öpis", qui permet de simuler un environnement instable.
Une scénographie bluffante qui évoque l'installation collective "Dylaby", le "labyrinthe dynamique" qui perturbe les codes de perception de l'espace, conçu en 1962 par deux artistes plasticiens, suisses eux aussi, Jean Tinguely et Daniel Spoerri tout comme le jeu avec des éléments de mobilier en front de scène, support d'actions burlesques et psychologiques. rappelle les chaises de la série "Equilibre - Un après midi tranquille" de Fischli et Weiss, encore des plasticiens suisses.
Cet agrès rotatif permet aux cinq compagnons de scène du duo Zimmerman et de Perrot, Methinee Wongtrakoon, contorsionniste suédoise, Mélissa Von Vépy, danseuse, chorégraphe, performeuse et trapéziste suisse formée au CNAC tout comme les français Gabriel Santisteva, acrobate-voltigeur, et Dimitri Jourde, danseur et acrobate, et le palestino-américain Tarek Halaby, de réaliser des performances scéniques époustouflantes.
Toutefois, elles n'échappent pas à l'effet du numéro circassien, chaque artiste ayant son quart d'heure warholien, défaut certes mineur s'agissant d'artistes de haut niveau - notamment Dimitri Jourde et Mélissa Von Vépy qui défient les lois de l'apesanteur et de la gravité avec une fluidité et une aisance sidérantes - mais accentuent l'effet d'enchaînement de séquences d'une partition sans réelle trame narrative.
Cela étant, le spectaculaire du spectacle, qui résulte d'une réussie hybridation pluridisciplinaire du cirque aux arts visuels en passant par un théâtre sans parole fondé sur la mécanique keatonienne, est garanti. |