Pour son exposition printanière, le Musée des Impressionnismes de Giverny, en collaboration avec le Musée départemental Maurice Denis de Saint-Germain-en-Laye, propose de célébrer le printemps à travers l'oeuvre du peintre Maurice Denis.
Car ce peintre symboliste et chrétien, chantre du néo-traditionnalisme dès sa vingtième année dans un article qui devient le manifeste du groupe des Nabis, exposant l'année suivante pour la première fois au Salon des indépendants, surnommé le "Nabi aux belles icônes", a fait du printemps, dans une acception trinitaire toute personnelle et singulière, un thème central de son oeuvre.
A cet effet, Vanessa Lecomte, attachée de conservation au Musée des Impressionnismes, et Fabienne Stahl, attachée de conservation du patrimoine, docteur en histoire de l'art, spécialiste de Maurice Denis et co-auteur du catalogue raisonné de ses oeuvres, ont sélectionné un florilège d'oeuvres, dont des inédites ou rarement présentées en France, provenant des collections publiques et privées.
Maurice Denis - L'Eternel printemps
Qu'il réside au printemps dans la ville saint-germanoise natale et dans sa villégiature bretonne en été ou passe ses hivers dans la douceur de sa villa italienne, il n'y a qu'une saison pour Maurice Denis : le printemps
Le printemps denisien est porteur d'une triple symbolique liée à l'omniprésence de la trilogie art-amour-religion : le printemps de la vie et de l'amour, le printemps de l'âme rafraîchie à la source de la spiritualité et l'immortel printemps de l'art.
A travers cette thématique, le visiteur pourra découvrir l'esthétique nouvelle prônée par les nabis caractérisée par la rigueur de la composition et la simplification des formes, l'absence de perspective, le japonisme, les aplats de couleur d'une palette chromatique restreinte et souvent atone, qui s'opposait à l'impressionnisme dominant.
Cette thématique illustre également les deux ambitions et axes de travail du peintre qui tenaient à la rénovation de l'art religieux et la redynamisation de la peinture monumentale décorative dans un style qui se situe à la frontière du symbolisme et du primitivisme.
Maurice Denis célèbre le printemps de la vie et de l'amour avec la femme comme figure centrale d'où l'évocation de la virginité, des fiançailles et du mariage heureux qui se retrouvent de manière récurrente, et souvent simultanée, sur tableaux et objets décoratifs ("Virginal printemps", 'Le paravent aux colombes" production unique inspirée du Cantiques des Cantiques).
Chaque élément est lié à une symbolique unique et récurrente tendant toujours au syncrétisme entre le profane et le sacré et qui apparaît dès ses premières oeuvres comme "Les anémones", tableau retenu comme visuel pour l'affiche de l'exposition, métaphore du chemin de la vie de la femme et "Le Mystère Catholique".
L'importance qu'il attache à la spiritualité et son iconographie personnelle le conduit à célébrer une épiphanie unanimiste à travers la réinterprétation dans l'univers du quotidien contemporain de célébrations chrétiennes telles l'Annonciation et la résurrection ("Matinée de Pâques").
Jusqu'à la fin de sa vie, Maurice Denis a pratiqué "la vie des échafaudages", c'est-à-dire la peinture décorative monumentale par laquelle il a été connu et reconnu.
Un des grands intérêts de l'exposition tient également à la présentation d'ensembles décoratifs exceptionnels dont ceux des plafonds inspirés des peintures décoratives des villas florentines pour l'hôtel particulier du musicien Ernest Chausson, "Le Printemps", "Le Temps des lilas" et "Avril" au format rond avec son motif de jeunes femmes en apesanteur portant des corbeilles, et les dix panneaux de "L’Éternel Printemps" réalisé pour la salle à manger du mécène Gabriel Thomas, avec une maquette reconstitutive.
L'exposition se clôt sur une peinture monumentale, "Orphée et Euridyce", une oeuvre de commande du fondateur de l'Art Nouveau belge Henry Van de Velde qui illustre le sentiment conjugal, appartenant à un collectionneur privé et présentée pour la première fois au public
A ne pas négliger, en retrait, dans la section d’arts graphiques, l'intégralité des magnifiques lithographies de la série "Amour" consacrée à Marthe,son épouse et muse.
Il est vivement conseillé de prendre l'audioguide qui, pour un coût raisonnable de 2 €, apporte une vraie valeur ajoutée à la visite en complétant l'analyse des oeuvres de commentaires sur la vie et l'environnement du peintre et d'extraits de ses textes et correspondances. |