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Théâtre National de Chaillot  (Paris)  mai 2012

Drame écrit et mis par Wajdi Mouawad, avec Marie-Josee Bastien, Jean-Jacqui Boutet, Veronique Cote, Gerald Gagnon, Linda Laplante, Anne-Marie Olivier, Valeriy Pankov et Isabelle Roy.

Après son élaboration en résidence de création au Canada au printemps 2011, suite à une commande du Théâtre du Trident, et sa toute récente création en première mondiale au théâtre de la Schaubühne à Berlin à l'issue d'une seconde période de résidence, Wajdi Mouawad présente son dernier opus en date "Temps" au Théâtre National de Chaillot.

Un opus qui procède d'une syncrétisme entre sa quadrilogie "Le sang des promesses" qui explore l'impact des crimes de l'Histoire sur l'intime et la trilogie "Des femmes" d'après Sophocle qui interroge, au travers du destin tragique de trois femmes, la légitimité de la loi patriarcale et la mort du père vue du côté féminin.

Toujours fidèle aux grands mythes réinventés par la tragédie antique, Wajdi Mouawad implante la tragédie oedipienne, mais avec un inceste père-fille, dans une ville minière du Grand Nord qui se trouve soumise à un cataclysme météorologique et à une invasion de rats.

Dans une micro-société autarcique, personne n'a voulu déboulonner la statue du du poète, du pater familias et du potentat fondateur de la ville : face à l'horreur du crime commis contre sa fille, c'est le silence (les habitants), l'impuissance (le suicide de la m re par immolation par le feu), la mutité traumatique (la fille) ou le déni (la nouvelle très jeune épouse).

Ces deux catastrophes annoncent simultanément la fin d'un temps et le possible avènement d'un temps nouveau liés à la mort prochaine de son grand homme et de son monstre, Napier de la Forge, plongé dans la déliquescence alzheimérienne, à l'occasion de laquelle la fille violée jusqu'à sa nubilité, qui est néanmoins restée toute sa vie auprès du père, recompose une fratrie éclatée en convoquant ses frères, qu'elle a exfiltré de cette famille anéantie et qui ont été adopté, pour régler la future succession.

Bien évidemment, il ne s'agit pas de l'héritage matériel mais du partage d'un fardeau, celui de la révélation d'une filiation ignominieuse et de suivre le fil du désastre qui conduit vers le monstre, comme l'indique Wajdi Mouawad, afin de dynamiter le labyrinthe et, en l'occurrence, priver le père de la mort du héros pour y substituer l'assassinat du bourreau.

Dans une pièce en tableaux chronologiques, et au texte cru et impitoyable, Wajdi Mouawad brasse ses thématiques récurrentes que sont le chaos, le mal, l'oeuvre du temps avec le dilemme entre la mémoire et l'oubli, la filiation maudite et l'identité, en l'espèce, avec la violence psychique de l'inceste, qui altère l'identité et peut entraîner la mort de l'âme,

Comme souvent chez Wajdi Mouawad, la scénographie procède du syncrétisme entre la tragédie déclinée de manière contemporaine et le soap-opéra même si le décor conçu par Emmanuel Cloclus est minimaliste.

Le rideau de panneaux souples et transparents, qui sépare l'intérieur de l'extérieur, est à l'origine de belles images esthétisantes lorsque apparaissent les silhouettes des personnages qui s'y appuient grâce au subtil travail de lumières de Eric Champoux qui sublime certaines scènes telle celle du père, vieil homme sénile, sous une pluie de feuilles manuscrites qu'il a jetées au vent.

Les comédiens, qui interviennent dans différents espaces situationnels scandés par une puissante signalisation sonore, hurlement de sirènes, tir de flèches, illustrant le mouvement linéaire du temps historique, et rock brut de Noir Désir, avec la voix de Bertrand Cantat qui figurait déjà dans la trilogie "Des femmes", portent la pièce avec intensité et implication mais celle-ci déçoit même si elle ne laisse pas indemne.

Sans doute, certainement, parce que, nonobstant des idées dramaturgiques, habile telle celle du choryphée résultant du mécanisme de la double traduction, avec la traductrice de la langue des signes (Linda Laplante) et la traductrice russe (Anne-Marie Olivier) qui répètent en écho la révélation, ou percutante, comme le passage à l'acte du vieil homme, interprétation ébouriffante de Jean-Jacqui Boutet, avec une robe de petite fille, manifestement l'écriture n'est pas encore totalement aboutie.

En effet, si la partition du personnage central qu'est la fille-soeur est amplement développé, celle des frères comme incarnation du temps historique (le frère canadien devenu militaire/Gerald Gagnon) et du temps messianique (le frère adopté en Russie/Valeriy Pankov) s'avère lacunaire comme celle de la mairesse (Isabelle Roy)

Par ailleurs, dans cette pièce d'une durée relativement et inhabituellement courte chez Wajdi Mouawad, moins de deux heures, les puissantes envolées lyriques portées par un véritable souffle tragique - marque de fabrique de l'auteur - sont trop rares.

De plus, si celle de la fille, superbement incarnée par Marie-Josée Bastien à la présence irradiante, qui explique les raisons - par forcément rationnelles pour lesquelles elle n'a pas fui le domicile paternel et qui tiennent au lien indéfectible avec "son" père et au refus de la fuite qui l'aurait victimisée - est poignante, notamment quand elle retrouve momentanément la parole, et ce malgré les hiatus résultant de la traduction, la supplique de l'épouse pour sauver l'héritage littéraire du père pâtit de l'excessive déclamation frontale de Véronique Côté.

Cela étant, rien n'est inscrit dans le marbre pour ce que le spectateur bienveillant pourra voir comme un "work in progress".  

 

MM         
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# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine

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Du côté de la musique :

"Génération (tome 1)" de Ambre
"Out" de Fishtalk
"Take a look at the sea" de Fontanarosa
"Venus rising" de Trio SR9 & Kyrie Kristmanson
"Perpétuel" de Vesperine
"Liminal status" de Watertank
"The great calm" de Whispering Sons
"Keep it simple" de Yann Jankielewicz , Josh Dion & Jason Lindner
Quelques nouveautés en clips avec Isolation, Resto Basket, Greyborn, Bad Juice, Last Temptation, One Rusty Band, We Hate You Please Die
nouvel épisode du Morceau Caché, consacré à Portishead
et toujours :
"Kit de survie en milieu hostile" de Betrand Betsch

"Let the monster fall" de Thomas de Pourquery
"Etat sauvage" de Chaton Laveur
"Embers of protest" de Burning Heads
"Sin miedo" de Chu Chi Cha
"Louis Beydts : Mélodies & songs" de Cyrille Dubois & Tristan Raës
"Arnold Schönberg : Pierrot lunaire" de Jessica Martin Maresco, Ensemble Op.Cit & Guillaume Bourgogne
"C'est pas Blanche-neige ni Cendrillon" de Madame Robert
"Brothers and sisters" de Michelle David & True Tones
"Prokofiev" de Nikita Mndoyants
"Alas" de Patrick Langot, Alexis Cardenas, Orchestre de Lutetia & Alejandro Sandler
"Symptom of decline" de The Black Enderkid
"Tigers blood" de Waxahatchee
"Not good enough" de Wizard

Au théâtre :

les nouveautés :

"Sonate d'automne" au Théâtre Studio Hébertot
"Frida" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses

"Preuve d'amour" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Après les ruines" au théâtre La Comète de Chalons En Champagne
"Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?" au Théâtre du Guichet Montparnasse
"Royan, la professeure de français" au Théâtre de Paris
Notes de départs" au Théâtre Poche Montparnasse
"Les chatouilles" au Théâtre de l'Atelier
"Tant que nos coeurs flamboient" au Théâtre Essaïon
et toujours :
"Come Bach" au Théâtre Le Lucernaire
"Enfance" au Théâtre Poche Montparnasse
"Lîle des esclaves" au Théâtre Le Lucernaire
"La forme des choses" au Théâtre La Flèche
"Partie" au Théâtre Silvia Monfort
"Punk.e.s" Au Théâtre La Scala
"Hedwig and the angry inch" au théâtre La Scala
"Je voudrais pas crever avant d'avoir connu" au Théâtre Essaïon
"Les crabes" au Théâtre La Scala
"Gosse de riche" au Théâtre Athénée Louis Jouvet
"L'abolition des privilèges" au Théâtre 13
"Lisbeth's" au Théâtre de la Manufacture des Abbesses
des reprises :
"Macbeth" au Théâtre Essaion
"Le chef d'oeuvre inconnu" au Théâtre Essaion
"Darius" au Théâtre Le Lucernaire
"Rimbaud cavalcades" au Théâtre Essaion
"La peur" au Théâtre La Scala

Une exposition à la Halle Saint Pierre : "L'esprit Singulier"

Du cinéma avec :

"Le déserteur" de Dani Rosenberg
"Marilu" de Sandrine Dumas
"Que notre joie demeure" de Cheyenne-Marie Carron
zt toujours :
"Amal" de Jawad Rhalib
"L'île" de Damien Manivel
"Le naméssime" de Xavier Bélony Mussel
"Yurt" de Nehir Tuna
"Le squelette de Madame Morales" de Rogelio A. Gonzalez

Lecture avec :

"Hervé le Corre, mélancolie révolutionnaire" de Yvan Robin
"Dans le battant des lames"' de Vincent Constantin
"L'heure du retour" de Christopher M. Wood
"Prendre son souffle" de Geneviève Jannelle
et toujours :
"L'origine des larmes" de Jean-Paul Dubois
"Mort d'un libraire" de Alice Slater
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"La république des imposteurs" de Eric Branca
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