Comédie de Copi, mise en scène de Jean-Michel Rabeux, avec Claude Degliame, Georges Edmont, Marc Mérigot et Christophe Sauger.
Après "La Nuit des Rois" de Shakespeare où il était aussi, et déjà au 16ème siècle, question de transgression par le travestissement, Jean-Michel Rabeux met en scène "Les quatre jumelles" de Copi.
Cocaïne, morphine et camphre, c'est sous le régime de ce cocktail trinitaire que ces quatre personnages survivent pour déjouer la mort et le temps à travers des jeux de rôle sur l'identité et la domination.
Phénix improbables et transgenres, elles se livrent à rituel d'incarnation et d'intercession pour conjurer la réalité, une danse de mort scandés d'assassinats mutuels et réciproques et de résurrections récurrentes tels des personnages de cartoon, à l'instar des seringues vides sorties d'une panoplie du petit médecin et des pistolets chargés de pétard,
Déguisées en majorettes meneuses d'une revue macabre, vieux cabots au maquillage plâtreux de clown blanc revisité par Michou avec faux cils et perruque platine, masques à l'outrancier expressionnisme ensorien, elles cherchent à se piquer mutuellement un magot. Mais peu importe l'histoire parcellaire et absurde.
Pour leurs ébats injurieux et sanguinolents, Pierre-André Weitz, scénographe attitré de Jean-Michel Rabeux, a conçu un podium circulaire, qui tient de l'arène, de la piste de cirque, du tonneau des danaïdes et du carrousel pour vieux travelos vétérans de la Gay Pride et signe également les maquillages et les costumes, veste en tulle blanc et bottes de poissonnier en caoutchouc blanc, recyclage de celui du fou dans la pièce de Shakespeare.
Mais, et alors même que la partition est courte, moins d'une heure, le propos finit par tourner en rond comme les jumelles autour du praticable central surmonté d'une ésotérique boule de lumière qui sert de terrain de jeux à une sororité vénéneuse et autour duquel se déploie le public.
Cela est sans doute dû au fait d'une iconographie trash trop souvent utilisée, et à tout propos, sur scène et de l'érosion de l'aspect transgressif de la marginalité telle qu'elle existait en 1973, date d'écriture de la pièce.
Reste la performance du quartet de choc formé par Claude Degliame, Georges Edmont, Marc Mérigot et Christophe Sauger sublimes en clowns tragiques et pathétiques qui transcendent cette farce morbide même si, paradoxalement, elle célèbre la vie. |