Le jeune Riley
Briggs, tête pensante du groupe écossais Aberfeldy
qui dispense cette pop claire que leurs compatriotes Belle et Sebastian
ont remis au goût du jour était de passage à
Paris pour la promotion de leur premier album Young
forever.
Il a répondu avec gentillesse à nos questions...et
avec un sacré accent !
Quelles sont vos influences musicales ?
J’écoute un peu de tout. J’aime
des choses allant de AC/DC à la musique country en passant
par la musique pop, Bob Dylan, The Beatles. Il n’y a pas d’artiste
ou de genre que j’aime par-dessus tout. En ce qui concerne
l’album d’Aberfeldy, il a été influencé
par Michael Hurley, un chanteur américain des années
70. Il y aussi Incredible String Band un groupe folk écossais
des années 60 et The Beatles. On écoute tous The Beatles.
Il y a aussi Tod Rundgren, Neil Young.
C’est assez étonnant en écoutant
l’album j’aurais pensé à des influences
plus clairement pop (les Beatles mis à part). L’album
me fait d’ailleurs pensé aux " Pappas Frittas".
Vous êtes la seconde personne à me
parler de ce groupe mais je ne le connais pas. Nous n’écoutons
pas vraiment de musique récente. Nous achetons tous nos disques
dans des boutiques d’occasion.
D’après ce que j’entends vous
n’êtes pas du genre lecteur acharné du NME ?
Certainement pas. Ce n’est pas ma tasse de
thé. Ceci étant nous avons été single
of the week avec le titre "Heliopolis by night". Nous
avons eu le droit à une bonne critique. Nous avons aussi
eu le droit à un bon article. Je l’ai donc acheté
deux semaines de suite, mais c’est exceptionnel.
En résumé on peut dire que vous
êtes un fan de musique mais surtout un fan de oldies
Oui. La musique actuelle que j’aime sonne
ancienne. Mais de toute façon, je n’ai pas les moyens
de m’intéresser à la musique actuelle. Je n’ai
pas d’ordinateur et je ne peux donc pas télécharger
de musique. Je ne peux pas m’offrir de pc mais sinon je suis
sûr que je serais beaucoup plus à l’écoute
des nouveautés.
Que pensez vous de la scène rock écossaise?
Que pensez vous de groupes comme Travis, Belle and sebsatian, Trash
can sinatras, Cocteau twins?
Tous ceux là sont des bons groupes. A peu
près tous les cinq ou dix ans, une dizaine de groupes écossais
apparaissent dans les charts. En fait, il y a toujours eu de très
bons groupes un peu partout en Ecosse. C’est juste que de
temps en temps la lumière est faite sur un certain nombre
d’entre eux. C’est mieux pour un journaliste d’écrire
sur un groupe s’il peut le rattacher à un courant,
ou à une scène musicale.
Les Trash Can Sinatras ont été
dans les charts ?
Dans les charts écossais. (rires) Ceci étant,
l’Ecosse est un endroit propice pour les groupes, surtout
ceux qui débutent. C’est en particulier le cas à
Glasgow où il est assez facile d’organiser des concerts
et de trouver du public pour venir y assister. Un nouveau groupe
n’est pas obligé de passer par toutes les étapes
qui sont imposées à Londres. A Londres, vous devez
d’abord passer par exemple faire des showcases pour le gens
de la profession,... C’est un processus beaucoup plus long
et difficile pour parvenir à faire écouter votre musique,
à rencontrer le public.
Mais vous venez d’Edimbourg ?
Oui, Edimbourg est plus petit et c’est plus
difficile pour les musiciens. Il y a moins de groupes, moins de
scènes, moins de public. C’est Glasgow qui a toujours
été la ville la plus active pour la musique. C’est
de là que viennent la plupart des groupes. Je pense que c’est
en grande partie dû au fait que beaucoup de gens vont à
l’université à Glasgow. Ils y vont pour étudier
pas pour travailler.
Ce qui est bien à Edimbourg, c’est
qu’il y a chaque année un grand festival. C’est
un festival des arts de la scène, pas uniquement un festival
de musique. Pendant un court instant, Edimbourg se transforme en
Londres. C’est l’occasion de rencontrer des agents et
pourquoi pas de glisser son CV (rires)
Les écossais, tout comme les irlandais
semblent avoir des facilités pour jouer de la musique. Cela
semble quelque chose de très naturel.
Qu’est ce qui fait que vous soyez si à l’aise
? Peut-être chantez vous dès votre plus jeune
âge ?
Tout ce qui fait partie de la culture écossaise
intéresse beaucoup les gens. Enfin, c’était
le cas, je ne sais pas si ça l’est toujours. Enfin,
je ne sais pas trop, j’ai une vision faussée car j’ai
été élevé dans une ambiance musicale.
J’ai appris à jouer d’un instrument très
jeune. Mes parents sont tous les deux musiciens : ma mère
joue de la guitare et mon père est batteur. Mais sinon en
Ecosse, faire de la musique est largement encouragé à
l’école.
Depuis combien de temps jouez vous de la musique
? Est-ce votre premier groupe ?
Oh non, je suis dans un groupe depuis que j’ai
l’âge de douze ans. J’ai toujours fait partie
d’un groupe depuis. Mais ça ne m’a jamais aidé
à trouver un emploi. (rires)
Tous vos groupes faisaient- ils le même
genre de musique ?
Non. Au début je faisais du punk. Ensuite,
il y a eu un groupe qui faisait du rock garage influencé
par la musique des sixties. Il y a aussi eu un groupe qui faisait
de la musique avec des synthétiseurs. C’était
une sorte de mélange entre Kraftwerk et des choses plus rock.
Vous êtes une sorte de caméléon
?
Oui c’est vrai. Mais je m’ennuie assez
rapidement lorsque je ne joue que d’une seule sorte de musique.
C’est plus intéressant de jouer devant différents
types de public dans différentes situations. C’est
bon d’être le plus possible occupé. Lorsque l’on
veut faire de la musique, il ne faut pas être gêné
d’en faire tout le temps. Il vaut mieux sortir, aller jouer
avec d’autres personnes plutôt que de rester chez soi
à s’entraîner. Plus vous partagez votre musique
avec d’autres, mieux c’est.
Comment composez- vous ? Est-ce le groupe en
entier ? Vous d’abord, ensuite vous amenez aux autres membres
les morceaux ?
Oui je suis en général à l’origine
des morceaux. Lorsque j’ai une idée, je la note par
écrit avant qu’elle ne disparaisse. Ensuite j’enregistre
en chantant ce que j’ai en tête sur un magnétophone.
Le lendemain, je présente tout ça au reste du groupe.
Avec quels instruments composez vous ?
Guitare. Mais pour ce disque, j’ai utilisé
d’autres instruments : un orgue, un orgue électrique
des années 70. J’utilise des guitares et des claviers
récupérés dans des brocantes ou des magasins
d’occasions. Je n’ai pas d’ordinateur, je n’utilise
que des instruments organiques.
Ce disque a été enregistré
live. Etait-ce important ?
Oui. En fait, d’abord nous avons choisi de
l’enregistrer live car ça sonnait mieux. Par ailleurs,
c’est vraiment très satisfaisant de pouvoir jouer un
morceau et d’écouter le résultat juste après.
On sait immédiatement à quoi le résultat ressemblera.
Lorsque l’on enregistre en utilisant de nombreuses pistes,
il faut attendre le mixage pour avoir une idée de ce à
quoi le morceau va ressembler. Dans le cas du multipiste, on se
dit que si le résultat n’est pas satisfaisant on pourra
toujours ajouter des effets, refaire les voix, changer les harmonies.
Lorsque l’on enregistre live, on doit savoir exactement ce
qu’on va faire avant de démarrer l’enregistrement.
Et si le résultat n’est pas concluant, il faut changer
ce qui ne va pas et recommencer l’enregistrement.
Nous avons joué les morceaux quelque choses
comme vingt fois d’affiler, jusqu'à ce que le producteur
juge que nous avions suffisamment de matière. Nous avons
continué ainsi, morceau après morceau. Ensuite nous
avons réécouté chacune des vingt prises et
associé une couleur à chacune des parties des différentes
interprétations. Par exemple, nous mettions du bleu foncé
si une partie nous plaisait et du rouge si nous la jugions inadaptée.
Puis nous avons utilisé un ordinateur pour recoller ensemble
toutes les parties bleu foncé. Donc ce qu’on entend
sur le disque a bien été enregistré live au
travers d’un unique micro mais résulte de plusieurs
prises.
Lorsque l’on joue live, le son est plus
puissant, non ?
Non. Je pense que le son est surtout plus fort.
Mais c’est un exercice assez difficile, surtout lorsque vous
utilisez des instruments acoustiques, comme une flûte ou une
guitare. Nous avions plein de problèmes de feedback. On est
facilement tenter de rebrancher les amplis. Après avoir enregistré
cinq morceaux, nous avions tous envie d’abandonner. La contrainte
de l’enregistrement live que nous nous étions fixé,
nous paraissait vraiment insurmontable. Mais nous avions choisi
cette option au départ et nous nous y sommes tenus. Au final
nous sommes contents de l’avoir fait ainsi.
Vous utilisez des instruments peu courant chez
les groupes de rock : la flûte, la mandoline, un métallophone,
… Quel est le but recherché ?
C’est un peu ennuyeux de ne toujours utiliser
que des guitares. Il y a une violoniste dans le groupe, et il n’y
a pas toujours du violon dans les morceaux. Donc plutôt que
de ne rien faire, elle joue de la flûte sur les autres morceaux.
(rires) Le métallophone n’est pas si inhabituel que
ça. C’est un instrument qui a même été
sur-utilisé. Il est pratique pour donner une certaine ambiance,
ajouter de la clarté au morceau. C’est un peu comme
saupoudrer le morceau avec de la poussière d’étoile.
Le métallophone est vraiment un instrument très utile.
Il suffit de quelques notes pour qu’il se détache des
autres instruments. C’est la même personne qui joue
de la mandoline et de la flûte. La mandoline est un instrument
assez classique.
Allez vous faire des concerts en France ?
Oui normalement. Je pense que ça devrait
se faire d’ici la fin de l’année. Nous n’avons
pas d’agent pour le moment mais ça ne devrait pas tarder.
En tant que public, vous souvenez vous de concerts
qui vous aient marqué ?
Le meilleur groupe que j’ai vu en concert,
c’est Turbonegro un groupe norvégien. C’est le
meilleur concert que j’ai jamais vu. Je les ai vus à
Glasgow. Ils faisaient un rock proche d’AC/DC. Le premier
concert que j’ai vu, c’était The shadows. Mon
père est un fan de The Shadows, il m’a emmené
les voir, je devais avoir sept ans.
Y a-t-il un sens à donner au titre de
l’album “Young forever”? Et y a-t-il un sens à
l’illustration sur la pochette du cd ?
Il y a une sorte de relation entre les deux due
à une mauvaise blague. Les deux lions de la pochette se rencontrent
pour créer des jeunes lions. En continuant à se reproduire
ainsi, il y aura des jeunes lions pour toujours ("Young forever").
En fait, l’illustration de la pochette provient d’un
livre pour enfants, un livre d’histoires je crois. Je la trouvais
assez marrante. Je voulais que le disque porte le nom d’un
des morceaux. Nous avions cette image qui prenait un sens avec le
titre "Young forever". C’est comme ça que
les choses se sont faites.
Quels sont vos projets pour le futur ? Un nouvel
album peut-être ?
Oui je ne pense pas que nous referons le même
disque. Nous avons déjà quelques morceaux à
enregistrer. Je pense que nous enregistrerons ça d’ici
la fin de l’année. Le son du prochain album sera différent.
Il y aura plus de claviers, des synthétiseurs. Il sera un
peu moins doux. Enfin pas radicalement, mais quand même un
peu moins doux.
Vous voyez-vous faire autre chose que de la musique
? Avoir un boulot "normal" ?
Non c’est trop tard pour moi. Je ne suis
pas vraiment intéressé par l’argent. Enfin,
quand même un peu comme tout le monde. Mais je préfère
ne pas gagner d’argent et faire quelque chose qui me plait.
Je ne me vois travailler dans une banque ou quelque chose comme
ça.
Si vous aviez trois mots pour définir
votre musique, quel serait votre choix ?
Quite harmless really
(Il réfléchit …)
Not too bad
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