Réalisé par Alex Ross Perry. Etats-Unis. Comédie. 1h23. (Sortie 1er août 2012). Avec Alex Ross Perry et Carlen Altman.
La semaine dernière, on évoquait le renouveau du cinéma indépendant américain avec "A little closer" de Matthew Petock. On poursuivra aujourd'hui sur la même lancée avec "The Color Wheel", réalisé et interprété par Alex Ross Perry, qui signe, à moins de trente ans, son deuxième long métrage.
Autant "A little closer" était dans la nuance, la chronique intimiste où les mots étaient rares et les regards terriblement importants, autant "The Color Wheel" est du côté de la parole, voire de la palabre, du temps perdu et des actes saugrenus.
JR (la sœur) et Colin (le frère) partent en se chamaillant pour un road-talk movie en noir et blanc, qui, mine de rien et sans se presser, s'accapare tout l'héritage de ce cinéma indépendant qui emprunta longtemps les chemins de traverse de l'Amérique.
En 83 minutes chrono, aidé par l'image exceptionnelle de Sean Williams qui fait bien de s'inspirer des photos de Robert Frank, Alex Ross Perry et sa co-scénariste Carlen Altman, qui joue JR, ont beaucoup à se dire sur la route qui les ramène, à travers quelques minces événements, au temps d'avant qu'ils soient devenus des adultes peu convaincants.
Alex Ross Perry, qui se revendique en réalisateur fils spirituel de Jerry Lewis et du trop rare Whit Stillman, se place aussi sous le haut-patronage du géant des lettres américaines, Philip Roth.
Cette référence absolue pourrait l'écraser mais, au contraire, elle s'avère assez juste et donne ainsi de la crédibilité à son ambition tout en rendant vaine la réduction d' Alex Ross Perry à un "nouveau Woody Allen" de plus. Car on est ici bien loin du plat filmage du clarinettiste new-yorkais et Perry, qui aime à perdre Allen les dialogues, ne se contente pas de les illustrer.
Sa parole ne tue pas son cinéma : la vie hors de la Honda pourrie, siège des engueulades perpétuelles du couple, est l'occasion de scènes d'une franche hilarité.
En reprenant à l'envers le chemin de leurs vies, JR et Colin font face à leurs camarades de lycée, sinistres fils et filles de famille de la Nouvelle Angleterre, et il ne faudra pas longtemps pour qu'ils les vomissent au sens littéral. Ils ne s'étaient pas dits rendez-vous dans dix ans, mais ils savent désormais que le prochain rendez-vous est fixé à jamais.
De ce périple sans péripéties, de ce récit clos sur lui-même, on retiendra le ton mi-sérieux mi amusé qui convient parfaitement à l'univers sensible et approximatif d'Alex Ross Perry.
Sans trop en dévoiler, entre chats et chiens il arrive que les choses évoluent. C'est dans le chalet familial qu'aura lieu l'explication finale et la dernière preuve que "The Color Wheel" d'Alex Ross Perry n'est ni un film gnangnan ni un film plan plan.
Une réussite et la révélation d'un acteur-réalisateur prêt à faire beaucoup parler de lui. |