Conte féérique de Wajdi Lahami d'après Shakespeare, mise en scène de Antoine Herbez, avec Lucas Anglares, Ariane Brousse, Ronan Debois, Ivan Herbez, Orianne Moretti, Benjamin Narvey, Alice Picaud, Gaëlle Pinheiro, Marie Salvat et Maxime de Toledo accompagnés par les musiciens Benjamin Narvey, Alice Picaud et Marie Salvat.
Au sein de la Compagnie Ecla Théâtre dont il assure la direction artistique, Antoine Herbez avait déjà réussi la saison passée un beau challenge en mettant en scène une adaptation particulièrement réussie de "La flûte enchantée" de Mozart.
Cette saison, avec "Un songe d'une nuit d'été", il réussit quasiment l'impossible en présentant, grâce à l'adaptation pertinente et inspirée de Wajdi Lahami, la fameuse comédie féérique de Shakespeare, extrêmement ardue à monter notamment en raison notamment de l'hybridation du merveilleux et du comique, enrichie d'intermèdes puisés dans le semi opéra baroque "The Fairy Queen" qu'elle a inspiré, un siècle plus tard, au compositeur anglais Purcell.
L'intrigue est concentrée sur la thématique du jeu de l'amour et du hasard imaginé par Shakespeare, dans lequel le hasard est constitué par un philtre d'amour manipulé par un roi magicien et Puck, un esprit étourdi, qui se développe sur le thème des amours contrariés dans des registres différents.
Ainsi l'amour de comédie avec Helena qui ne peut se résoudre à être délaissée par le versatile Démétrius (Arianne Brousse et Lucas Anglares), l'amour ingénu avec Hermia qui doit lutter contre l'autorité du père et la méprise de Puck qui lui ravit son amoureux Lysandre (Gaëlle Piinheiro et Ivan Herbez), et l'amour sensuel qui unit le Roi des Elfes et la Reine des Fées, amour assombri par des jalousies conjugales (Orianne Moretti et Maxime de Toledo). Mais que chacun se rassure, les frayeurs ne dureront que le temps d'une nuit dans la forêt enchantée que l'aurore dissipera avec le triomphe de l'amour.
Cette magistrale réussite tient au concours de tous les intervenants artistiques et à une heureuse conjonction de talents mis modestement au service du divertissement du public, comme le dit Puck en épilogue.
De plus, la scénographie stylisée de Charlotte Villermet, constituée de panneaux sur praticables mobiles dont les évidements en forme de frondaisons évoquent une forêt sublimée, les costumes gracieux de Madeleine Lhopitalier, qui joue la simplicité pour les jeunes athéniens de fantaisie et s'inspire de la légende arthurienne pour le couple royal et la délicatesse des flower fairies de l'illustratrice anglaise Cicely Mary Barker, et les lumières subtiles de Fouad Souaker contribuent à instaurer l'indispensable atmosphère féérique, qui ne pâtit d'aucun des deux travers que sont l'illustratif et le démonstratif qui guettent et gâtent généralement ce genre.
Toutefois, l'atmosphère posée ne serait rien sans la rigoureuse direction d'acteur de Antoine Herbez qui encadre une distribution parfaite en termes de fraîcheur et de jeunesse mais également d'emplois et de talents, avec des couples par ailleurs physiquement bien assortis, dont la gestuelle et les déplacements sur scène ont été conçus comme une véritable chorégraphie par Claire Faurot.
Arianne Brousse, une belle nature, impulse de manière assurée les scènes de comédie, entre capoiera et kung-fu, Ivan Herbez et Lucas Anglares offrent une belle scène de joute à mains nues et le quatuor formé avec Gaëlle Pinheiro délivre une jubilatoire scène de rivalité généralisée.
Sous la direction musicale de Didier Benetti, les fées et papillon musiciens (Alice Picaud au violoncelle, Marie Salvat au violon et Benjamin Narvey au luth) accompagnent en acoustique le spectacle et les comédiens-chanteurs (la soprano Orianne Moretti dans le rôle de la délicieuse et délicate reine, la soprano colorature Gaëlle Pinheiro, qui incarne parfaitement la douce et fidèle amoureuse et la piquante Fleur de Pois, le baryton-basse Maxime de Toledo, en roi aussi séduisant que majestueux, et le baryton Ronan Debois qui après avoir été le malicieux et pleutre oiseleur Papageno de Mozart ravit dans le rôle de l'esprit malicieux et étourdi) qui, ô bonheur suprême de ne pas entendre des voix désincarnées tomber des cintres, chantent sans micro HF.
Parfaitement exécutés, la duos chantés sélectionnés avec acuité s'intègrent parfaitement au spectacle qu'ils ponctuent de manière harmonieuse et auquel ils apportent une incontestable valeur ajoutée.
Résolument tout public et d'une grande exigence, ce spectacle fluide et enchanteur s'avère donc une totale réussite. |