Les Nits occupent une place particulière dans le coeur des amateurs de pop. Ils sont dans le paysage depuis tellement longtemps et pourtant toujours capables de se renouveler et de surprendre l'auditeur. C'est peut-être parce qu'ils ont sorti leur premier vinyl en 1978 que des dessins de plantes fossilisées illustrent le livret du cd. Cela conviendrait parfaitement à l'ironie dont sont coutumiers les insubmersibles bataves.
La première surprise de Malpensa provient de la photo qui illustre la pochette. C'est la première fois que les membres du groupe apparaissent aussi nettement. Il y avait bien eu la pochette de l'album Henk, en 1986, où des parties des visage des membres du groupe avaient été collées ensemble pour ne plus former qu'une seule figure. Et plus tard, des photos de leurs visages avaient été collées sur des corps dessinés pour la pochette d'Alankomaat, en 1998.
Avec bientôt trente albums au compteur, les Nits chercheraient-ils la reconnaissance ? On peut en douter car cet album, encore une fois, montre à quel point ces trois musiciens sont sobres, humbles, et savent jouer des nuances. Après le très beatlesien Strawberry Wood paru il y a trois ans, Malpensa revient vers des racines continentales, et même orientalisantes sur "Five Fingers" qui ouvre l'album.
L'ombre du commandeur Cohen semble avoir veillé à la destinée de cet album, en particulier dans le chant d'Henk Hofstede. Les ballades s'enchaînent, les mélodies se succèdent.
Il faut cependant savoir être patient. Malpensa est un album trop délicat et matois pour qu'on l'apprécie tout de suite intégralement et sans retenue. Certes, "Blue Things" ou "Paper" sont d'évidentes pépites pop, mais c'est au fur et à mesure des écoutes qu'on adopte avec bonheur l'ambiance cinématographique angoissante de "Big Black Boats", la boîte à rythmes vintage de "Schwebebahn" (le premier titre en allemand de leur longue carrière, alors qu'ils ont déjà chanté en flamand, en français ou en italien), la trompette free de Colin Benders (alias Kyteman) sur le grandiose "Bad governments ans its effects on town and country", ou encore les arrangements somptueux du faussement facile "Love Blocks".
Les Nits ont réussi encore une fois, au cours de ce voyage mélancolique mais jamais sombre, à ajouter quelques pièces d'exception à leur oeuvre pourtant déjà amplement fournie en purs joyaux.
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