La cire, le tailleur et le trip-hop ne font parfois qu'un.
J'imagine déjà vos yeux interrogateurs. Moi-même, je n'aurais jamais imaginé un jour en parler, si ce n'est en jouant aux cadavres exquis. Pourtant, si je vous dis Wax Tailor ! Vous bondissez sûrement, tout en gesticulant et en proférant des remarques incongrues tel que Maisouimaisbonsangmaiscestbiensûr !
Dans la série trip-hop, je connaissais Tricky – check, Gorillaz – check, Björk – check, dernièrement Amon Tobin – check, et quelques autres – check mais Wax Tailor ? "Mais comment ça ! Tu ne connais pas ? - Euh non pas trop". C'est donc quasi en béotienne que je me trouve ce soir-là à l'Aéronef parmi beaucoup de gens. "Pourtant, paraît-il, son nom pend aux lèvres de tous les fans du genre. - L'occasion d'expérimenter".
Alors ? How is my Tailor ?
My tailor est d'abord riche de mélanges musicaux. Bel et bien, on retrouve les fondements du hip-hop. Ne le dit-il pas lui-même ? Le dj à la tête d'ampoule a éclairé son génie musical en écoutant le hip-hop noir américain, le fondement. Et si my tailor s'appelle Wax, c'est que son outil de travail n'est autre qu'une rondelle de cire. Le hip-hop c'est donc lui, l'incarnation, le rôle central. A coup de cross économes mais bien placés, son scratch scotch les oreilles des avertis. My tailor me fait penser parfois à C2C pour le hip-hop – demi chek. Une sorte de chef d'orchestre qui aurait pour baguette une galette. Autour de lui, des satellites-musiciens tournent. Et c'est là que le trip-hop prend toute sa dimension. Une dimension orchestrale.
My tailor est riche de musiciens. Ma préférence tend vers la cro(a)quante siffleuse. Non pas parce qu'elle est jolie mais parce que la flûtiste n'hésite pas à offrir de longues improvisations légères et jazzy.
Mais c'est aussi un guitariste, une violoniste et un contrebassiste. Une belle brochette de vrais donneurs de sons. Et par dessus ce tout, my tailor y saupoudre des mots. Parfois ceux aiguisés et dynamiques de rappeurs.
Parfois ceux atmosphériques et trémolos susurre-doux de chanteuse comme la pulpeuse et pailletée Charlotte Savary. Un peu trop comédie musicale à mon goût. Du coup, cela me fait penser à Archive – check.
My tailor est riche de cinéma. Once upon a time. Le spectacle s'ouvre à la manière d'un conte. La voix toute particulière du vieux monsieur de la BBC, Don McCorkindal nous raconte, pendant que les images défilent, l'histoire d'un jeune garçon découvrant la musique.
Pièces par pièces, c'est finalement – à la lettre ? – le fruit de son dernier album concept Dusty rainbow from the dark, que my tailor nous donne à (voir + écouter =) écoutoir ou voiouter. Ce petit garçon de my tailor me fait penser aux dessins de Gorillaz – check ou de Ek3kiel.
How is donc my tailor ? Dans sa cire musicale, cinéma, musique hip-hop, trip-hop, se mêlent donc pour donner une matière intéressante. Wax Tailor la sculpte même finement pour offrir un fil musical abouti, un spectacle bien rôdé. A la manière de Ez3kiel – check, il est de ce courant d'artistes qui construisent la musique avec les images. Et si le postulat de départ était de créer une presque bande-son, alors le pari est réussi. Les atmosphères sont efficaces. Mais l'ensemble me paraît peut-être un peu trop mollasson, un peu trop comédie musicale, un peu trop niais.
En première partie, le dj est d'une autre trempe. L'opposé extrême, même. Jeune caennais de vingt ans, Superpoze est considéré comme un petit génie montant, qui a déjà fait beaucoup parlé de lui dans ce grand monde de l'électro.
Comme il aime le déclarer, "il ne mixe pas, il fait du live !". A le voir tripatouiller comme un fou ces machines, on te croit !, on te croit ! Calm down petit ! Car il est vrai, Superpoze, à lui tout seul, pourrait passer au travers de la scène. Je ris, j'avoue, en repensant à ces gesticulations. Nul besoin de montrer tes touches, tes joujoux électroniques, petit !
Il faut faire abstraction de ce spectacle de marathonien de l'électro. Le challenge réussit, j'avoue, les morceaux en valent la chandelle. Les influences de ses pères sont encore toutes fraîches : Amon Tobin, Ez3kiel. Mais la manipulation rapide et méticuleuse de ses séquences choisies : des mots, des voix, des bruits, originaux, bizarres, envoûtants, explosifs, cristallins… bref sont aboutis sans couacs. Dans quelques années, il sera, qui sait ?, sur la list de la French Touch. A suivre…
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