Ah ! Jean-Michel ! Mon cœur s’emplit de joie de te lire à nouveau ! Mes mains fébriles et mes yeux inquisiteurs t’ont tant attendu… C’était il y a un an déjà, il y a un an à peine, Un jour, je serai roi, début de l’épopée de la construction du mythique Versailles. La suite : Le Roi noir de Versailles, bougre qui n’a pas succombé à la plume de Riou.
Le premier volet de cette trilogie (quoi ? Un an avant le prochain ? Mais c’est une éternité ! Comment a fait Louis XIV pour attendre une bonne dizaine d’années avant de voir son rêve se réaliser ? Alors qu’il a failli tomber à l’eau tant de fois…). Du petit relais de chasse moisi de Louis XIII, son fiston visionnaire décide de faire un majestueux palais dans lequel il viendra avec ses copains et ses copines. Les débuts sont difficiles, les premiers pans du monument que nous connaissons sont compromis par les marécages, les maladies, la misère, le manque de main d’œuvre et une mortalité désespérante.
Louis XIV le magnifique face à Toussaint Delaforge l’opportuniste, le roi Soleil face au roi Noir. Ces deux là ne se rencontrent jamais, mais ils portent en eux la même soif d’avancer, le même courage qui les pousse au-delà de leurs limites. Les moyens utilisés ne sont seulement pas les mêmes selon qu’on est né dans la soie ou dans la boue.
Bref, dans ce deuxième volet, la pagaille règne sur le chantier, deux clans cohabitent tant bien que mal : les honnêtes maçons de la veuve Pontgallet et les véreux tricheurs de Ravort. Pour des raisons bien différentes, les deux sont étroitement liés au Roi Noir, qui mène la danse. Le pire, c’est qu’on n’arrive pas vraiment à détester ce croque-mitaine manchot, on lui trouve des excuses. Et c’est ce qui fait la force des personnages de ce roman, ce ne sont que des humains, avec leurs travers et leurs défauts, pas tellement différents de ce que nous sommes. Leurs secrets et les silences pour les cacher les rongent, présageant de la dramatique suite.
1668, Versailles, l’hiver approche, le travail ralentit, les versaillais grondent, l’affrontement n’est pas loin… Versailles…. Versailles… Versailles ! Ses milliers de pièces, ses innombrables vestibules, ses multiples corridors secrets ou non, ses ailes, ses dorures, de ses miroirs à ses fenêtres en passant par ses jardins et ses fontaines, l’élévation du palais est rongée de doutes, d’avancées incertaines, de plans inachevés, d’idées de génies et de folies techniques…
Ce deuxième tome pourrait être celui du doute, le palais n’avance pas, les travailleurs submergés par le doute ne savent plus tellement à qui se fier. Et quand la vérité éclate, c’est pire que ce que nous avions imaginé…
Pfff, pas facile de dire sans tout révéler. Une bande-annonce hollywoodienne aurait justement scandé d’une voix profonde "un Bourbon (Pti Louis en tenue d’apparat), une envie (Le Vau, Orbay, Perrault, Athénaïs et la reine affligés devant l’envergure du projet), des ouvriers (les héros quotidiens Léon, Marguerite, Le Faillon, Pagaille le chien, les bonnes sœurs médic dans les allées du chantier, Delaforge, Ravort et ses potes des Sans Aveux dans les travées mal famées), des envies (mauvais regards, meurtres, sang, étang putride)"… Là, forcément, ça ne fait pas super, mais avec des vraies images, ça pourrait le faire.
La plume toujours aussi élégante de Jean-Michel Riou nous entraîne dans les profondeurs du chantier, quand la construction a démarré depuis longtemps déjà et semble ne jamais avoir de fin, quand les projets divergent, quand l’architecte brillant est accusé de corruption avant de mourir, quand la peur fait place à la colère de la vengeance… Quand rien ne se passe comme prévu. Mais puisque "Le roi le veut", il faut continuer.
Conclusion : pas prêt de caler un meuble celui-là ! Comment ça ? Je l’ai déjà dit ? Arf, tant pis. Pareil, à lire, à conseiller, à offrir, à relire, à savourer, à prêter, à donner, à découvrir… Mais surtout à ne pas manquer ! |