Sur la scène de l’Aéronef on voit quelque chose de curieux. A certains moments du concert de Dionysos, le public a une drôle de façon de bouger. Certains lèvent les deux mains et miment une espèce d’oiseau sur le point de s’envoler. Il s’agit certainement d’un signe de reconnaissance en rapport avec le dernier album du groupe, intitulé Bird’N’roll, sorti cette année. Cette démarche a quelque chose de généreux, mais je ne saurais dire en quoi.
Sur scène une belle énergie se transmet de proche en proche, pour emporter toute la salle. Cette euphorie me surprend, et si je ne suis touché par cette musique, je la respecte entièrement. En fait, c’est son côté brut qui ne trouve pas de résonance en moi ; mais cela n’enlève rien à cette joie collective, ni à l’univers particulier du groupe français (moins surréaliste, selon une étiquette erronée, que symbolique : le surréalisme n’a rien à voir avec les symboles).
Les chansons courtes et intenses de ce dernier Dionysos sont souvent traversées de riffs, qui produisent un effet physique dans la salle (même si la fameuse "Song for Jedi" était décevante, bien qu’elle fût acclamée comme il se doit par le public.) Pour une fois que des riffs sonnent bien, on prend goût à les accueillir. Et ce qui fait retomber la tension, c’est l’humour du chanteur Mathias Malzieu, sans lequel nous supporterions à grand peine cette décharge ininterrompue d’adrénaline. Mais il y a aussi une rage derrière ces chansons, une rage sourde, rien n’est gratuit. Comme si le chanteur nous disait : "voilà notre rock dur, dansez, l’ambiance ici est magnifique, mais ne vous y trompez pas, nous sommes en réalité en colère".
Cette rage, on sent bien qu’elle prend son fondement quelque part, entre la douleur et la perte. En cela le groupe s’expose et prend des risques ; il se met à nu dans une certaine désinvolture. Ah j’allais oublier une chose, une nouveauté liée au dernier album, et qui surprend dans un premier temps, c’est la présence d’un chœur composé de trois jeunes femmes, qui apporte à cette fièvre douceur et chaleur. Un peu à l’image des plumes qui traînent de part et d’autre de la scène. |