Don Cavalli fait du Blues pour son et notre plus grand plaisir.Cryland nous avait enchantés, hors du temps et des modes, sa voix posait les bases du blues tout en l'ouvrant tout à la fois à une certaine modernité. Nombreux sont les musiciens se réclamant de l'influence de cette musique, Don Cavalli a passé la croisée des chemins, et il semble qu'il ne se soit pas fourvoyé dans un marché de dupe. Il est le blues, celui d'aujourd'hui et son accent n'a pas à jalouser celui des rives du Mississipi.

Peut-on faire un petit retour sur tes débuts, comment es-tu venu à la musique ?

Don Cavalli : J'ai commencé dans le milieu rock 'n' roll underground, fifties, garage. J'ai commencé à faire des concerts parce que j'adorais le rock 'n' roll et que j'adorais ce milieu là, et puis je ne me suis jamais arrêté. J'ai dû faire cinq ou six albums.

Déjà sous le nom Don Cavalli ? Parce que je n'ai pas trouvé d'informations là-dessus.

Don Cavalli : Oui, comme je te disais, je viens du milieu underground, j'ai eu des disques qui sont sortis un peu partout dans le monde, distribués par des petits labels français, suédois ou américains, mais pressés à très peu d'exemplaires, cinq cents ou mille maximum. Ensuite ça partait dans le monde, les gens me connaissaient, mais à un petit niveau, pour des mecs vraiment branchés dans ce style là. Après le grand public, comme on dit, ne connaissait pas.

Comme le grand public, je t'ai découvert avec ton album Cryland.

Don Cavalli : Voilà, c'est pour ça que les gens disent que Temperamental est mon deuxième album, je n'ai pas de souci avec ça. C'est mon deuxième album médiatisé on va dire.

Justement, tu avais eu une bonne couverture médiatique pour Cryland, comment on passe du milieu underground à un peu plus de lumière ?

Don Cavalli : Tout simplement parce que j'ai trouvé un producteur qui était intéressé parce que je faisais, et qui bossait chez Sony, puis chez Universal. Il a monté son truc à lui, son label indépendant mais il a des connexions, donc c'est plus facile de faire écouter le disque, le passer en radio et de l'exposer à des gens qui ne l'auraient pas écouté, comme toi par exemple, donc moi je suis très content. Le label, c'est A Rag.

Cryland t'a permis de voyager avec ta musique ?

Don Cavalli : Un petit peu, mais gentiment. Tu sais, j'ai eu de la chance, l'album est sorti sur A Rag en France, mais aussi sur un label indépendant américain, qui s'appelle Everloving et ça m'a apporté beaucoup de choses. Les gens qui étaient passés à côté du disque en France, du fait qu'il sorte aux Etats-Unis - un français sur un label américain - ça leur a mis la puce à l'oreille. Le magazine Mojo aussi m'a aidé, il m'ont mis douzième album de l'année sur cinquante ou cent, ça m'a fait un bon coup de pub.

Du coup, tu es allé jouer aux Etats-Unis.

Don Cavalli : Oui, j'ai joué essentiellement en Californie et un petit peu à Las Vegas. Quand tu joues là-bas même s'il n'y a pas grand monde, même si on a fait quelques festivals, les gens sont vraiment réceptifs parce qu'ils comprennent ce que je chante. Je peux leur amener le truc en leur parlant un petit peu avant, du coup ils l'écoutent et il la ressentent, donc ça c'est vraiment cool.

En étant aux Etats-Unis, à la source de ta musique, est-ce que tu as pu faire des rencontres ?

Don Cavalli : Non, on a croisé des musiciens qui jouaient dans les mêmes salles, mais je n'ai pas vraiment fait de rencontres terribles, où j'ai halluciné. On a fait une douzaine de dates et de radios, mais on n'a pas eu le temps de faire des rencontres magiques. J'ai joué dans la même salle que Bootsie Collins, mais on ne l'a pas rencontré, on a du partir avant.

Le titre de ton album, Temperamental, qu'est-ce qu'il signifie ?

Don Cavalli : Je trouvais que ça sonnait bien pour un titre d'album, limite français. Et puis en fait Temperamental, ça veut dire fantasque, capricieux, c'est un peu la vie, mais c'est aussi un peu moi. Cela résume la vie, comment sont les gens, le chaos de tous les jours.

Sur l'album il y a deux duos, le premier avec Zhan Xiao Li.

Don Cavalli : Ecoute, j'aime bien la musique chinoise, ça m'inspire. Depuis des années j'entends des sons chinois dans ma tête, ce n'est pas la première chanson que je fais avec des sonorités asiatiques. Cela faisait longtemps que je voulais faire quelque chose avec une chanteuse chinoise, et c'est assez dur à trouver. C'est le producteur du disque qui l'a trouvée, elle débarquait de Pékin le jour où on a fait l'enregistrement. J'avais déjà écrit la chansons en anglais et je voulais une partie en chinois avec la même mélodie, je lui ai passé la chanson en lui demandant d'écrire un truc nostalgique, une histoire d'amour impossible et elle a trouvé ces paroles. Maintenant, j'ai une batteuse japonaise sur scène qui chante la chanson, mais en japonais. Elle a réécrit les paroles, et ça ne sonne pas pareil.

Qui sont les personnes qui t'accompagnent sur scène ?

Don Cavalli : Vincent Talpaert, c'est lui qui a produit Temperamental et Cryland. Emiko, batteuse et Stéphane à la seconde guitare.

Depuis combien de temps travailles-tu avec Vincent Talpaert ?

Don Cavalli : Avec Vincent ça fait des années que je le connais, Emiko depuis pas longtemps, depuis que j'ai commencé les concerts avec cet album.

Il y aussi une participation avec Rosemary de Moriarty, qui multiplie les projets depuis quelques temps.

Don Cavalli : Il faut dire qu'elle est super aussi. Vincent est batteur de Moriarty et c'est lui qui a produit leur dernier disque. Il leur a fait écouter ce que je faisais, ils ont bien aimé. Ils m'ont invité aux Francofolies de La Rochelle et j'ai fait leur première partie. J'avais écrit cette chanson qui était destinée à être chantée à deux, avec une femme, et j'ai tout naturellement demandé à Rosemary.

Il y a quelque chose de frappant dans ta musique, c'est une temporalité forte, un mélange de "Old School" et de modernité, comment définirais-tu ça ?

Don Cavalli : J'ai toujours écouté de la musique "ancienne" que ce soit le rock 'n' roll, la country, le blues, du reggae, je suis assez traditionnel dans ma musique. J'e nai pas envie qu'on me dise tu fais du blues point. Je n'ai pas non plus envie de faire les solos interminables que d'autres font mieux que moi, donc j'essaie de faire mon truc qui est plus une ambiance, un feeling.

J'aime bien les sons modernes, j'écoute de la musique ancienne, mais je suis assez varié. Je n'ai pas peur de mettre des boîtes à rythme, d'essayer des trucs. C'est un feeling et il n'y a pas de limites. Un bon beat de hip-hop, c'est mortel, tu peux faire n'importe quoi dessus, après c'est une question d'habillage. Si t'as une bonne chanson, avec une mélodie, un riff sympa qui va retenir ton oreille, tu peux l'habiller de pleins de façons. Par exemple, les titres qu'on a fait sur l'album, on les a travaillés à deux, en acoustique. Tu viens nous voir en concert, il y a deux guitares, on va rajouter des boîtes à rythme, des fuzz, de l'écho.

Des gens qui m'ont connu dans le milieu underground n'aiment pas forcément ce que je fais maintenant, mais la musique est infinie, il faut s'amuser, je n'ai pas envie de refaire à chaque fois le même disque. Il faut se renouveler et il ne faut pas avoir peur de sortir de ses propres clichés, trouver d'autres idées et se surprendre soi-même.

Une chose qui est très importante, c'est ta voix. Elle évolue au cours des disques, la façon que tu as de la placer, tu fais un travail particulier ?

Don Cavalli : Non, c'est un don de Dieu (rires). Cela se travaille au fur et à mesure que j'écris des chansons, ou que je fais des concerts, je ne chante plus comme quand j'avais 20 ans. Mais c'est naturel, je ne travaille pas particulièrement, je ne fais pas de vocalises.

Pour les novices du blues, quelles seraient tes portes d'entrée, les incontournables de ce genre ?

Don Cavalli : Les classiques, John Lee Hooker, Robert Johnson ou Lightning Hopkins c'est pas mal, il faut écouter les bons musiciens du terroir. Même si c'est plus rock 'n' roll, j'adore Bo Diddley. J'écoute beaucoup de soul et je dirais aussi James Brown, Otis Redding il y a quand même du blues dans sa musique. J'adore la country, pour moi il y a un lien avec le blues, ce sont les couleurs qui changent, et là je citerais Bill Monroe, le créateur du bluegrass. Il faisait de la musique des montagnes avec banjo, mandoline, et c'est aussi très blues aussi. Ce sont des blancs, mais c'est le feeling blues.

Iggy Pop disait que la musique qu'il écoutait quand il était jeune était le blues, il citait entre autre Robert Johnson avec d'autres bluesmen et le Velvet Underground comme influence dans la musique des Stooges.

Don Cavalli : Ben oui, je ne sais pas quel âge il a, cet homme là...

Soixante-cinq environ.

Don Cavalli : Ah ben voilà, il a été jeune dans les années cinquante, soixante ce sont des trucs qu'il a écoutés forcément. Il n'allait pas refaire Elvis ou Gene Vincent, il s'est adapté à son époque. Je crois que j'avais entendu qu'il adorait Little Richards, moi aussi j'adore. Pourtant, Iggy Pop ce n'est pas trop mon truc, mais tu vois on pourrait discuter.

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