Seul en scène écrit par Mireille Roussel et Ricardo Munoz interprété par Mireille Roussel dans une mise en scène de Ricardo Munoz.
A partir d'un thésaurus autobiographique, la comédienne Mireille Roussel a écrit un remarquable et épatant seul en scène en collaboration avec le cinéaste Ricardo Munoz qui signe en l'espèce sa première mise en scène de théâtre.
Même si "Majorette !" comporte une galerie de portraits, des soliloques et des fragments narratifs, ce n'est ni un one woman show, ni un monologue, ni un récit, mais une véritable partition dramatique pour une comédienne qui syncrétise non seulement plusieurs genres théâtraux mais également différents registres émotionnels fédérés autour d'une histoire autofictionnelle.
"J'ai 12 ans, pas de seins et je suis majorette". Ainsi se présente Viviane, une fillette pré-adolescente à une époque charnière de sa vie quand elle est totalement investie dans son activité de majorette au sein du groupe "Les saphirs" créé par Marie-Do, une ex-danseuse "retraitée" de retour au pays.
Pendant féminin du foot pour les garçons et figure de l'iconographie de la France profonde, la majorette, qui compte parmi les acteurs principaux des fêtes communales souvent sujet de raillerie des urbains en villégiature, est devenue son viatique pour se construire avec les moyens du bord et ouvrir un horizon perçu comme étroit au sein d'une famille modeste et d'un village ardéchois.
En quête identitaire, elle découvre, à travers cette activité, la fibre artistique, le goût du travail bien fait et de l'effort pour que "le show must go on", l'indispensable esprit d'équipe mais aussi l'esprit de compétition et l'ambition, et élabore son premier projet de vie, lié au désir tant d'être, et être différente, que de reconnaissance, qui comporte une part de rêve, celui de devenir la capitaine des majorettes.
Tout, de l'intime à la peinture sociale, est traité dans un cadre dramaturgique par le regard d'une fillette qui fait déjà preuve d'une certaine maturité, même si subsiste une part de la candeur de l'enfance, qui comporte des moments d'émotion quand elle traite de l'intime, de poésie quand elle transcende la prosaïque réalité, d'humour avec une pointe d'autodérision quand elle narre la préparation au défilé et de cocasserie quand elle croque ses copines du bataillon.
Sur scène, dans un décor de salle de gymnase, avec la part des lumières de Sébastien Michaud également concepteur de la scénographie, et sous la direction de Ricardo Munoz qui soutient brillamment la composition dramatique en restituant toutes ses couleurs, Mireille Roussel est époustouflante et transporte totalement le spectateur en l'immergeant dans l'univers de la fillette.
Elle ne travestit ni sa voix ni son corps pour incarner non pas tant la petite fille qu'elle fût, même si l'émotion qui tient au travail sur le vivant est souvent perceptible, que le personnage qu'elle a inspiré. Un jeu rigoureux qui n'exclut ni l'éloquence sensible ni les nuances et qui témoigne d'une parfaite maîtrise de son art. |