Fin de journée, il était grand temps de sortir du boulot, échanger costard-cravate pour un jeans-Converse, et de filer au Zénith de Lille pour un retour en pleine adolescence dans les Paradis Artificiels. Au programme ? Un véritable plongeon dans les années collèges-lycée, là où seul comptait vraiment de s’intégrer dans un groupe, de préférence le plus cool possible. Ce soir, on a devant nous trois propositions, trois clans face auxquels on a tous été confrontés au moins une fois dans notre jeunesse.
Les premiers, ce sont les plus simples à aborder : les geeks. Certes, ils font peur à première vue, avec une grosse barbe, une grosse paire de binocles ou encore une chemise aux motifs douteux de homards (sérieusement, mis à part pour un bavoir de restau de paëlla, ce tissu devrait être interdit). On voit d’ailleurs qu’ils ne sont pas toujours à l’aise, à vouloir être cool comme les autres : ils ne savent pas trop comment s’imposer, leurs danses sont carrément ridicules, et spontanément on n’a qu’une envie, se moquer d’eux jusqu’à la fin de l’année. Mais si on s’arrêtait là, ça serait tomber en plein dans le préjugé. En prenant bien soin de les étudier, on réalise à quel point ça peut être sympa, de traîner avec eux : après tout, ils ont vraiment l’air de s’éclater ! Alors malgré l’hésitation de la découverte, on se surprend être entrainé dans leur délire et à dépasser la peur du ridicule en battant le rythme, et en s’étonnant d’aimer leur genre. Et vous savez pourquoi ? Parce qu’ils s’y donnent à fond. On est geek, on l’assume, et on le cultive. Et c’est cette intégrité qui fonctionne : The Bewitched Hands, pari osé mais réussi.
Si vous n’arrivez pas à dépasser le cliché des premiers de la classe, vous pourrez toujours vous tourner vers Fun. Entre le chanteur (croisement de Mark Walhberg et Kevin Bacon), et le trompettiste/claviériste (qui se donne un genre de Ryan Gosling), il ne reste pas grand place pour les autres : peu importe, ce sont eux les meneurs, qui remplissent tout l’espace. D’ailleurs, ils portent aussi des chemises à motifs, mais chez eux c’est tendance : la différence entre geek et hipster, probablement. Nate, lui, vend du rêve : le dragueur tout feu tout flamme qui cumule les clichés du genre pour plaire au maximum de monde. Les clins d’œil aux minettes, la mèche rebelle qu’il balaie toutes les trente secondes, les sauts dans tous les sens pour attirer les regards, et les appels à la foule pour suivre ses refrains. On a même droit à une reprise des Rolling Stones en fin de concert : ça a l’air de marcher, au vu de toutes les filles amourachées… Mais on n’est pas vraiment dupes ; passée la grande gueule, il ne reste pas grand chose. Un peu comme quelqu’un qui ne fait que radoter sans cesse les mêmes exploits, on s’en lasse rapidement, et trop vite on ne supporte plus de les entendre. C’est lisse, c’est plat, c’est complètement uniforme : Fun ne l’est pas tant que ça, au final. Pas convaincus par la poudre aux yeux, on préfère se tourner ceux qui n’essaient pas aussi fort, la dernière option de la soirée.
Eux, ce sont les mystérieux, les sombres torturés. Archive, tout vêtu de noir, mais avec classe attention : la chemise cravate cheveux longs gominés, ça ne va qu’à un seul type d’homme, mais ça leur va si bien. Et il y a Holly… Lèvres rouges, cheveux jusqu’à la taille, juste la touche de féminité qu’il faut dans cette bande de mecs parfaits. Archive, ce sont les redoublants sympas qui nous feront fumer un premier joint, qui nous feront sécher les cours, et qui nous laisseront le temps d’une heure prendre l’envolée avec eux. On a le droit à de bons vieux classiques toujours efficaces : "Finding it so hard", ou encore la belle surprise de "Fuck U. System" et "Sit back down" font la transition vers la nouveauté, j’ai nommé l’album With Us Until You’re Dead. On est intégré, on est accepté, on se sent bien et tant pis si on adopte l’air mélancolique, cigarette à la main à regarder au loin : c’est là le cliché auquel on veut s’identifier. Enfin, on se sent cool. Là où les précédents groupes nous laissaient juste battre du pied ou applaudir, Archive nous décrochera la tête, nous entraînera dans la dance, et nous fera lâcher prise. C’est eux qui, sans aucun doute, nous laisseront les plus beaux souvenirs.
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