The
Dillinger Escape Plan ? Attention ! Barjots en vue. A lire
absolument, cet entretien avec Benjamin Weinman,
le guitariste du groupe de hardcore technique le plus barré
de la terre !
Tout d’abord, merci de répondre à
mes questions juste après le show. Réactions à
chaud ?
Benjamin Weinman (guitare) : C’était
excellent! C’était vraiment cool. C’est toujours
dur de savoir comment on va jouer, chaque fois c’est imprévisible.
Quand on vient en Europe, à Paris, en Italie, on n’a
aucune idée de l’accès que les gens ont ici
à notre musique....(interrompu par Yvonne du label Relapse
venu lui faire signer des photos, on entend en fond sonore les mecs
de Poison The Well faire les cons dans le couloir.)
"Calculating Infinity" est sorti en
1999, nous sommes aujourd’hui en 2004. Pourquoi avoir attendu
5 ans avant de refaire un album ?
Benjamin Weinman : Il y a plusieurs raisons. Probablement
la raison n°1 c’était le changement de membre dans
le groupe. Presque tous les membres exceptés moi et le batteur
Chris (Pennie), ont été remplacés au moins
une fois, notre chanteur inclus. Chaque fois qu’il y a de
nouveaux membres dans un groupe, il faut d’abord régresser
la créativité du groupe, puisqu’il faut retourner
aux bases, et rattraper ce que le groupe a fait depuis plusieurs
années.
Il y a aussi le fait de ne pas être sur
un grand Label, de ne pas avoir de bonnes capacités de marketing,
de promotion. Le peu d’argent qui est misée sur nous
fait que nos albums sont difficiles à trouver, notre distribution
est assez basse, même aux Etats Unis ! On a donc pris 5 ans
pour nous sentir assez "exposés"et que les gens
soient prêts à nous recevoir. Il y a même des
gens qui me disent régulièrement avoir finalement
compris "Calculating Infinity". Il nous a pris tout ce
temps pour sentir que c’était le moment de sortir du
nouveau. Le linup est plus stable, maintenant on sent qu’on
peut être beaucoup plus prolifique.
"Miss Machine" semble plus diversifié
que "Calculating Infinity". Ce changement était
intentionnel ou naturel ?
Benjamin Weinman : Les deux en fait.
Votre expérience avec Mike Patton sur l’EP
"Irony is a dead scene", semble avoir été
importante.
Benjamin Weinman : Pas vraiment, beaucoup de gens
nous disent ça, mais pas tant que ça en fait. Travailler
avec Mike Patton a peut être habitué les gens à
entendre de la diversité chez Dillinger, des mélodies
et des plans vocaux différents dans notre style de musique.
Travailler avec Mike Patton à peut être plus développé
l’étendue de nos fans. Les chansons qu’on a écrites
pour l’EP ("Irony is a Dead Scene") était
à l’origine des chansons pour un album de Dillinger,
et c’était avant qu’on décide de faire
l’EP. On avait déjà réussit ce qu’on
voulait réussir avec "C.I", c’est, je suppose,
la raison de l’évolution de notre musique. Le côté
intentionnel c’était…(il réfléchit)
Peu de groupes ayant seulement un album à leur actif ont
la vision et les attentes qu’on avait du groupe.
A cause du temps qu’on a pris, beaucoup de
gens avait une idée de ce à quoi allait ressembler
l’album. Afin de devenir un groupe avec assez de liberté
artistique pour pouvoir faire toujours ce qu’on veut et réussir
que notre public attende l’inattendu, il nous fallait suivre
ce qu’on avait envie de faire malgré les attentes de
nos fans. Quand on a commencé le groupe nous n’avions
aucune attente, nous avons fait un groupe pour faire la musique
qu’on voulait entendre, on n’avait aucune "fanbase",
personne ne nous connaissait, donc il n’y avait aucune pression.
On voulait recréer cette ambiance, oublier tout le monde
et écrire les chansons qu’on voulions écrire,
tu vois !
La voix de votre "nouveau"
chanteur (ndrl :il est dans le groupe depuis 4 ans mais chante
pour la 1ère fois sur l’album qui vient de sortir "Miss
Machine"), Greg, y est pour beaucoup dans cette évolution.
Comment s’est fait son arrivée dans le groupe ?
Benjamin Weinman : Quand on cherchait un nouveau
chanteur, on a fait l’EP avec Mike Patton, mais on ne l’a
pas considéré comme un chanteur à temps complet
puisqu’il est dans tellement de projets ( Mr Bungle, Fantomas,
Tomahawk…), et on ne voulait pas être perçu comme
un side project par rapport à lui. On est un groupe à
temps complet, donc on avait besoin de quelqu’un d’hétérogène,
qui puisse ramener ce qu’on faisait avec Dimitri (Minakakis)
et du nouveau pour nous permettre de mûrir. Donc on a fait
une espèce d’audition à travers notre site web.
On a mis en MP3 une chanson sans la voix ("43% burnt"
»), et les gens devaient donc le télécharger,
chanter dessus et nous le renvoyer.
On a reçu quelques K7, CD et trucs comme
ça, et le sien (Greg Putiato) (il habitait à 3h30
de chez nous!) était très impressionnant. Il a refait
la chanson exactement comme l’aurait fait notre ancien chanteur,
et il a fait une deuxième version avec plusieurs voix. On
a vu qu’il pouvait refaire nos vieilles chansons et en même
temps on avait besoin d’être plus divers pour le futur,
et il nous a montré qu’il pouvait faire cela. 2 semaines
après avoir envoyé l’enregistrement il a fait
son premier concert avec nous.
Il est arrivé à la fin de l’enregistrement
d’ "Irony is a dead scene", tu crois que c’était
frustrant pour lui de chanter, pendant 4 ans, des chansons écrites
par d’autres?
Benjamin Weinman : Je crois que puisque à
la base il était fan de Dillinger, au début c’était
juste "fun" de pouvoir chanter les chansons qu’il
écoutait en tant que fan et qu’il aimait. Evidemment
après un moment, il voulait chanter ses propres trucs. Maintenant
il peut incorporer ses chansons à la musique qu’on
joue live et ça doit être un beau mélange pour
lui puisqu’il aime toujours les vieux morceaux. Il peut mieux
s’exprimer à travers la musique dont il fait partie.
Peux-tu nous parler du rôle de Greg dans
la composition de l’album ?
Benjamin Weinman : C’était intéressant
car je me mêle beaucoup de l’aspect de composition.
Dans nos autres albums, notre chanteur ne faisait pas trop partie
des compos, donc on travaillait ensemble, j’essayais de le
guider tout au long du processus créatif. Greg est beaucoup
plus à l’aise avec les rythmes, c’est plus un
musicien, il jouait de la guitare avant donc ça l’a
beaucoup aidé.
Au début, il n’avait pas trop de notions
sur comment mettre des voix dures sur ce genre de musique, et la
j’ai joué une partie importante. Mais une fois qu’il
s’est accoutumé, il a gagné en autonomie et
c’était vraiment cool, c’était comme travailler
avec Mike Patton. C’était la première collaboration
dans laquelle quelqu’un me comprenait en termes de bon développement
pour une chanson, et qui ensuite en améliorait ma vision.
C’est la collaboration ultime ! C’est cette combinaison
d’aspects inédits qui améliore le travail. Donc
Greg a fait beaucoup plus partie du processus de voix et de création
que les anciens chanteurs.
Votre musique est très personnelle et originale.
Elle ne ressemble à rien d’autre de ce qui peut se
faire. Comment l’idée de faire une telle musique est-elle
née?
Benjamin Weinman : Le comportement du jazz a joué
un grand rôle ainsi que toute la façon de penser du
jazz-man. Il n’y a pas vraiment eu une sérieuse évolution
de musique depuis que le jazz est arrivé. Quand le jazz est
sorti c’était la musique du diable ! C’était
vraiment anti-autorité, c’était tout sauf "mainstream",
il a brisé toutes les règles. On est certainement
influencé par ce comportement : briser les règles,
ne pas avoir de frontières, et essayer de nouveaux trucs.
Les idées contenues dans le jazz ont vraiment eu une influence
sur nos compos, même si on ne joue pas ce style de musique.
On voulait vraiment composer une musique originale, qu’on
voulait écouter mais qu’on ne pouvait pas trouver ailleurs.
On n’avait pas d’intentions de devenir un groupe reconnu.
Ce style de musique (le hardcore) est encore très
marginale içi en France. Quand est-il aus U.S.A?
Benjamin Weinman : Je pense que toute musique
qui sort aux Etats-Unis s’adapte plus rapidement aux Etats Unis,
simplement du fait qu’elle sort plus tôt là-bas.
La musique américaine en général, prend sûrement
plus de temps à se développer dans le monde pour cette
raison. On est sûrement un groupe qui est plus reconnut aux
Etats Unis que n’importe où ailleurs, mais on est assez reconnut
dans les grandes villes du monde aussi. Je crois qu’internet
joue un énorme rôlea au niveau de la communication
entre les gens et donc aussi dans la diffusion de la musique.
Les 6 derniers mois, vous avez joué 4 fois
en France (Fury Fest, les Eurockéennes, la Loco et ce soir).
S’agit-il d’une appréciation particulière
pour le public français ou d’un hasard ?
Benjamin Weinman : La France est un pays où
les gens ont progressivement commencé à apprécier
notre groupe. Les premières fois qu’on est venu içi,
les gens nous regardaient comme un monstre à 10 têtes!
Ce soir il y a eu une très bonne réaction, pareil
pour la dernière fois à Paris et au Fury Fest aussi.
Notre but c’est vraiment de devenir un groupe global, notre
musique est faite pour tous, on n’a pas d’audience préférée,
on s’en fout ! On est assez égoïste, on est nous
mêmes en dehors de ça Si quelqu’un veut faire-part
de notre musique, c’est un plus, c’est cool.
Qu’avez vous pensé du Fury Fest ?
Benjamin Weinman : C’était excellent.
On a joué dans plusieurs festivals en Europe en général
et en Grande Bretagne, et l’ambiance est très différente
qu’aux Etats-Unis. Aux Etats Unis on n’a pas vraiment le même
type de festivals qu’ici. Le Fury Fest était le festival
le plus underground auquel on est participé en Europe. On
avait vraiment l’impression que c’était les gens
qui aimaient la musique qui avaient organisé l’évènement.
C’était différent des autres festivals qui sont
très diversifiés, où se mélange différents
styles, donc dans un sens c’était cool de pouvoir connaître
la communauté underground française et l’événement
qui s’ensuivit.
Peux-tu m’expliquer ce qui c’est passé
au festival Reading ?
Benjamin Weinman : Tu veux dire l’incident
avec "la merde" (en français)? (Greg Puciato s’est
"soulagé" sur scène procédant par
la suite au jeté d’excrément sur le public anglais,
lequel lui a renvoyé son présent que Greg s’est
allégrement étalé sur le tee-shirt avant de
slammer sur les 1ers rangs). On jouait sur la mainstage avec des
groupes comme The Offspring, Puddle of mudd ou Slipknot…Ce
sont des groupes qui ont tous vendu plus d’1 million d’albums,
c’était vraiment bizarre pour nous. Ils débarquent
sur scène avec leur lumières, leurs uniformes…
Je suppose que c’était plutôt
une prise de position, une déclaration qu’il n’y
a pas vraiment d’intégrité artistique chez ces
groupes, je crois connaître le business assez bien. Notre
chanteur chie sur scène et dit "c’est un exemple
de ce que vous allez voir aujourd’hui sur cette scène
". C’était un moyen d’attirer l’attention
sur ce qu’on faisait, mais aussi une façon de dire
que nous ne sommes pas comme tous ces groupes. On s’est développé
différemment, on joue depuis 5 ans, on ne gagne pas d’argent,
on le fait pour l’amour de la musique, pour le meilleur ou
pour le pire. Je n’ai rien contre ces groupes, mais je veux
être honnête sur ce que je pense de leur musique.
J’ai lu quelque part que vous préfériez
prendre avec vous en tournée des groupes qui ne joue dans
un registre violent Pourquoi être venu en Europe avec Poison
The Well alors ?
Benjamin Weinman : D’une part on est ami
avec ces mecs, on a fait un tour aux Etats Unis avec eux, on sait
qu’ils font quelque chose de diffèrent. Quand j’était
petit je n’aimais pas aller à des shows où tous
les groupes se ressemblaient. On voulait donner de la diversité
aux concerts et on sait qu’on pouvait voyager avec eux pendant
un mois et demi!
Vous préférez jouer avec des groupes
comme The Icarus Line, avec qui vous avez tourné, par exemple?
Benjamin Weinman : On les connaît depuis
un moment aussi, c’est une autre situation.
Donc toi et Chris,vous êtes les seuls membres
restant du linup original. Tu sais ce que sont font les ex-membres
aujourd’hui?
Benjamin Weinman : Bien sur. Dimitri (Minakakis),
notre ancien chanteur, est un grand ami. Il s’est marié
avec quelqu’un qu’il a connut pendant les tournées.
Il travaille dans le graphisme, il crée. Notre ancien guitariste,
John Folton, fait de la programmation sur ordinateurs. Quand le
groupe a commencé à marcher, il a décidé
qu’il ne voulait pas poursuivre sérieusement le groupe,
il a préféré s’établir plus sérieusement
dans un job de programmateur. Nous on est des gosses, eux ils ont
préférés suivre la voie "adulte".
Adam (Doll), notre ancien bassiste a eu un accident
de voiture, il est paralysé donc il ne peut plus jouer. Il
est un de mes meilleurs amis, il fait encore partie du groupe. Il
est retourné aux études et il nous aide dans le business.
On avait un autre bassiste, Jeff Wood, il jouait dans M.O.D. On
lui a tiré une balle dans la tète ! (rire nerveux)
Maintenant il est juste bizarre. Il se balade et il fait des groupes
marrants ( SHAT !!) .
Ce soir, vous avez un nouveau guitariste. C’est
juste pour cette tournée ?
Benjamin Weinman : Oui, c’est un remplaçant.
Brian (Benoit) est encore notre guitariste, mais il a eu un accident
au bras, il a du se faire opérer. Mais il sera de retour
dans peu de temps rassure-toi.
Ok, merci à toi et bonne chance pour la
suite de la tournée.
Benjamin Weinman : Merci à toi.
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