Comédie de Gabor Rassov, mise en scène de Pierre Pradinas, avec Romane Bohringer, Thierry Gimenez, Matthieu Rozé, Bruno Salomone et Warren Zavatta.
Pour sa famille de théâtre, entendez celle fédérée par le metteur en scène Pierre Pradinas et qui sévit avec succès sur les planches depuis une décennie, le comédien, scénariste et auteur dramatique Gabor Rassov a pris la plume pour écrire du "sur mesure" qui revisite sur le mode de la parodie un genre théâtral passé de mode, celui du mélodrame.
Pour cet exercice plus difficile au demeurant qu'il n'y paraît, le mélodrame étant déjà une variante parodique du drame, il s'arcboute sur les déclinaisons contemporaines du mélodrame que sont le sitcom et la téléréalité dont, à la mise en scène, Pierre Pradinas emprunte également les codes pour les pousser jusqu'à l'ultime caricature.
Cela aboutit à "Mélodrame(s) !", un triptyque de pièces courtes dans lequel il décline le thème de l'amour contrarié ou impossible en forçant le trait du pathétique lénifiant sans autre état d'âme que celui de divertir.
Encadrant la transposition du drame shakespearien des amants de Vérone en chinoiserie d'opérette grandguignolesque ("Jusqu'à la mort"), deux opus s'inspirent des fictions et feuilletons télévisés de série B : "Grand Prix", drame de la jalousie sur fond de course automobile pollué par le matraquage publicitaire, et "La rédemption d'Oncle Bill", épinglant la trivialité de l'American way of life surlignée de rires enregistrés.
Côté mise en scène, Pierre Pradinas laisse donc libre cours à une fantaisie débridée qui guide les comédiens à user des effets comiques les plus appuyés car c'est essentiellement sur leur potentiel comique que repose le succès de l'entreprise.
Sur scène, deux nouveaux venus dans la famille : Warren Zavatta qui joue le bateleur pour assurer l'annonce et les intermèdes des trois opus présentés comme concourrant au Festival International du Mélodrame et Bruno Salomone, investi du rôle du jeune premier qu'il campe à merveille qu'il soit pilote de course bellâtre imbu de son statut de champion, "Petit scarabé" ou fils rasta d'un couple de la bourgeoisie afro-américaine.
Et puis, du noyau dur de la famille, un trio de choc toujours très attendu qui ne fait pas dans la dentelle mais avec un second degré et un sens de l'autodérision jubilatoires.
A Thierry Gimenez est dévolu le rôle du méchant, mari criminel, père intraitable et oncle incestueux, rôles dont il se délecte avec des mines gourmandes de raminagrobis.
Qu'il soit homosexuel honteu, travesti en épouse chinoise ou en afro-américain de l'establishment étasunien, Matthieu Rozé est désopilant.
Quant à Romane Bohringer, successivement bimbo platinée, pucelle du pays du soleil couchant ou pauvre petite fille riche, elle joue à fond la carte de la caricature des stéréotypes féminins.
Souvent en interactivité avec le public, la troupe transmet son évident plaisir du jeu et le spectacle ravira les amateurs du genre. |