Monologue dramatique d'après l'oeuvre de Joseph Delteil interprété par Juliette Rizoud dans une mise en scène de Christian Schiaretti.
Christian Schiaretti reprend, plus de quinze ans après sa création dans le Off du Festival d'Avignon 1996, "La Jeanne", adaptation théâtrale du texte de Joseph Delteil consacré à Jeanne d'Arc qui, en son temps, fit l'objet d'un scandale tant littéraire que religieux.
En effet, en 1925, cinq ans après la canonisation de Jeanne d'Arc qui était déjà érigée en intouchable figure catholique et patriotique, le jeune écrivain et poète s'affranchit de l'histoire officielle et du dogme pour livrer une approche pour le moins novatrice de la vie de sainte, assortie en sus de fantaisies anachroniques, en substituant la biographie passionnée à l'hagiographie sulpicienne, le mythe à la légende et l'humain au surnaturel.
Sa Jeanne "laïcisée" est une terrienne, une jeune femme ancrée dans sa nature de femm comme dans sa terre de France, une épicurienne qui apprécie les plaisirs des sens et de la vie, et, surtout, un personnage du quotidien et néanmoins hors norme, car héroïque, guidé par un sens profond de la foi et de l'engagement.
Près d'un siècle plus tard, son caractère iconoclaste ressortit à l'anecdotique et demeure un texte qui transfère le genre religieux dans le champ littéraire et que Christian Schiaretti transpose sur scène avec une belle liberté.
Sous l'égide discrète en fond de scène du visage de Renée Jeanne Falconetti, inscrit dans la mémoire cinéphilique par son incarnation dans "La Passion de Jeanne d'Arc" de Carl Theodor Dreyer, le spectacle est placé sous le parti-pris scénique de l'illustration tautologique en doublant le récit monologal d'une pantomime, chaque élément narratif étant matérialisé par des objets détournés.
Car Christian Schiaretti, assisté de Samuel Poncet, livre également un spectacle d'accessoiriste ingénieux.
En effet, l'histoire de Jeanne est racontée par une technicienne de surface, qui investit les coulisses techniques d'un théâtre et, s'appropriant à la manière d'une comédienne la personne de Jeanne d'Arc devenu personnage, va utiliser tous les objets qu'elle détourne avec une imagination débridée pour scénariser son récit.
Juliette Rizoud, qui prend la suite de la créatrice du rôle Camille Grandville dont le nom figure au générique créditée au titre de l'oeuvre scénique, porte avec conviction et un élan empathique un texte soutenu par un lyrisme fougueux qui ne s'interdit pas des incursions dans le prosaïque.
Pétulante, volubile et généreuse dans son jeu, elle fait les délices du public qui aspire à retrouver son âme d'enfant auquel on raconte de belles histoires. |