"Well you love touching cocks…!"
C’est l’esprit ailleurs que je me ballade en front de mer entre St Brillac et St Lunaire. Les souvenirs des concerts de la veille (surtout ceux de Slowdive, Portishead et Liars) restent présents. Que nous réserve cette dernière journée ? Hé bien pas grand-chose… enfin pas vraiment grand-chose. Et elle commencera et se finira de la même manière : par une claque avec les concerts de Perfect Pussy et Cheveu. Entre les deux, il y a à boire et à manger, du bon, du moins bon et de l’anecdotique, mais pas le grand frisson. Les deux jours précédents ont laissé des traces…
C’est donc à Perfect Pussy que revient d’ouvrir le bal. Le groupe originaire de Syracuse dans l’état de New-York porte son rock hardcore comme un étendard. Ils jouent fort, vite et se donnent entièrement et sans compromission pour leur musique. Ne t’étonne pas alors si le concert ne dure que vingt minutes… C’est sympa, ça mélange punk et noise. Meredith Graves tout en tatouages, poils et micro-robe, riot girl des temps modernes est une vraie meneuse. Un concert de vingt minutes donc, le temps parfait pour apprécier le groupe ,plus n’aurait pas servi à grand-chose…
Le temps de se retourner et de regarder vers la grande scène et l’on s’aperçoit de la foule (et les très nombreux fans venus spécialement pour lui, banderoles à la main) qui attend Mac DeMarco. C’est le coup de génie des organisateurs : le programmer aussi tôt a ramené presque tous les festivaliers avant le début de la soirée. Il faut avouer que Mac DeMarco avec ces trois disques (mais surtout deux et Salad Days) et sa pop lo-fi cool et débonnaire est devenu l’un des chouchous du public indé. A peine réveillé selon son propre aveu (il enchaîne les festivals), le canadien arrive sur scène le sourire aux lèvres, clope au bec, bière à la main, casquette Viceroy et t-shirt des Simpsons (la panoplie du parfait slacker).
Le concert est à l’image de ce que l’on attendait, les tubes ("Salad days", "Blue Boy", "Cooking Up Something Good", "Let Her Go", "Ode to Viceroy", "Chamber Of Reflection" ou "Still Together"…) s’enchaînent avec une certaine indolence. Sur scène ça deconne sec (la reprise saccagée de "Yellow" de Coldplay pendant un changement de cordes), mais cela joue bien et derrière le côté branleur du truc se cache quelque chose de plus sérieux. Mac DeMarco finira le concert yeux mis clos pendant un très long slam, appréciant sûrement les mains de tous ces gens qui aiment sa musique. On comprend que cette attitude tellement outrageusement à la cool puisse porter à questionnement quant à sa sincérité et on se demande si le bonhomme n’est pas arrivé déjà au bout d’un truc mais là tout suite, on apprécie pleinement.
Plus en tout cas que le show de Baxter Dury et de son flegme un rien ennuyeux. C’est sympa, mais ça ne casse pas des briques (ce qui est, en passant, en train d’arriver à sa discographie…).
On se dit que tout cela passerait peut-être mieux dans une salle plus petite et que les compositions du bonhomme sont de moins en moins intéressantes.
Alors j’avoue que pour passer le temps, je préfère regarder la plastique très agréable de la chanteuse (que je vous recommande vivement au passage), Marie-Flore faisant partie du backing band…
Toy se révélera tout aussi ennuyeux. Malgré un début plutôt bon, le shoegaze / Krautrock psychédélique du quintette de Brighton est rapidement noyé dans une sorte de mélasse sonore vite insupportable. On zappe.
Nous attendons donc avec impatience, comme il semble une bonne partie du public, le début du concert des jeunes (mais qu’est-ce qu’ils sont jeunes !) Anglais de Temples. Si leur musique n’invente pas grand-chose, elle ressuscite la pop psychédélique (Beatles, Byrds, T-Rex) non sans un véritable brio. Si sur disque les mélodies sont assez enivrantes, la réputation du groupe sur scène est assez mitigée. Malheureusement, dès "Sun Structure", on sent que le concert ne va pas aller dans la bonne direction. Le groupe joue sans conviction, leur musique très soignée au demeurant ne prend aucune ampleur et le public est aux abonnés absents.
"A question Isn’t Answered" (fleurant la neurasthénie) et "Prisms" ne font que confirmer cette impression. Peut-être un poil trop jeune et trop soucieux de vouloir restituer les chansons dans la production d’origine, les Temples sont incapables de redresser vraiment la barre. C’est triste car on sait que ces chansons valent plus que cela, plus que cette prestation gentiment ennuyeuse. Bref, nous préférons quitter le navire pendant "Move With The Season" et attendre le concert de Cheveu de l’autre côté.
Une ambiance assez étrange règne sur le site. Sans vouloir jouer la sainte nitouche, on croise un nombre incroyable de personnes, jeunes souvent, dans des états pas croyables. Pas foncièrement festif, plutôt dépressif. Combien de personnes vous bousculent pour fendre la foule pour être aux premiers rangs pour repartir deux minutes plus tard ? C’est le lot de tous les concerts, me direz-vous… Combien de personnes sont venues me demander de la cocaïne ou de la mda, me proposant même un règlement en nature ? Combien de corps allongés ont servi de tremplins pendant les concerts ? Une armée de walking dead venue plus pour se défoncer que pour la musique.
Donc après Temples, c’est au tour de Cheveu de jouer. Et là pour le coup, nous n’avons pas été déçus. Le groupe Français nous a offert un concert dantesque, brûlant et explosif. Un set diabolique, sans aucun temps mort, totalement déjanté. Plus sèche et violente encore que sur leur dernier et absolument génial album BUM, la musique est assénée avec une violence crue mais jubilatoire. David Lemoine (chant et claviers) est absolument dingue mais Olivier Demeaux et Etienne Nicolas le sont aussi. C’est drôle et vulgaire, tonitruant mais intelligent. Le public est en liesse, en transe même. Les bières volent, les corps s’entrechoquent. C’est le concert idéal pour terminer le festival…
En rentrant sur la route, j’écoute le nouvel album de DadRocks ! : Year Of The Flesh. Sur le côté la mer, les bateaux. Je repense à ces trois jours de musique, aux concerts de Slowdive, Real Estate, Liars, Portishead ou encore Cheveu. Je me dis que la réputation de la Route du Rock n’est pas usurpée…
Ces trois jours de musique sont dédicacés à Sam et son amie, Martial, Fano et Denis, Dotsy et Mickaël, Ester, Toma, Gilles, Rod, Jasmina, Benoit, Mag et Sasha, aux deux Sébastien(s), Greg, Eric, Lara, Julien, Marie et bien sûr à David. |