Le Vent du Nord est un groupe de musique traditionnelle québécoise, utilisant violon, bandonéon mais aussi guitare ou viole électrique. Formé en 2002, chantant à quatre voix a cappella, leur carrière les a emmenés sur les cinq continents. Cette musique traditionnelle, nourrie aux racines celtes, est à la base aussi bien des albums Aion de Dead Can Dance ou Red Roses For Me des Pogues, ce qui fait que l'amateur de rock ou de musique indé peut apprécier le spectacle sans forcément savoir danser la gigue. Il se dégage de leur prestation une authenticité que nous ne prêterons jamais à une Nolwenn Leroy par exemple. De leur dernier album Tromper le temps, ils interpréteront "Le dragon de Chimay" et "Toujours amants". Les qualités vocales du groupe, la belle maîtrise des instruments, la rythmique appuyée sur les morceaux à danser et surtout la joie évidente et communicative des quatre musiciens font du Vent du Nord une très belle découverte.
C'est ensuite Philippe Brach qui entre en scène. Le jeune homme, un peu chien fou, propose un rock mâtiné de folk et de country. Cependant, la barrière de l'accent ne permet pas aux français dans la salle de comprendre son propos. Le trio est solide, Philippe Brach a une présence évidente sur scène, malheureusement on se heurte à la barrière de parler la même langue mais pas le même langage. Cette expérience du concert de Philippe Brach se révèle au final assez déroutante.
Ariane Brunet qu'on avait découvert lors de l'édition 2011 du FICG continue à creuser le sillon d'une variété pop légère, joliment arrangée avec un deuxième album sorti en 2013, Fusée. Elle a pris de l'assurance sur scène sans cependant perdre de son charme et de sa douceur. A la guitare ou au clavier, la jeune femme ose désormais travailler avec des boucles.
Elle a aussi, aux ateliers d'Astaffort, composé une chanson en duo avec Vincha. Le phrasé rap surprend mais c'est encore une fois par le charme qu'elle va chercher le public. Elle parvient même à faire taper dans les mains des spectateurs pourtant venus comme professionnels pour découvrir les nouveaux spectacles des artistes pour les distribuer au Québec ou en Europe. Ariane Brunet a réalisé sans aucun doute de la belle ouvrage.
Les "vitrines" (showcases) du jeudi se terminent avec le duo Eli et Papillon. Comme il y a une ligne claire en bande dessinée, il y a la pop claire.
Composé d'Elise Larouche et Marc Papillon (vu au clavier lors du set d'Ariane Brunet peu de temps auparavant), le duo a sorti un album jusqu'à présent et est en cours d'élaboration du second. Malheureusement, leur set se révèle inégal, tombant parfois dans la variété facile.
Pourtant, Marc Papillon peut passer du clavier, à la guitare et au violon durant un même morceau. Le multi-instrumentiste a de manière évidente une formation classique.
Quant à la voix d'Elise Larouche, elle se marie parfaitement avec les mélodies finement ouvragées. On retiendra quelques chansons qui rappellent Coeur de Pirate pour le côté léger ou Emilie Loizeau lors des chansons plus mélancoliques.
On découvre en fin d'après-midi le nouveau projet de Guillaume Beauregard. Le chanteur qui a grandi à Granby est l'ancien leader du groupe Vulgaires Machins. On devine que son projet actuel, solo, est tourné vers l'introspectif, cependant les conditions ne permettent pas d'apprécier pleinement les textes lorsqu'on les découvre pour la première fois, on attendra donc son album pour se faire une opinion un peu tranchée. Les titres interprétés ce soir s'intitulaient : "De pluie et de cendres", "Coeur Noir", "Indemne", "Trop peu trop tard", "Inévitable" et "Cadeau du ciel".
La soirée commence à 19 h30 sous le chapiteau avec Alfa Rococo. Le duo formé en 2004 par Justine Laberge et David Bussières en est à son quatrième album et a déjà quelques beaux succès dans sa besace. Le public réagit, chante, il faut dire que les mélodies sont accrocheuses, avec quelques sonorités eighties. Leur récent single "Lumière" fait réagir les spectateurs mais c'est surtout "Météore", sorti il y a trois ans, et interprété en concert avec énormément d'énergie, qui met le feu sous le chapiteau.
On enchaîne avec Andréanne A. Mallette sur la grande scène du chapiteau Desjardins. Je l'avais découvert l'année dernière lors de la finale du Festival International de la Chanson de Granby, et je n'avais pas été particulièrement séduit par cette ancienne concurrente d'une de ces innombrables émissions télévisées de concours de chansons. Mais là, en formation folk country avec un groupe uniquement féminin, les mélodies se révèlent charmantes. Son premier album Lumière vient de sortir. Sur scène, elle montre une belle aisance tout en conservant une agréable simplicité.
On quitte néanmoins le site des chapiteaux pour rejoindre l'Eglise Unie de Granby où a lieu le concert de GiedRé. À la place des bancs, des petites tables comme au cabaret. Devant les orgues, l'équipe installe tout le bordel de GiedRé : une Blanche-Neige, un disque de Joe Dassin, une capote, un canard, un bras qui vend par une fenêtre... Outre le lieu, ce qui est drôle c'est d'entendre le public qui découvre les paroles et réagit à chaud. Réceptif dans le premier rang, le public semble plus réservé vers le fond. Essentiellement composé de sexagénaires qui n'ont pas envie de rester debout sous le chapiteau et sont donc venus assister à la soirée organisée par la SACEM pour les artistes français, on s'amuse de voir certains se lever et danser sur les chansons de GiedRé.
Adaptant ses interventions au public québécois, c'est essentiellement Garou et Natacha Saint-Pierre qui en feront les frais. Mais on retiendra aussi le bon esprit qui régnait ce soir-là, Karimouche venue assister au concert de GiedRé, GiedRé en photo avec les bénévoles de la buvette avant d'aller s'asseoir avec deux jeunes fans pour regarder à son tour le concert de Karimouche. Alors oui, les Québécois ont aussi des anus et ils font aussi caca jusque dans les toilettes à l'église.
Accroché par le set de Karimouche qui débute, finalement je reste à l'église. Plantée par son guitariste deux jours avant le départ vers Montréal, c'est finalement James, l'ancien contrebassiste de Batlik et d'Askehoug qui, finalement, prend la guitare au lieu de la basse. Kosh, en beatbox humaine, complètement étonnant dans les sons qu'il produit avec sa bouche, et James se trouvent tout de suite et Karimouche peut donc faire resplendir ses chansons pleines de gouaille, de second degré et de soleil dans le début d'automne québécois.
Malheureusement, je ne vois absolument rien du concert d'Alex Nevsky. Le chanteur originaire a pourtant réalisé un très bel album, Himalaya mon amour, l'année dernière. Mais le magnétisme de Karimouche et de son groupe m'aura retenu au-delà des horaires du spectacle du Granbyen. En espérant le voir en France prochainement.
Par contre, j'assiste à l'intégralité du concert de Vincent Vallières qui a sorti son sixième album, Fabriquer l'aube, en début d'année. Le spectacle de Granby sous le grand chapiteau est le dernier de la tournée de celui qui est nominé pour quatre Félix au gala de l'Adisq 2014, dont celui de meilleur album pop, meilleur interprète masculin et meilleur spectacle d'un auteur-compositeur-interprète.
Plus rock que pop, le concert se construit avec des chansons de tous les albums du jeune homme originaire de Sherbrooke, à côté de Granby. Il raconte comment il avait écrit bien des années auparavant une de ces chansons pour se présenter, à 17 ans, au concours du Festival International de la Chanson de Granby. Souriant, en symbiose avec son groupe dont l'excellent guitariste André Papanicolaou, on pense au Stephan Eicher de la fin des années 80 pour les qualités d'écriture, l'utilisation des guitares, les thèmes abordés et même pour le timbre de voix. Il y a aussi l'énergie sur scène qui rappelle celle du suisse quand il utilisait les guitares, comme sur la tournée Louanges.
Souriant, généreux, immédiatement sympathique, Vincent Vallières donne un concert énergique, bien construit par les respirations entre les chansons, les introductions pleines d'humour. Le son trop fort et inconfortable en début de concert s'améliore au fur et à mesure que Vincent Vallières revisite son répertoire. Pour faire mentir GiedRé qui durant son spectacle disait avec humour que Granby n'était pas la ville du rock, Vincent Vallières a offert à un public très hétéroclite et qui bougeait jusque dans les derniers rangs un concert bien électrique. GiedRé aurait d'ailleurs certainement apprécié de voir s'extirper des premiers rangs une grand-mère à chapeau avançant avec son déambulateur. Vincent Vallières termine avec son tube de 2009, "S'aimer encore", chanté par le public. Très beau moment. |