Demios oneiron, le troisième album de Rroselicoeur, trio constitué par Sharl Hot Ganache, Denis Locar et Lou Flanagan, qui définit sa musique comme une alchimie de space rock et free noise, nous emmène dans le sillage du village des rêves de la mythologie grecque dont il porte le nom, ce no man's land qui sépare le monde réel de la vie consciente du monde du royaume des morts.
Avant toute chose deux précisions liminaires.
Une contre-indication : A éviter pour les amateurs de rock festif qui penseraient que Demios oneiron est le nom d'un hydromel gouleyant : c'est un album instrumental dans lequel il n'y a pas de refrain à reprendre en cœur et sur lequel il est impensable de pogoter.
Une précaution d'emploi : il ne s'agit pas de musique d'ambiance ni d'easy listening à écouter d'une oreille distraite en répondant à ses mails tout en étant scotché à son portable et peaufinant sa dernière stratégie pour Soldier of fortune !
Musique introspective qui entre-baille des portes laissant à l'imaginaire de chacun l'opportunité de les franchir pour s'aventurer sur les vagues oniriques qui affleureraient sur la mer sonique des Labradford et Mogwaï ("Rendez moi mon ombre", "Le chemin de la nuit") avec des boucles hypnotiques et des envolées d'écume ("No wist at the end").
Si le post rock se teinte d'accents de road movie country flirtant du côté de Calexico ("Schokolade Blitzkrieg"), il vagabonde aussi du côté des tempêtes sonic youthienne ("Sunshine party") ou le psychédélisme neuroleptique ("Etat-major marmelade") pour s'achever dans une éblouissante "Longue dissonance sans résolution finale".
Peut être ne trouvons nous dans un album que ce que nous y apportons. La musique comme la peinture parlent aux sens avant même de solliciter l'esprit . Le talent de Rroselicoeur consiste à faire paraître élémentaire ce qui est savamment construit, sophistiqué ce qui est terriblement sensuel, esthétisant qui est instrumentalement classique.
Que les cœurs secs passent leur chemin !
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