L'œuvre de Zola Jesus, bien que succincte, peut déjà se prévaloir d'une forme artistique très affutée. Avec Conatus, la femme au pseudonyme mémorable signait un album profond et d'une valeur émotive toute aussi puissante et fluide que sa propre voix.
Si les deux ingrédients qui ont valu son succès à l'artiste sont toujours au rendez-vous, Taiga s'offre un nouveau luxe sonique, une évolution qui confine à la réinvention. Il faut dire que sous le manteau neigeux de la Taïga russe, la vie guette !
Comprendre que si Nika Roza Danilova tente d'unifier ses productions sous une couche vocale à valeur hégémonique, de nombreuses aspérités percent à répétition la pseudo blancheur de l'opus. De fait, cordes et cuivres viennent augmenter cette Taïga d'une juste sensibilité et d'une dimension épique. Pour exemple, "Hunger", tout autant que "Hollow", hurle une passion tonitruante qui finit par obligeamment se briser sur les refrains, à la façon de l'écume sur les récifs. Si l'image peut s'improviser un certain degré de poésie, la vérité est toute autre.
Sous l'eau dormante, ou la neige dans notre cas, les aiguilles effilées de la pop péjorative (celle qui est trop facile) menacent de planter leur dard dans les flancs de Zola Jesus. Refrains et ponts sacrifiant facilement les allures fantomatiques et insaisissables qui furent à l'origine du succès de l'artiste. Taiga est donc une vision dé complexifiée des créations de Nika, comprendre qu’elle joue ici le jeu de beaucoup d’artistes : élargir sa musique vers d’autre horizons pour tenter de charmer plus d’oreilles, au risque de s’aliéner sa fan base.
|