Les fans de l'album éponyme de Sam Prekop et de son successeur Who's Your New Professor peuvent passer leur chemin l'âme en peine. Ce n'est pas sur The Republic que Sam Prekop renoue avec la pop savante de son premier effort solo sorti en 1999. Au fond, on ne peut pas vraiment lui en vouloir. Ces deux disques solos chéris ainsi qu'une bonne partie des disques de son groupe The Sea And Cake regorgent de tellement de finesse pop et de moments de grâce qu'on lui pardonnera cette parenthèse "musique électronique exigeante" (comprenez chiante). Et puis soyons honnêtes, on l'avait vu venir le petit père Sam. Déjà, il y avait eu cet Old Punch Card résolument abstrait voire un brin autiste, hommage affirmé au pionnier de la musique électronique portugaise Nuno Canavarro. Mais surtout il y avait cette longue divagation synthétique sur The Moonlight Butterfly, sur le EP du même nom et la présence tenace de calviers sur le dernier album de The Sea And Cake, Runner. C'est ainsi, Sam Prekop ne peut s'empêcher de mettre du synthé partout. Son dernier effort solo s'inscrit dans cette logique : une plongée dans l'infinie possiblilité / pénibilité du synthétiseur modulaire.
The Republic comporte deux parties : une première composée de neuf morceaux composés pour sonoriser une installation vidéo de l'artiste David Hartt présentée à New York. La musique est loin d'être immédiate, souvent abrasive. Elle sera inévitablement fatigante pour beaucoup. On oscille entre un essaim d'abeilles et le bourdonnement d'un drone. Certains morceaux rappellent les travaux les moins accessibles de Christian Fennesz, les abstractions d'Oval ou encore de Microstoria.
La deuxième partie de The Republic forme un EP. "Weather Vane" marque une légère transition vers un semblant de rythmique. Enfin, l'on retrouve quelques repères, un semblant de rythmique qui se dissipe très rapidement. "The Loom", "Ghost", "Invisible", "A Geometric", "Music In Pairs" sont autant de terrains de jeu qui permettent à Prekop d'approfondir ses expérimentations à base de sytnthétiseurs modulaires, convoquant au passage des artistes comme Brian Eno, Steve Reich, ou plus récemment Oneohtrix Point Never.
Où est le problème me direz-vous ? Les références sont pointues et Sam Prekop gravite autour d'une certaine avant-garde artistique. Qui plus est, c'est un artiste assez complet, versé dans les arts visuels. Le problème est que les neuf premiers morceaux sont indissociables d'un support vidéo. Probable que dans une galerie d'art, la bande sonore proposée par Prekop ait tout son sens. Sur disque, c'est beaucoup moins évident. Même sentiment de frustration pour le "EP" qui complète cet album, on a l'impression que Sam Prekop s'est imposé un atelier synthé modulaire. Chez Fennesz, Oneohtrix Point Never, l'investigation et la recherche dans la musique électronique semblent cohérentes, maîtrisées, faire partie d'un tout. Chez Sam Prekop, on a l'impression qu'il s'agit d'un hobby. La démarche semble sincère, mais son truc, c'est vraiment la pop aérienne.
Si pour vous Sam Prekop est synonyme de sieste au soleil, de Piña Colada et de bande-son pour apéritif ensoleillé, ce disque ne présente aucun intérêt. Si vous avez envie d'épater vos copains arty ou si vous aimez la musique qui peut s''écouter en passant l'aspirateur, ce disque est pour vous.
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