Réalisé par Eduardo Mendoza de Echave. Pérou. Drame. 1h50 (Sortie le 25 mars 2015). Avec Giovanni Ciccian Lucho Cáceres, Víctor Prada, Gianfranco Brero, Norma Martinez, Ebelín Ortiz et Aristoteles Picho.
Thriller convaincant ayant pour cadre Lima, la capitale du Pérou, "El Evangelio de la Carne" d’Eduardo Mendoza est une plongée sanglante dans une des rares sociétés sud-américaines qui ne s’est jamais émancipée de la tutelle du FMI et des ultra-libéraux.
Le pays de Mario Vargas Llosa tel qu’il est ici décrit additionne les malchances et est la proie de trois religions : le catholicisme, le football et le dollar-roi.
Tous les personnages dont les destins s’entremêlent dans ce film "chorale" seront les victimes et les serviteurs de l’une de ces trois superstitions.
Dans son film, Eduardo Mendoza n’essaie pas de charger la barque. Il montre des personnages qui cherchent par amour ou par fraternité à trouver l’argent nécessaire à un proche pour le sauver de la mort ou de la prison. Leurs mauvaises actions ne sont jamais intentionnelles, jamais mues par la cupidité et il n’est pas question pour le cinéaste de céder au spectaculaire, à l’outrance.
S’il peut, comme Abel Ferrara, multiplier les références à une religiosité extrême, il n’y a chez lui aucun esprit de transgression ni volonté sacrilège.
Constat accablant, description implacable d’un monde où l’espoir s’écrit toujours en noir, "El Evangelio de la Carne" d’Eduardo Mendoza pourrait se résumer à ces scènes où l’on suit des combats clandestins de boxe dans lesquels les protagonistes se frappent presque à mort dans un espace exigu et grillagé.
Si le monde en action est franchement "macho" avec ses supporters prêts à en découdre avec ceux de l’équipe adversaire, ses policiers plus ou moins corrompus face à une délinquance multiforme découlant d’une société sans filet social où il faut des dollars US pour pouvoir se faire soigner, les femmes sont plus souvent des "Mater dolorosa", des femmes malades ou suicidaires que des objets de désir.
La société péruvienne paraît exsangue. Ses citoyens, inhibés de culpabilités diverses, risquent d’être encore longtemps soumis à toutes ces passions mortifères recensées par le film.
Authentiquement péruvien, "El Evangelio de la Carne" d’Eduardo Mendoza n’appartient pas à cette catégorie trop répandue de films des pays tiers destinés avant tout à conquérir un public occidental. On en appréciera que davantage ce moment passionnant passé à Lima. |