Malgré un nom céréalier, Bebly (le blé gourmet… désolé, ça me trottait dans la tête depuis beaucoup trop longtemps pour ne pas être expulsé) poursuit son petit bonhomme de chemin dans le paysage musical français. Depuis le groupe Histoire de, 2009 et son premier album, il a joué sur scène, à la rencontre de son public, et, sur la route, récolté l’inspiration l’album ici présent : L’intervalle. Il est un âge où l’on doit taire son âge, on le dira plus tard.
Des guitares présentes et galantes, elles suppléent sans occulter la voix du chanteur. Et même si l’album est avant tout musique, il est rafraîchissant de constater qu’il est un peu plus qu’une partition additionnée de paroles. Une belle part est faite aux guitares nordiques, tantôt glaciales, tantôt volcaniques et passionnées. Jamais redondantes ni déprimantes, toujours remontées au kérosène et à la foudre.
L’intervalle, c’est la distance de courtoisie qu’on accepte d’un degré plus ou moins agréable en fonction de son interlocuteur. La méfiance et l’inconnu augmentent cette distance, la confiance et le familier diminuent cet écart des êtres.
Bebly chante les désillusions et ce qu’on en fait, rebondir ou s’enfoncer, sachant que le choix n’est pas si simple. En toute philosophie et avec le recul, il décrit l’éblouissante vérité au sortir de la caverne, vérité qui mène à la colère de la déception, avant l’acceptation : "Quand je regarde derrière, je regrette d’avoir foutu la merde partout, je persistais à l’aveuglette, je n’avais rien compris du tout, si j’avais eu une bonne machette j’aurai tout défoncé c’est tout, mais les belles promesses par la fenêtre, ça vous fout en l’air c’est tout" ("A l’aveuglette").
Bebly est devenu adulte, avec ses joies, ses peines et sa candeur brisée : "De la merde dans les yeux, une confiance ébréchée, Irrévérencieux comme un sale gosse et une putain d’envie de tricher" ("Une putain d’envie de tricher"), mais il ne tourne pas le dos à ses ratées, il a bravé l’échec, gagnant en force et en sagesse : "Je ne suis plus comme avant, je ne vais pas dérailler, j’ai enfin j’espère, décidé, de balayer ce qu’il y avait devant, de balayer ce qu’il y avait à mes pieds, j’ai trouvé le courage, il était temps" ("Comme avant").
Sensible et profond, L’intervalle est le trait d’union entre les contraires de l’âme, liant les ambivalences des êtres, tendu de musicalité et de poésie, les accords se faisant écho et se répétant à l’infini, un doux moment. Grave et émouvant. Pur et éclatant comme une eau piquetée de reflets pailletés.
# 14 avril 2024 : En avril, de la culture tu suivras le fil
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