"Been a long time, my friend, since you’ve crossed my mind at all."
Depuis quelques années, le très prolifique Jim O’Rourke avait disparu de nos radars et on avait un peu oublié (on suit quand même avec une attention toute particulière ses références paraissant sur son propre label Steamroom) combien on aimait sa musique, ou ses musiques tellement le musicien possède un éventail stylistique des plus larges mariant exigence et érudition, allant de la pop baroque à la noise pointue, de l’expérimental au post-rock en passant par la musique électronique, le drone, les musiques improvisées…
Les projets et les collaborations d’ O’Rourke sont aussi importantes et nombreuses que les casseroles que traîne Nicolas Sarkozy, mais rappelons qu’on a pu le retrouver avec Gastr Del Sol, Sonic Youth, Merzbow, Wilco, etc. Alors quand on apprend que l’Américain exilé à Tokyo revenait avec ce qui se rapprocherait d’une suite à sa superbe trilogie (Bad Timing, Eureka, Insignificance) devenue, à son corps défendant, son acmé, on ne pouvait que s’enthousiasmer !
Bien sûr, quand on connaît le personnage et son humour (il suffit de se pencher un peu sur les paroles), le nom de l’album est ironique, ces chansons n’ont absolument rien de simples… et comment pourrait-il en être autrement ? Ce qui est exceptionnel ici, c’est qu’il utilise un matériau sonore usé (presque) jusqu’à la corde, grosso modo le soft rock, la pop baroque, le rock progressif des années 70, les styles proches de Brian Wilson, John Fahey, Burt Bacharach (et The Mops ou Yoshio Hayakawa, séjour à Tokyo et musiciens nippons (ni encore moins mauvais !) oblige) et se sert de toute sa science pour, toujours en cohérence avec le reste de sa discographie, transcender le genre, ouvrir de nouvelles perspectives et y apporter toute une complexité (marches harmoniques et mélodiques, modulations, tons voisins, arrangements d’une rare finesse, travail de la texture sonore, superpositions de contre-chants, le sens rythmique de la batterie qui a une très grande importance), tout en gardant une indéniable efficacité.
O’Rourke rend également de nouveau excitante une pop "plaisir coupable" dont il est quelque part l’un des instigateurs du renouveau actuel. Loin de tout fétichisme, l’Américain travaille sur le processus créatif et sur la transmission de ses idées et de sa démarche. Suite presque logique de The Visitor dans la conception esthétique, Simple Songs se montre d’une grande classe, plein de caractère, de nuances et de contrastes. Jim O’Rourke n’a pas besoin de jouer les gros bras, d’en rajouter des tonnes pour montrer tout son talent et rendre sa musique à la fois subtile et limpide (et non insipide). C’est la marque des grands ! Ah si tout le monde était capable d'écrire d’aussi simples chansons…
# 14 avril 2024 : En avril, de la culture tu suivras le fil
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