Comédie écrite et mise en scène par Émile Salimov, avec Thierry Ferrari, Barbara Belletti, Jean-Pierre Becker, Lucas Bléger, Virginie Pettenati, Jacques Ledran, Mathieu Gorges, Jessica Jaouiche, Lauren Deguitre, Aurélia Aimé, Agnès Barret, Clara-Ann Marchetti, Sarah du Villard et Marlène Arakel.
A l'origine, "Grec cherche Grecque" de Friedrich Dürrenmatt est un roman paru dans les années cinquante. L'auteur suisse y voyait une "comédie en prose" où l'on suivait les aventures tragi-comiques d'un petit employé sans relief qui, à la suite d'une annonce matrimoniale, voyait sa vie passer de l'ombre à la lumière.
A l'image du Topaze de Pagnol, Arnolphe Archilochos est un obscur personnage ayant pour lui de grands principes moraux. Il va être confronté à leur réalité dans sa nouvelle existence... Emile Salimov a décidé de l'adapter à la scène et d'en faire une épopée luxueuse mélangeant théâtre et comédie musicale.
Tout de suite, on est saisi par l'incongruité du projet quand on découvre le héros grec, au nom qui fleure bon la monomanie.("Archi-loc(h)os", en train de boire son lait (sa boisson préférée et son vice) dans un café fréquenté par des coureurs cyclistes à l'époque Merckx !
Tout est à l'image de ce premier "acte" : Émile Salimov a bâti autour de ce petit bonhomme à la recherche d'une "grecque" une grosse farce énorme et saugrenue dans laquelle Arnolphe Archilochos va découvrir le vrai visage de toutes les personnes qu'il vénérait.
Ce tir aux pigeons idéologique patronné par Friedrich Dürrenmatt n'aurait pas déplu à Dario Fo. Cependant, s'attaquer au patron, à l'évêque et au président pour dire qu'ils étaient tous les clients de cette chère Chloé, prostituée au grand cœur, possiblement grecque, et future Madame Archilochos, s'avérait peut-être un peu anecdotique pour nourrir une adaptation scénique de "Grec cherche Grecque".
Émile Salimov a donc préféré passer à la vitesse supérieure : peu à peu, à mesure qu'Arnolphe grimpe à grande vitesse dans la société, sa mise en scène s'affole. On danse, on chante, on court.
Les amateurs de grand spectacle ne seront pas déçus : les scènes dansées s'enchaînent, les plumes rouges et les parapluies sont prétexte à chorégraphie. Dans "Grec cherche Grecque", le spectacle est roi, orchestré par son omniprésent metteur en scène.
Il faut dire qu'il n'a pas lésiné sur les moyens : quinze acteurs et danseurs pour réussir un vrai spectacle total et populaire. On sera tour à tour séduit par les numéros de danse, par les jeux de lumière, par le soin apporté aux costumes et par les ambiances sonores distanciées au point de faire entendre Demis Roussos interprétant l'un de ses tubes en allemand...
Drôle, enlevé, léger, "Grec cherche grecque" vaut aussi pour la performance de son acteur principal, Thierry Ferrari, qui, peu à peu, fonce à grandes enjambées vers son destin.
Ce spectacle plein de surprises est un enchantement visuel qui devrait plaire aux plus jeunes et donner envie à ceux qui ignorent le théâtre de le découvrir. Plus trivialement, on pourrait écrire qu'Emile Salimov fournit avec générosité une tranche de vraie théâtre. |