Réalisé par Stefano Sollima. Italie/France. Thriller. 2h15 (Sortie le 9 décembre 2015). Avec Pierfrancesco Favino, Elio Germano, Claudio Amendola, Alessandro Borghi, Greta Scarano, Giulia Gorietti, Antonello Fassari, Jean-Hugues Anglade, et Adamo Dionisi.
Les liaisons occultes entre le pouvoir et le crime organisé dans la Botte transalpine, avec les grandes mafias, celle des familles du Sud faisant partie de l'establishment, la mafia blanche, la guerre des gangs locaux, les trois mondes, l'alliance du sabre et du goupillon, la trinité profane "sexe, drogue et argent" qui régit le monde..., la chanson est connue diront les critiques blasés et les esprits chagrins.
Et cependant, "Suburra" réalisé par Stefano Sollima, dont le scénario constitue l'adaptation du roman docu-fiction éponyme de Giancarlo de Cataldo et de Carlo Bonini publié en 2013 considéré comme prophétique en ce qu'il annonçait le scandale "Mafia capitale" qui a éclaté l'année suivante, constitue un film de genre aussi spectaculaire que captivant.
Film violent sans manichéisme, car placé sous le règne du mal régnant sans partage, dépourvu de morale comme de moralité et de happy end, "Suburra" traite de ces thématiques par illustration de la théorie du chaos sous forme d'une Apocalypse romaine annoncée et séquencée en sept jours-chapitres diluviens.
Cette apocalypse résultera de la survenance concomitante de la démission du pape, de la chute du gouvernement et du capotage d'un colossal projet immobilier destiné à transformer la station balnéaire d’Ostie en Las Vegas italienne.
En l'espèce, le grain de sable qui enraye la machine jusqu'à l'implosion, le fameux "effet papillon", est initié par la mort par overdose d'une prostituée mineure au cours d'une partie fine d'un député corrompu et cynique (presque une tautologie) qui se considère comme intouchable, missionné pour faire voter une dérogation à la loi de protection du littoral, doublé d'un sex-addict, qui commet l'erreur de laisser sa maîtresse pourvoyeuse de drogue et de chair fraîche, régler 'le problème".
Et celle-ci s'adresse à un "ami" pour se débarrasser du corps. Une mort qui ne serait qu'un anodin simple fait divers. Mais "l'ami" est une petite frappe qui a la mauvaise idée de faire chanter le député et qui se retrouve égorgé par le caïd ostien, psychopathe et exécuteur des basses oeuvres. Là encore un simple fait divers si la victime n'était apparentée au chef barbare d'un gang émergent issu de l'émigration, en l'occurrence, un clan de tsiganes sédentarisés.
Toutes les mèches sont allumées et rien ni personne, pas même le légendaire "Samourai", monsieur bons offices chargé des arbitrages garantissant les équilibres, et hiérarchies, mafieux, ne pourra arrêter l'emballement de la machine.
A grand renfort de pluies torrentielles et de flots d'hémoglobine et empruntant aux codes des clips vidéo, et incluant une cartographie sociale radicale, Stefano Sollima signe un thriller hardcore efficace à l'esthétique léchée transcendée par la photographie de Paolo Carnera et dont le rythme crescendo, résultant du montage nerveux de Patrizio Marone, est porté par les morceaux de noisy-electrop-pop maelstromique du groupe français M83 extraits de son double album "Hurry Up We're Dreaming". |