Spectacle de théâtre musical mis en scène par Vladimir Pankov sur un livret de Irina Lychaginan, interprété par Elena Shanina (ou Evgenia Simonova), Igor Yasulovich (ou Valeriy Garkalin), Maria Biork, Olga Demina, Vera Romanova, Irina Ryndina, Seseg Khapsasova, Alisa Estrina, Pavel Akimkin, Andrey Aminov, Evgeny Barhatov, Alexander Kudin, Mikhail Grigoriev, Ignat Matukhov, Azat Nasretdinov, Evgeny Sangadzhiev et Grigorii Spiridonov.
Formé au théâtre musical au Gitis, académie russe des arts du théâtre, le comédien, metteur en scène et compositeur russe Vladimir Pankov avait soulevé l'enthousiasme en 2010 lors de la présentation à Paris d'une déclinaison oriinale et décapante de "La Noce" de Tchekhov.
Son atypicité, et sa marque de fabrique, qui tient notamment au mélange des genres, théâtre, chant et musique, et des registres, de l'hyperréalisme à la distanciation, du burlesque au pompier, se retrouve dans "Voïna (La Guerre)", fresque épique musicale créée pour le centenaire de la Première guerre mondiale figurant au programme du Festival International d'Edimburg.
Toutefois, la conception, sous forme de chants au sens antique du terme, de cette partition qui ressort à l'oeuvre opératique, risque de déconcerter comme d'en altérer l'appréciation critique d'autant que sa durée (2h20) excède le format standard "tolérable" par une partie du public.
De même pour une autre de ses particularités qui tient à la superposition d'hybridations. En effet à l'hybridation stylistique, le livret écrit par Irina Lychaginan résultant du croisement d'une épopée antique ("L’Iliade" d’Homère) d'un roman-témoignage ("La Mort d’un héros" du romancier britannique Richard Aldington) et de poèmes de guerre ("Les Notes d’un cavalier" du poète russe Nikolai Goumilev), s'ajoutent la dramaturgie kaléidoscopique avec l'entrelac quais-cinétique d'histoires et de destins et la pluralité de langue avec des textes dispensés en russe, en anglais et en grec ancien.
Par ailleurs, le spectateur doit gérer la multitude d'images générées par l'inventivité foisonnante de la scénographie élaborée par Maxim Obrezkov portée par les clairs-obscurs des lumières de Nikolai Surkov ainsi que l'omniprésence de la musique et des très beaux chants dont ceux sur le mode spécifique de la polyphonie populaire russe.
Cela étant, le défi du propos, les discours sur le sens de la guerre, l'immersion dans le vécu du soldat vs le ressenti de ceux à l'arrière du front et l'évocation des traumatismes, est relevé et la mosaïque prend forme et sens au fil du temps pour qui accepte une conséquente immersion au long cours dans cette tragédie sans héros.
Et, en tout état de cause, force est de constater la maîtrise technique de la mise en scène de Vladimir Pankov, et de sa direction d'acteur marquée du sceau de la rigueur absolue, et l'excellence de l'interprétation chorale des comédiens de sa Compagnie Sounbdrama Studio rompus à toutes les disciplines. |