L’Etrangleuse. La première fois que j’en ai entendu parler, c’était au concert de Blonde Redhead à l’Epicerie Moderne, il y a un an. L’Etrangleuse jouait en première partie. Je ne savais pas ce à quoi m’attendre mais je me rappelle très bien la pensée que j’avais eu : "Si jamais je joue un jour dans un groupe de rock, j’aimerai bien un nom aussi cool". Percutant. Féminin. Doux et cruel.
Derrière ce pseudonyme, se cachent deux personnes : Mélanie Virot et Maël Salètes, elle à la harpe, lui à la guitare. Chacun ses cordes. Chacun les violentant avec douceur. Elle vient du classique, du conservatoire, de la musique de chambre. Lui vient du rock, MacZde Carpate puis Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp. De leur rencontre est née une musique nouvelle, métissée et expérimentale.
Les morceaux sont plutôt dans le registre instrumental, musical que dans le registre "chanson" et pourtant, le chant est présent en filigrane tout au long du disque. Des motifs scandés au milieu des instruments, des couleurs qui participent à la transe. Seul le dernier morceau est véritablement centré autour de la voix du chanteur invité G.W. Sok, pour clôturer le voyage.
L’album Memories to come est le fruit de leur collaboration avec le producteur anglais John Parish (PJ Harvey, Eels, Dominique A…), qui joue de manière très discrète et subtile de nombreux instruments tout le long du disque : batterie, basse, piano, bongo...
Le disque est une traversée de mondes sauvages, de paysages désertiques et envoûtants, entre Afrique et Asie. Parfois, une main rassurante nous invite à la suivre sur fond de comptine pour enfants ("L’un languit"), parfois la main se crispe, se serre autour de notre cou, devient inquiétante ("Noise / Silence").
On pense comme ça à des disques de rencontre, Vincent Segal & Ballaké Sissoko (violoncelle et kora), Serge Teyssot-Gay & Khaled AlJaramani (guitare et oud), Ali Farka Touré & Toumani Diabaté (guitare et kora). A l’endroit où les frontières et les séparations n’ont plus aucun sens. A l’endroit où les tentatives de mettre des mots sur les choses semblent vaines. A l’endroit où la musique est reine et tord le cou aux conformismes et aux préjugés.
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