La légende raconte qu’une agression est la lointaine origine de ce double album, un peu comme les bactéries seraient les nôtres… (d’origines, je veux dire). Nonolimite et Les Psycho Potes naviguent sur le fleuve musique depuis plus de 10 ans. Il fallait certainement ce temps pour nous livrer ce bijou croustillant au cœur fondant.
Deux albums, pour les deux identités assumées des quatre complices. De la bonne humeur façon chanson française acoustique, guitares sèches et caisses à rythme pour Part I, et de l’énergie plus rock avec guitare électrique et caisse à résonnance pour Part II.
Côté acoustique, ces surdoués des instruments surprennent avec des sifflements d’accordéon et un phrasé proche du reggae. Et comme si cela ne suffisait pas à varier les plaisir, des femmes sont invitées à poser leur voix sur certains morceaux, ajoutant une note de fraîcheur à l’ensemble, qui se déguste comme un mojito sur une plage grillée.
"Cette chanson n’a pas de thème, si tu l’entends sur les ondes, je retourne jouer aux Playmobil". "Chanson sans thème" résume bien l’ambiance : pas de case, pas de cliché, ils viennent là où ils ne sont pas attendus. Enfin un groupe qui peut comprendre que le commun des mortels n’aime pas qu’un seul type de son.
Et la seconde partie ? Part II est à la première partie ce que le vinaigre est à l’huile, ce que l’armagnac est aux marrons, ce que le tandoori est au poulet : un exhausteur de goût. Plus piquant, plus énervé, plus arraché, plus rythmé, plus remuant, plus énergique, il est le volet rock’n roll and guitare is magic du double album.
"Le groove s’enroule et fait chaud au cœur" ("Ma zic ma muse"), ces gars-là aiment la musique, ça se touche des doigts d’oreilles à chaque morceau. L’enthousiasme non feint du groupe communique une bonne humeur indispensable pour égayer les quotidiens parfois ennuyeux. Nonolimite bouscule la routine, de son rock gras et bourré d’amphétamines. Pour le soja et le toffu, voir Part I, plus doux, plus zen et tout aussi empli d’exaltation végétarienne.
Mais ils ne se contentent pas de chanter les aubergines et les épices sans OGM, ils défendent les partis pris des gentils de ce monde. A commencer par la libération de la femme, avec "L.F.M" : "l’égalité acquise au dépens de leur sérénité artificielle " femmes qu’ils aiment évidemment. Une ode à la féminité dont feraient mieux de s’inspirer les extrémistes bornés.
Ils se coiffent de dread et de vêtements pêchés sans dauphin en Jamaïque pour un couplet sur la nécessité de tomber pour avancer. Certes, ça a déjà été entendu, mais c’est toujours bon d’entendre que celui qui prétend ne jamais tomber n’a pas bougé d’un pouce ("Prendre ou tomber") : "Prendre ou tomber, tomber ou prendre, il faut bien tomber pour apprendre, prendre ou sombrer et pour comprendre, ne jamais laisser tomber ni se rendre".
De l’humour : "t’es dans la merde et t’en as plein le cul, fais comme nous adhère au PQ" ("It’s PQ"), de l’amour : "et quand cette chanson s’arrêtera, promets-moi que ça continuera, pas de fin entre toi et moi" ("Chanson sans fin"), et du militant pour le quotidien rêvant d’escale dans une autre dimension (avec moins d’impôts, de la neige en été, des éternuements de piécettes et du chocolat à volonté) : "et je suis sur mon île, et j’attends tranquille que mon banquier m’ait oublié !" ("Exil des îles").
Un groupe, deux albums, deux ambiances qui se rejoignent par leur espérantisme de masse communicatif, un bon moment à écouter dans les deux sens, par les côtés qui vous plaisent.
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