Comédie de Yvan Varco, d'après une oeuvre de Emilie du Châtelet, mise en scène de Anne Bourgeois, avec Anne Deleuze et Yvan Varco.
Emilie du Châtelet, véritable "femme savante" du 18ème siècle et figure du protoféminisme, a développé la thématique du bonheur en moultes considérations philosophiques et existentielles consignées dans un "discours" posthume.
Yvan Varco en livre la quintessence dans "Pompon Voltaire", un opus au titre aussi cocasse qu'énigmatique, en invitant le spectateur à franchir les grilles du château de Cirey où elle mena une vie quasi maritale avec un amant prestigieux, pas moins que Voltaire, pour découvrir son quotidien consacré aux plaisirs tant de l'esprit, considérant l'étude comme le seul domaine qui ne décevait jamais, que de la chair.
Usant de l'esprit et de la spiritualité de la langue du temps, la partition ressort au théâtre de conversation mais Yvan Varco a eu l'habileté d'éviter les écueils liés à la faiblesse dramaturgique et à la staticité de cet exercice, d'une part, en y insérant habilement, des éléments de biopic situationnel des deux personnages, et, d'autre part, en le twistant tant avec des scènes de pure comédie conjugale, dans lesquelles Voltaire cabotine, que par des apartés en adresse au public.
Inspirée par ce concerto pour deux esprits éclairés, Anne Bourgeois signe une mise en scène enjouée et dirige Anne Deleuze et Yvan Varco, comédiens aguerris qui, par leur diction émérite et l'art de l'inflexion et de la réaccentuation, rendent audible tant la belle langue de l'époque que les considérations argumentatoires de l'intéressée glissées au fil de savoureux dialogues.
Pour la scénographie, Sophie Jacob mise simultanément sur la sobriété et l'anachronisme avec un jeu de paravents à la Fornasetti qui posent l'univers studieux des arts et sciences mais dont le code est cassé par un audacieux, et réussi, télescopage avec quelques blancs éléments de mobilier monobloc.
Corinne Pagé a élaboré des costumes d'époque mais sans perruque, pourpoint classique pour Voltaire et pour "Pompon", point de robe à panier et décolleté pigeonnant, mais une audacieuse tenue de chevalier rouge revisitée porté avec des cuissardes et un corsage gansé qui sied tout particulièrement à Anne Deleuze.
Celle-ci s'avère pétillante en diable dans un rôle écrit sur mesure par Yvan Varco qui campe un irrésistible Voltaire se piquant de vers de mirliton et obsédé par son théâtre qui n'a pas contribué à sa postérité mais qui, de son vivant, lui a assuré un grand succès tant d'estime que pécuniaire.
Leurs joutes oratoires et leur complicité de jeu assurent un spectacle divertissant sur un sujet fédérateur de philosophie morale aussi universel qu'intemporel. |