Comédie dramatique écrite et mise en scène par Pierre Margot, avec Guillaume Orsat, Pierre Margot et Céline Legendre-Herda.
Deux inconnus, un sfd qui a mal aux pieds et un conformiste étriqué qui lui propose soins et chaussures neuves, tel est le prologue quasi beckettien de "Shaman & Shadoc ou l'imposture des rats" que son auteur qualifie de "comédie existentielle et solitaire pour deux acteurs, une ombre et quelques tableaux".
Mais Manhattan Shaman serait plutôt Vladimir qu'Estragon et vice versa pour Victor Shadoc quoi que...
Car le premier opus du comédien Pierre Margot, qui constitue une excellente machine à jouer, pour le comédiens comme pour le public, navigue entre Beckett, Copi, Hanohk Levin et Roland Dubillard et, tout en brouillant les pistes, entraîne le spectateur dans une quatrième dimension aussi loufoque, burlesque que démoniaque.
Et avec ses digressions expérimentales, quelque part entre le neurobiologiste Henri Laborit et ses études sur les neurosciences et le psychologue Stanley Milgram, et sa célèbre expérience sur la soumission à l'autorité, il signe une superbe tragédie cannibale et... agnostique.
Au jeu, Pierre Margot, récemment à l'affiche de "Le Misanthrope vs Politique", qui signe également la mise en scène d'une judicieuse sobriété, campe parfaitement l'attitude victimaire du vrai faux naïf et Guillaume Orsat, trop rare au théâtre ("'Inconnu à cette adresse"), entre la truculence d'un Gabin dans "Archimède le clochard" et la férocité du chat du Cheshire, réalise une belle performance.
Le duo fonctionne en symbiose dans le registre d'une partition machiavélique tout aussi singulière qu'addictive qui, avec l'intervention récurrente des comptines d'une étrange jeune femme, interprétée par Céline Legendre-Herda, ramène à Beckett tout en flirtant avec l'enfer sartrien. |