Comédie dramatique de Eric-Emmanuel Schmitt, mise en scène de Anne Bourgeois, avec Davy Sardou, Jean-Paul Farré, Jean-Jacques Moreau, Michèle Garcia, Odile Cohen, Noémie Elbaz, Günther Vanseveren et Roxane Le Texier.
Le hall lumineux d’un hôtel aseptisé. Seuls deux employés muets vêtus de blanc sont là pour guider les clients vers l’une ou l’autre aile.
Quelques anciens pensionnaires devisent. Tous veulent parler au Docteur S. Quand soudain les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur Julien, un nouveau venu…
Cet hôtel est un lieu de villégiature temporaire pour des humains en transit. Dans ce lieu mystérieux, les personnages attendent des nouvelles de ce qu’ils vont devenir.
Au fond, cet ascenseur comme une boîte magique dont les épaisses portes s’ouvrent de temps à autre pour déposer un nouveau pensionnaire ou venir en chercher un. Seul, le docteur S (qui porte bien son nom car il s’agit d’une doctoresse) connait une partie des éléments du dossier de chacun.
Avec "Hôtel des Deux Mondes", Eric Emmanuel-Schmitt, comme dans "Le Visiteur" a écrit un texte aux multiples pistes métaphysiques et philosophiques questionnant par exemple le spectateur sur la mort, Dieu et l’au-delà. Et l’auteur livre quelques répliques parmi les plus sublimes de son œuvre dans cette pièce qui mélange comédie, fantastique, suspens et amour.
La mise en scène d’Anne Bourgeois à la fois légère et chargée d’émotion fait évoluer ces êtres avec le recul relatif à cette situation extraordinaire. Elle accompagne une distribution de qualité qui circule avec harmonie dans le décor superbe de Stéfanie Jarre.
Jean-Paul Farré met tout son talent et sa fantaisie de clown triste pour donner malice et générosité au mage Radjapour. Sa dernière scène est d’ailleurs à ce titre particulièrement bouleversante.
Odile Cohen est splendide dans le personnage énigmatique du Docteur S à la froideur apparente, dont les yeux ne peuvent trahir la profonde humanité. Elle livre une prestation aussi poignante que marquante.
Davy Sardou et Noémie Elbaz forment un couple de jeunes premiers crédible et émouvant. Le talent de Michèle Garcia et Jean-Jacques Moreau dans des personnages à la bavarde exubérance permet un un peu de rire bienvenu. Quant aux anges, Roxane Le Texier et Günther Vanseveren, ils accompagnent tout ce petit monde de leurs regards bienveillants.
On s’attache à ces individus dont on ne sait rien du destin (à moins qu’on ne le devine). Dans cet entre-deux, les personnages vont prendre conscience de leur liberté et de l’importance de leurs choix. Ils comprendront aussi l’inestimable trésor d’être vivant.
Un beau moment de théâtre. Et ce qui est sûr, c’est qu’après cette pièce, on ne prendra plus jamais l’ascenseur comme avant… |