En collaboration avec The Japan Foundation J. Front Retailing Archives Foundation Inc., le Musée national des Arts asiatiques-Guimet propose avec "Kimono - Au bonheur des dames" une exposition à la croisée des arts décoratifs et de la mode qui retrace l'histoire et la novation exceptionnelle qu'a connu le kimono.
Car cette tenue japonaise usuelle, à l'origine uniforme unixese tous terrains, vêtement d'intérieur, de travail ou de cérémonie depuis le 10ème siècle,
est devenue, pendant les presque trois siècles de la riche et dynamique période Edo, une pièce essentielle de la garde-robe féminine et un signe de distinction sociale.
Puis, alors que son port local a été quasiment abandonné lors de l'ouverture du pays à l'Occident, le kimono a investi l'Europe de l'alcôve au podium des défilés de mode, à la fin du 19ème siècle grâce à la vogue du japonisme puis comme exercice de style pour les couturiers et créateurs du 20ème siècle.
L'exposition conçue par Iwao Nagasaki, conservateur, professeur en arts du textile à l'Université pour femmes de Kyoritsu, et Aurélie Samuel, conservatrice du Patrimoine, repose notamment sur une sélection de pièces exceptionnelles de collection détenue par la maison Matsuzakaya, le premier grand magasin japonais qui, dès le début du 17ème siècle, avec l'essor de la classe des marchands, fait office de maison de mode. Le kimono, le vêtement traditionnel du pays du Soleil Levant devenu un intemporel de la mode
occidentale
L'émergence d'une culture citadine et d'une classe bourgeoise constituée par les marchands enrichis favorise le phénomène de mode qui contribue également à un souci de représentation.
La maison Matsuzakaya propose aux clientes fortunées des modèles sur mesure conçus à partir de carnet de modèles et de broderies qui reprennent les motifs caractéristiques de l'art japonais, de l'estampe aux arts décoratifs, notamment ceux de la faune et de la flore ainsi que des paysages du "monde flottant".
Les pièces présentées, qui témoignent d'un savoir-faire émérite en matière d'arts textiles et de la broderie, sont appariées en fonction d'une typologie caractéristique de leur fonction et de la classe sociale de leur propriétaire.
Ainsi, le kimono d'apparat pour l'aristocratie tout en sobriété qui inclut les armoiries et le kimono comme élégant habit de société pour la classe des seigneurs et des samouraïs se distinguent nettement du kimono à la profusion décorative ostentatoire des kimonos du paraître des femmes de marchands.
A la fin du 19ème siècle, avec la vogue du japonisme, les premiers couturiers français, dont Paul Poiret, Madeleine Vionnet et les Sœurs Callot, s'inspirent de l'architecture du kimono tout en le délivrant de la contrainte que constitue la ceinture rigide, pour n'en retenir que l'ampleur sensuelle en l'inscrivant dans des créations vaporeuses.
Et plusieurs décennies après, la haute couture décline le kimono tels le manteau-mandarin vert tilleul et mauve glycine de Yves Saint-Laurent et le diaphane kimono "Ailes de papillon" en organza blanc de Franck Sorbier tout comme les enfants terribles de la mode parisienne dont John Galliano avec les spectaculaires modèles "Gia-Cia-Me-san" et "Mika-San" de la collection Dior printemps-été 2007.
Les créateurs japonais de la génération de l'après guerre réinterprètent les codes du kimono de façon avec la styliste Junko Koshino et les samouraïs de la diaspora - Kenzo, Issey Miyake et Yohji Yamamoto - qui revisitent le vestiaire nippon à l'aune de l'austérité et du design vestimentaire.
Un focus sur la fabrication du kimono et le kimono de mariage complète cette didactique exposition. |