Concert de Vincent Delerm accompagné par Rémy Galichet.
Vincent Delerm est en tournée après la sortie de son nouvel album, "A Présent". C'est d'ailleurs sur la chanson éponyme qu'il débute son spectacle. Un spectacle dont le maître mot sera "sentiment ".
Il faut dire qu'en deux belles décennies de carrière, dont on va retrouver des jalons marquants, Vincent Delerm en aura aligné des sentiments. Des beaux, surtout.
Bien sûr, dans la structure minimale qu'il a choisi, lui derrière son piano et Rémy Galichet aux claviers (et au trombone pour le rappel), il y aura d'abord de la nostalgie et... "Deauville sans Trintignant " dans une magnifique interprétation, avec comme toujours, la projection d'un extrait pluvieux d' "Un homme et une femme " de Lelouch
Mais la nostalgie n'est qu'un aspect de Vincent Delerm. Celui qu'on croit introverti, si on ne l'a jamais vu sur scène, est constamment dans le partage avec son public. Très à l'aise, plaisantin, prêt à saisir l'imprévu qui jaillit soudain, il appelle ses spectateurs à participer à son show.
Quand il pianote un air de ragtime, il sait que la réaction de la salle sera immédiate. Les mains battent, la gaieté gagne. Même quand il chante, "Je ne veux pas mourir ce soir ", une des meilleures chansons de son dernier cédé, il ne plombe pas l'ambiance. L'émotion est là, constamment teintée d'une nuance d'humour.
La voix est chaleureuse, le piano parfois farceur, comme sur "la Natation synchronisée ". Acteur autant que chanteur, Vincent Delerm fait de ses enchaînements de savants petits moments de connivence. Il aime aussi pratiquer le collage de voix audio ou vidéo. On entendra ainsi dans le noir Marie Rivière dans "Le Rayon Vert " d'Eric Rohmer introduisant "Danser sur la table ", une autre très belle nouvelle chanson.
Que Rohmer surgisse à l'heure de la maturité de ce leloucho-truffaldien n'est pas un hasard. Son écriture s'est encore épurée. Les descriptions rigolotes ont fait place à des esquisses et des croquis sans adjectifs et sans trop de mots.
Pourtant, en mélangeant ses chansons emblématiques du début avec les dernières, il obtient un spectacle très équilibré dans lequel il n'y a aucun temps faible. Habile dans la composition de son récital, il démontre aussi que les chansons des derniers albums sont désormais bien rentrées dans son répertoire, ainsi "Martin Parr ", que le public se fait une joie de chuchoter ad libitum.
On lui saura vraiment gré du bel hommage pudique qu'il rend à Leonard Cohen et à sa Marianne, via la lettre magnifique que le songwriter canadien adressa à l'amour de sa vie.
Ici, les sentiments se font dès lors profonds derrière la décontraction. On découvrira la gorge un peu nouée "Christina " et surtout "le Garçon ", agrémenté des photos "intimes " de Vincent Delerm, comme celle de son yoyo "Sprite "
Si l'on connait mal l'univers de Delerm, le voir sur scène est une bonne introduction. Si on aime déjà ses chansons, on ne les aimera que davantage magnifiées par un interprète charismatique. Bref, aucune raison de ne le point voir. |