Comédie de Alejandro Jodorowsky, mise en scène de Codrina Pricopoaia et Dominique Fataccioli, avec Aitor Bourgade, Brieuc Le Guern, Iuliana Neagu, Codrina Pricopoaia, Chloé Renaud et Geoffroy Vernin.
La jeune Compagnie Galante n'a pas froid aux yeux en s'attaquant à un opus de Alejandro Jodorowsky, l'un des "métèques" co-fondateur avec Fernando Arrabal et Roland Topor de Panique, un anti-mouvement subversif d'obédience actionniste, qui défraya la chronique dans les années 1960. Alors certes, "Opéra Panique" ne date pas de cette époque héroïque, puisque résurgence contemporaine datant de 2001, mais il n'a rien perdu du syncrétisme référentiel originel dans lequel les questions existentielles sont passées à la moulinette du surréalisme, du dadaisme, de absurde et de la pataphysique. Il est vrai qu'avec sa devise ("Faire avec humour les choses graves et avec sérieux les choses drôles"), cette compagnie est prédisposée à s'embarquer dans des univers singuliers. Les deux metteurs en scène présentent donc un florilège des dramuscules loufoques qui composent l'opus et constituent autant de partitions performatives hors cadre et hors sens dont certaines tanguent entre les fameux diablogues de Roland Dubillard et le délire bouffon de Copi. Codrina Pricopoaia, également au jeu, et Dominique Fataccioli indiquent avoir conçu le spectacle comme une mise en abîme métaphysique entendue tant au niveau de l'individu que dans le cadre du méta-théâtre et opté pour un registre de jeu qui fait la part belle au théâtre du geste et au jeu physique du comédien en le saupoudrant d'une pincée d'interactivité formelle avec le tirage au sort par le public de l'ordre de quelques scènes. Sous les lumières de sépulcrales de Leslie Horowitz, la maîtresse au look goth-new fetish (Codrina Pricopoaia) de ce jeu de rôles qui déconstruit le réel éprouve bien des difficultés à gérer des ouailles névrosées voire psychotiques, jeunes filles échappées d'un conte de fées burtonien (Iuliana Neagu et Chloé Renaud) et clowns visnieciens (Aitor Bourgade, Brieuc Le Guern et Geoffroy Vernin) qui, entre dialogues de sourds et extrapolations absconses, se livrent à des batailles allégoriques.
Tous épatants et à la hauteur de cette véritable machine à dézinguer pour acteurs complets rompus à la dramaturgie non verbale et au burlesque, les jeunes comédiens délivrent avec brio ce délirant cabaret tragi-comique. |