Il nous a fallu quelques mois de patience après pour s’essayer à écouter Nadia Tehran. Il faut dire que la chanteuse suédoise, originaire d’Iran, a profité d’un méchant buzz bien-pensant qui menaçait d’étouffer l’artiste sous ses propres revendications. L’EP Life Is Cheap, Death Is Free, mérite pourtant qu’on s’y intéresse, tant celui-ci est dense.

Taxée de révolutionnaire, de rebelle et de tout un lexique propre à faire pâlir d’envie n’importe quel bobo, la jeune artiste fait mal. A la fois avec sa musique qu’elle veut engagée, mais également avec des propos qu’une Europe Occidentale souhaite ignorer, Nadia Tehran balaie large et laisse libre court à sa colère le temps de 5 titres.

Si les productions versent facilement dans les sonorités typiques du Moyen-Orient, c’est la violence des propos tenus qui retiennent les oreilles. Le verbe futé et acide, elles s’approprient sans hésitation les traits dirigés contre les réfugiés et les étrangers pour les retourner à leurs envoyeurs. Sur "Refugee", elle dénonce sans détour la peur qui anime l’imaginaire social et politique européen. "Im a beauty and a beast, a dicease from middle east" chante-t-elle pour mettre en lumière les relations compliquées liant les hommes et les femmes d’origines étrangères et les habitants de leurs pays d’accueil.

Politiquement engagés, son flow rapide et les percussions qui l’encadrent tendent à cultiver une atmosphère d’urgence teintée par une culture internationale. Et sans surprise, histoire de faire "matcher" le propos au son, Nadia Tehran s’essaie (sans trop de risque) au chant et non plus au rap, sur le titre "Superstar".

Alors évidemment, l’EP Life Is Cheap, Death Is Free, dont même le titre paraît téléphoné, n’est pas en train de réinventer la poudre, mais ça ne l’empêche pas d’allumer la mèche et de jeter des reflets incandescents dans nos oreilles. Et si l’artiste risque de récupérer ici et là des comparaisons avec d’autres artistes féminines engagées, force est de constater que cet espace et cette forme d’expression sont en passe de devenir une norme. Tant mieux.