Rendez-vous obligé des festivals hexagonaux, Beauregard 2017 offrait une affiche autant alléchante qu'étonnante. Passer de Biolay à Metronomy ou d'Hubert-Félix Thiéfaine à Die Antwoord sont des choix assez peu orthodoxes.
Quoiqu'il en soit, le début de festival dépasse toutes nos attentes. Un léger retard nous fait manquer les pourtant énigmatiques N3rdistan et assister uniquement à la toute fin des espoirs normands folk de Daisy.
Vient ensuite Marteen Delvorde et son projet parallèle à Balthazar, Warhaus. Étonnamment, sa pop sombre s'accommode bien de la lumière du jour. Le set est tendu à souhait. Marteen en fin de concert se paie même le luxe d'aller chanter au milieu de la foule. Magnifique.
Je commence à regarder le public. Le type à côté de moi a des moucherons qui tournent autour de sa tête, alors qu'il n'y en a aucun au-dessus de la tête de quiconque dans la foule. Je m'éloigne un peu de cet individu. Mais je me retrouve à côté d'un type qui filme le concert en essayant de viser le dessous des jupes de Sylvie Kreusch, la choriste et compagne de Marteen Delevorde. Un concept qui finalement va bien avec la dimension cinématographique et érotique de la musique de Warhaus.
C'est ensuite la soul blanche de Her qui retentit sur le site de Beauregard. Sexys, sensuels et accrocheurs, les chansons du duo passent haut-la-main la barre du live. Enfin, duo, je m'avance, puisque Simon Carpentier n'est pas là. Victor Solf occupe donc seul le devant de la scène, bien soutenu par la section rythmique. On les avait connus au sein des Popopopops, lors d'une session dont l'équipe de Froggy garde un excellent souvenir. Le batteur est devenu avocat, quant au bassiste il a fait l'école de cuisine Ferrandi (on veut bien qu'il nous contacte pour la première froggy's session de dégustation culinaire). Pour revenir à Her, le concert passe rapidement, comme une caresse du soleil.
Benjamin Biolay n'est pas que le dandy tombé dans la bossa nova depuis deux albums qu'on nous montre à longueur d'articles et de reportages. A Beauregard, la setlist de son concert va puiser dans toutes les périodes de son répertoire. Ceux qui pensent que Biolay ne peut pas chauffer un public de festival ne l'ont jamais vu sur scène. Il arpente la scène, est très proche de ses musiciens, complètement investi. La barre est très haute pour ce début de festival.
Metronomy est exactement le genre de groupe dansant qui ne peut pas déplaire. Ils étaient, comme Biolay, déjà venus à Beauregard, et le rappellent au public. Les hymnes dansants se succédent les uns aux autres. Consensuel et efficace, le concert passe bien rapidement. Peut-être une programmation un peu plus tardive aurait-elle néanmoins fait un peu plus danser le public.
La claque de ce premier jour vient d'un groupe dont on n'attendait pourtant rien. Les Midnight Oil reformés ont enchaîné les tubes que j'avais oubliés, mais visiblement pas le reste du public qui chantait les paroles. Peter Garrett, entre deux interventions rapides sur l'écologie s'adressait au public avec quelques mots de français. Le son était puissant, Peter Garrett, qui ressemble désormais un peu à Voldemort, est totalement habité. Dans les premiers rangs, un drapeau normand côtoyait un drapeau australien. En avant-dernière chanson, alors que le groupe offre une version de "Beds Are Burning" dont les basses frappent agréablement les thorax, la terre elle-même bouge. Sans aucun doute, le plus gros concert de cette première journée.
Placebo est à Beauregard pour les 20 ans de son premier album. A cette époque, Bernard Lenoir les avait invités en Black Session. La plupart des places étaient réservées au fan-club qui attendait son groupe fétiche avec effervescence. Les joyeux lurons de Placebo avaient alors joué seulement 35 minutes, ignorant même l'énorme perche tendue par Lenoir pour qu'ils viennent interprèter une dernière chanson. Brian Molko, qui a grandi au Luxembourg et parle un français excellent, n'avait pas daigné adresser un seul mot au public. Depuis, je méprise ce groupe. Et même si j'entends les chansons qu'ils interprètent alors que j'écris ces lignes en salle de presse, je n'irai pas voir la tête d'affiche de ce premier jour à Beauregard.
En sortant de la salle de presse pour attendre Møme, je vois l'immense lightshow de Placebo. Les retransmissions sur écran semblent avoir quelques problèmes, ce qui m'évitera même de voir la tête de la personne-de-petite-taille qui sert de chanteur à Placebo. Ils finissent leur set 15 minutes avant le début de Møme alors que jusqu'à présent tous les concerts se sont enchaînés. Placebo est définitivement un groupe de feignasses.
J'attends Møme au milieu d'ados que je reconnais au régime Biactol qu'ils sont certainement en train de suivre assidûment. Ça sent les pieds et le dessous-de-bras même en plein air. Premier indice, Møme plaît à un public jeune. Producteur niçois, amateur de Cher Faker, il a écrit son album en Australie. Il balance les beats dansants, joue de la guitare-clavier au manche qui s'allume, ramène un rappeur en featuring. Musicalement, c'est énergisant à défaut d'être très novateur. Mais le jeune DJ semble monté sur ressorts et a la joie communicative. Ce qui n'est déjà pas si mal.
Dernier artiste de la journée, Boys Noize envoie une techno beaucoup plus brutale que Møme. Sans gros effet de scène, il est simplement derrière ses tables de mixage. L'efficacité est maximum pour faire danser les derniers festivaliers présents. La première journée s'est déjà révélée très riche.
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